Qu’est ce que Caterpillar ?
Caterpillar Inc.
P.D.G : Jim Owens
Employés dans le monde : 93 229
Ventes et revenus 2004 (milliards de dollars) : 30,3
Profits 2004 (milliards de dollars) : 2,0
Total de l’actif (milliards de dollars) : 36,4
Succursales et point de vente de détail : 3 000 dans 180 pays
Filiales : Fg Wilson, MaK, Perkins, Solar
Caterpillar Royaume Uni : 16 sites
Employés au Royaume Uni : 10 000
Caterpillar et ses filiales lui appartenant en totalité ont 10 bureaux au Royaume Uni :
Caterpillar (Uk) , Building construction Products, Leicester
Perkins Engines, Peterborough
Caterpillar Defence Products UK et Perkins Engines, Shrewsbury
Perkins Engine, Stafford
Caterpillar Logistic Services, Desford.
FG Wilson, Larne
FG Wilson, Monkstown/Springvale
Caterpillar, Peterlee
Turner Powertrain Systems, Wolverhampton
Caterpillar Electronic & Electrical Systems, Peterborough
Site web Caterpillar : www.cat.com
Produits militaires Caterpillar : www.catdfp.com
Concessionnaire au Royaume uni : www.finning.co.uk
Introduction
Ce rapport est le premier d’une nouvelle série de rapports alternatifs de War on Want. Leur but est de comparer et de mettre en contraste la rhétorique des responsabilités sociales des entreprises avec la réalité de leurs pratiques réelles. Ces rapports font partie de la campagne actuelle de War on Want pour un cadre global de régulation des entreprises, et chacun recommande des actions que les gens ordinaires peuvent faire pour brider le pouvoir des multinationales.
Ce rapport examine la compagnie internationale de construction Caterpillar, et en particulier ses opérations dans les Territoires palestiniens occupés. Caterpillar est le plus grand employeur du Royaume Uni dans l’industrie du terrassement et de la construction, et bien connu dans le commerce pour sa gamme de chaussures de randonnée et d’accessoires de mode. Comme compagnie, Caterpillar déclare « se centrer fermement sur la rsponsabilité sociale », tandis que son Code de conduite dans le commerce international se vante de « standards éthiques élevés », par lesquels Caterpillar devrait « être un exemple à suivre par les autres ».
Cependant les bulldozers blindés de Caterpillar ont été responsables de la destruction de milliers de maisons, d’écoles, de puits et d’oliveraies palestiniens. Les bulldozers Caterpillar ont aussi été utilisés dans la construction du Mur de Séparation qu’Israël a construit sur le territoire palestinien et qui a été jugé illégal par la Cour Internationale de Justice. A la suite de cette implication dans la violations des droits humains des Palestiniens, Caterpillar a été le sujet de critiques sans précédent de la part des Nations Unies et des groupes internationaux pour les droits de l’homme.
Ce rapport, non seulement passe en revue le dossier Caterpillar, contre sa rhétorique sur la responsabilité sociale des entreprises. Il recommande aussi l’action, à la fois pour adresser un message à Caterpillar et pour réparer quelques uns des dommages infligés aux Palestiniens à travers la participation de la compagnie. C’est, plus largement, la mission de War on Want : aider les gens, dans les pays en développement, dans leur lutte contre les raisons originelles de leur pauvreté, mais aussi informer les gens des pays riches et les inciter à combattre les structures globales qui nourrissent la pauvreté à travers le monde.
Louise Richards
Présidente, War on Want
I -Les bulldozers Caterpillar en Palestine.
“Nous réussissons en “faisant le bien” dans le monde entier »
Jim Owens, PDG de Caterpillar.
Caterpillar est une firme internationale, dont le siège est établi dans l’Illinois, aux USA. Selon la documentation de la compagnie, c’est le plus grand fabricant au monde d’équipement de construction et d’extraction, et cependant ses machines ont aussi été utilisées dans des opérations militaires depuis plusieurs décennies. Depuis la guerre du Vietnam jusqu’à aujourd’hui, les bulldozers Caterpillar ont été utilisés pour le déblaiement et autres fins militaires. En effet, les bulldozers sont devenus le produit le plus reconnaissable de la compagnie.
Les bulldozers Caterpillar ont été utilisés par l’armée israélienne depuis son occupation des Territoires palestiniens en 1967. Leur utilisation est venue à l’attention du public international à l’occasion de trois incidents : (1) la destruction du camp de réfugiés de Jénine en Avril 2002 durant l’opération « Bouclier défensif » ; (2) le meurtre de la pacifiste Rachel Corrie en mars 2003 ; et (3) la destruction de maisons, routes et champs à Rafah durant l’Opération « Arc en Ciel » en mai 2004. Les bulldozers Caterpillar ont aussi été utilisés pour le déblaiement et la démolition de maisons pour la construction du Mur israélien illégal de séparation dont 161 km (sur un total projeté de 724 km) ont déjà été construits.
Les bulldozers Caterpillar sont actuellement utilisés dans presque toutes les opérations d’envergure des forces israéliennes dans les Territoires palestiniens occupés. Selon un commandant militaire israélien, les bulldozers Caterpillar sont « l’arme clé » [1]. Le D9, le bulldozer le plus couramment utilisé, a servi abondamment dans les démolitions de maisons, la destruction des infrastructures palestiniennes et des terres agricoles, et en soutien de la guerre urbaine. L’armée israélienne a actuellement environ 100 D9 en opération.
Le D9 Caterpillar pèse 53,8 tonnes, avec une hauteur de 3,9 m et une longueur de 8,13 m. Ce qui le rend aussi haut qu’un bus à étage et aussi lourd qu’un tank. Avec un moteur de 410 chevaux, il peut démolir facilement une maison, un verger ou une oliveraie. Les armes principales du D9 sont une pelle frontale et une pelle arrière « éventreuse » qui sert à ameublir le sol.
Une fois fournis par Caterpillar, les bulldozers sont modifiés par Israeli Military Industries, un fabricant d’armes israélien propriété de l’Etat, et par Israel Aircraft Industries, division de Ramta. Certains d’entre eux ont des équipements sur mesure, incluant des supports de mitrailleuse, des projecteurs de fumée et des lance-grenades. De surcroît, l’armée israélienne utilise trois types de chargeuses mobiles, qui sont aussi modifiées en Israël pour usage militaire [2]. Les rapports sur l’utilisation en Irak de 16 bulldozers blindés Caterpillar montre que les leçons des Territoires palestiniens occupés servent dans d’autres zones de conflit [3].
Le contexte : l’occupation militaire israélienne des Territoires palestiniens.
Israël a occupé les Territoires palestiniens de Cisjordanie et de Gaza en octobre 1967, et maintient aujourd’hui son occupation militaire depuis 37 ans. Ceci en dépit de la Résolution 242 du Conseil de Sécurité des Nations Unies du 22 novembre 1967, appelant au retrait des forces armées Israéliens des territoires, un appel qui a été réitéré régulièrement par les Nations Unies depuis.
Depuis Septembre 200, Israël a intensifié son action contre les Palestiniens vivant sous occupation, ce qui a amené une situation critique pour les droits de l’homme. Selon le centre pour les droits de l’homme israélien B’Tselem, un total de 3 189 palestiniens ont été tués depuis septembre 2 000 jusqu’à la fin 2004, dont 617 enfants ; ceci contre 940 Israéliens tués pendant la même période, dont 167 enfants. De surcroît, 5 794 Palestiniens, dont 373 enfants, sont emprisonnés en Israël à la fin 2004, dont 863 sans chef d’accusation ni jugement, et sans date de libération fixée.
II - Démolitions de maisons, de fermes et de terres
« Nous croyons que notre succès devrait aussi contribuer à la qualité de vie et à la prospérité des communautés »
Code de conduite de Caterpillar dans le commerce international, p. 12.
Selon les Nations Unies, un total de 4 170 maisons palestiniennes ont été détruites par l’armée israélienne entre septembre 2000 et Décembre 2004. [4] Le comité israélien contre les démolitions de maison (ICADH) indique qu’Israël a démoli presque 12 000 maisons palestiniennes depuis 1967, laissant près de 70 000 personnes sans abri et traumatisées. [5] Le D9 Caterpillar est l’instrument principal utilisé par l’armée israélienne pour démolir les maisons, les infrastructures et les terres agricoles dans les Territoires palestiniens occupés.
La raison habituelle donnée par les autorités israéliennes pour les démolitions est l’action punitive contre les maisons des familles des Palestiniens engagés, ou suspectés d’être engagés, dans des activités armées contre Israël. Même si cela est vrai, cette pratique est illégale selon la loi humanitaire internationale, comme toute destruction de propriété qui n’est pas rendue absolument nécessaire par des opérations militaires est une infraction à l’Article 53 de la 4ème Convention de Genève (dont fait partie Israël). Cependant, un rapport récent de B’Tselem cité par les Nations Unies montre que 47 % des maisons détruites par l’armée israélienne n’ont jamais abrité quiconque suspecté d’avoir pris part à des attaques contre des Israéliens [6].
En mai 2004, le rapporteur spécial des Nations Unies sur le Droit à la nourriture, Jean Ziegler, a écrit au PDG de Caterpillar, Jim Owens, pour exprimer sa préoccupation devant le fait que l’armée israélienne « utilisait des bulldozers blindés fournis par votre compagnie pour détruire des fermes, des serres, de vieilles oliveraies et des champs cultivés, ainsi que de nombreuses maisons palestiniennes et parfois des vies humaines (voir chap. VI pour les détails de cette lettre). L’armée israélienne a aussi détruit des centaines de bâtiments publics et des biens commerciaux dans les Territoires palestiniens occupés ces quatre dernières années, ainsi que de vastes zones de terres agricoles. Dans une période de seulement deux semaines, du 29 mars au 11 avril 2002, 11 écoles palestiniennes ont été complètement détruites et neuf vandalisées. [7]
L’agriculture est la seule source de revenus pour la plupart des Palestiniens. Les bulldozers Caterpillar ont déraciné de larges zones de terres cultivées, des centaines de milliers d’oliviers, citronniers et d’autres arbres, cultures et légumes. Les oliviers, en particulier, ont besoin de beaucoup d’années avant de devenir productifs, si bien que la destruction des oliveraies a des conséquences significatives et à long terme sur l’existence des Palestiniens.
La période entre octobre 2000 et décembre seule a vu la destruction de 454 541 arbres. [8]
Des centaines de puits, de bassins de réserve d’eau, de réservoirs et de pompes à eau électriques ont aussi été détruits, limitant sévèrement l’accès à l’eau potable. Le réseau d’irrigation a aussi été sévèrement endommagé. Pendant l’assaut majeur de l’armée israélienne sur le camp de réfugiés de Rafah dans la bande de Gaza en mai 2004 (v. chapitre IV), les dommages causés au réseau d’eau et d’égouts par la pelle « éventreuse » des D9 Caterpillar a fait que l’eau potable a été contaminée par les eaux usées. [9]
L’économie palestinienne est arrivée au bord de l’effondrement à cause de l’occupation israélienne, et ne se maintient que par l’aide extérieure. La démolition de maisons et la destruction systématique des terres et de l’infrastructure fait partie intégrante de la guerre économique menée contre les Palestiniens, et les a menés à une profonde pauvreté.
Les Nations Unies mettent parmi les suivantes les causes directes de la crise humanitaire à laquelle sont confrontés les Palestiniens [10] :
La confiscation par Israël de milliers d’acres des terres palestiniennes les plus fertiles pour construire son Mur illégal de séparation.
La destruction d’autres terres agricoles et réseaux d’eau pour la construction de colonies israéliennes et de routes « réservées ».
La destruction systématique des maisons, des oliveraies et du réseau d’eau dans des assauts répétés des forces armées israéliennes.
Les bulldozers Caterpillar ont été utilisés dans ces actions, et la compagnie a sa part de responsabilités dans la crise humanitaire qui s’en est ensuivie.
III - La bataille de Jénine
« Nous évitons ceux qui violent la loi ou ne respectent pas les saines pratiques commerciales que nous promouvons ».
Code de conduite de Caterpillar dans le commerce international, p. 7
Un des épisodes dont on a le plus fait état dans l’intensification des attaques israéliennes contre les Palestiniens ces quatre dernières années est la bataille de Jénine, en avril 2002. Les bulldozers Caterpillar ont été une arme clé dans cette action.
Jénine est un camp de réfugiés densément peuplé, qui héberge 14 000 personnes. Le camp est devenu un champ de bataille central dans l’opération « Bouclier défensif », une opération militaire israélienne qui a vu les violations des droits de l’homme les plus « graves et considérables » depuis le début de l’occupation en 1967, selon le centre pour les droits de l’homme B’Tselem. [11]. Sur la base de témoignages oculaires, Human Right Watch a fait l’inventaire de l’usage extensif de bulldozers blindés dans la démolition de maisons, jusqu’à bien après la fin des combats. [12]
A la fin de l’incursion, tout le quartier Hawashin du camp avait été nivelé, jusqu’à la dernière maison. Beaucoup de résidents n’avaient pas été avertis avant la démolition de leur maison. Lorsque l’avertissement avait été donné, il était souvent trop tard. Les gens ne pouvaient pas quitter leur maison à cause de l’intensité des tirs dehors. Beaucoup ont été enterrés vivants dans les ruines ; si certains ont pu être sauvés par la suite, d’autres ne l’ont pas été.
Fathia Suliman, 70 ans, a relaté comment sa maison a été démolie avec encore à l’intérieur son fils Jamal, qui était sourd et paraplégique :
Nous sommes entrés dans la maison, mais le conducteur du bulldozer n’a pas voulu attendre une minute que nous puissions sortir Jamal. Nous nous sommes précipités à l’intérieur alors que le bulldozer attaquait déjà la maison. La maison a commencé à s’effondrer, et nous avons couru pour sauver nos vies. La maison a été complètement détruite, avec Jamal en dessous. [13]
LES 75 heures de déchaînement d’un soldat israélien avec un D9 Caterpillar.
Dans un interview exlusif à Yediot Aharonot, le tabloid israélien le plus populaire, le 31 mai, le conducteur de D9 Caterpillar Moshe Nissim a raconté ses 75 heures de déchaînement à Jénine :
"Je n’avais de pitié pour personne. J’aurais effacé n’importe qui avec le D9....Quand on me disait de démolir une maison, je saisissais l’occasion pour en détruire d’autres en plus....Ils étaient avertis par haut parleur de sortir de la maison avant que j’arrive, mais je ne laissais de chance à personne. Je n’attendais pas. Je ne donnais pas un coup, attendant qu’ils sortent. Je percutais la maison à pleine puissance, pour la démolir le plus vite possible." [14]
L’unité de bulldozers a été citée pour services exceptionnels pour son rôle dans cette opération.
IV - Rafah rasée
En mai 2004, les bulldozers Caterpillar ont été utilisés dans l’assaut de l’armée israélienne sur le camp de réfugiés de Rafah, dans la bande de Gaza. L’opération, au nom de code Opération Arc en Ciel, durant une semaine, du 18 au 24 mai, a fait 43 morts, dont plusieurs enfants. John Dugard, rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits de l’homme dans les Territoires palestiniens occupés, a accusé l’armée israélienne de graves violations de la 4ème Convention de Genève pendant l’assaut. Dans son rapport d’Août 2004 à l’Assemblée générale des Nations Unies, Dugard note :
"Des maisons ont été détruites absolument sans raison. Les bulldozers ont sauvagement éventré des routes, y compris les lignes électriques, les canalisations d’eau et les égouts, dans une brutale démonstration de force. Il est temps pour la communauté internationale d’identifier les responsables de cette destruction sauvage de biens et de prendre les mesures légales nécessaires contre eux" [15].
Human Right Watch a mis l’accent en particulier sur le rôles des D9 Caterpillar dans la destruction systématique de maisons à Rafah dans son rapport : Rafah rasé : démolition massive de maisons dans la bande de Gaza. Selon ce rapport, l’armée israélienne « a utilisé les D9 Caterpillar pour indifféremment ravager des routes, détruire des réseau d’eau et d’égouts, créant un risque sanitaire important dans une communauté déjà vulnérable ». [16] Au total, 298 maisons ont été détruites, plus qu’en aucun autre mois depuis septembre 2000. Rafah est un des endroits les plus densément peuplés au monde, et beaucoup de résidents ont été dépossédés pour la deuxième ou troisième fois.
En dépit de la provision de fonds pour reconstruire, il n’y a pas assez de terre disponible dans la bande de Gaza, si bien que la construction n’a pas pu se faire. En plus de la démolition des maisons, les bulldozers ont rasé 30 hectares de terres agricoles, couvertes de serres pour les fruits, les fleurs et les légumes. L’armée israélienne a ravagé 51 % des routes de Rafah en traînant les pelles « éventreuses » au milieu des routes. [17]
La mort de Rachel Corrie
Rachel Corrie, une pacifiste américaine de 23 ans, a été tuée par un bulldozer D9 Caterpillar le 16 mars 2003, alors qu’elle se tenait devant une maison palestinienne à Rafah, pour tenter d’empêcher sa démolition. Rachel était à Gaza comme volontaire de l’International Solidarity Movement (ISM). Pendant deux heures, elle et d’autres pacifistes ont tenté d’empêcher les démolitions en bloquant physiquement le passage de deux bulldozers. D’autres pacifistes de l’ISM qui étaient avec elle ont dit que le conducteur du bulldozer était conscient que Rachel était là mais a continué à détruire la maison. Elle portait une veste orange vif et se servait d’un porte-voix. Au départ le conducteur a fait tomber sur elle du sable et d’autres débris, mais ensuite le D9 l’a poussée au sol et a commencé à rouler sur elle, fracturant ses bras, ses jambes et son crâne. Elle a été déclarée morte peu après son arrivée à l’hôpital.
V - Le mur de séparation israélien
« La réputation d’intégrité de Caterpillar est une part fondamentale de notre héritage...les valeurs auxquelles nous croyons, les critères éthiques élevés qui sont les nôtres... »
Code de conduite de Caterpillar dans le commerce international, p. 3
Les bulldozers Caterpillar sont impliqués dans une des actions les plus controversées d’Israël ces dernières années : la construction du Mur illégal de Séparation. Le Mur s’enfonce profondément en territoire palestinien, et a détruit l’existence des Palestiniens qui se retrouvent vivre à côté de lui. John Dugard, Rapporteur spécial aux Nations Unies sur les Droits de l’Homme dans les Territoires palestiniens occupés, relève que le Mur a coupé les Palestiniens de leurs écoles, universités, champs, hôpitaux, familles et amis, avec des restrictions de mouvement qui ressemblent beaucoup aux « lois de sauf-conduit » de l’Afrique du Sud de l’apartheid. » [18]
Le Mur de séparation est prévu pour être long de 724 km lorsqu’il sera terminé, et environ 160 km ont déjà été construits. Sa structure est faite en partie de barbelés, en partie de métal électrifié et en partie d’un mur de béton qui fait jusqu’à 8 mètres de haut, avec des tours de guet et des positions de tir toutes les quelques centaines de mètres. Pour créer l’espace nécessaire au mur et aux zones tampon qui s’étalent de chaque côté, on doit déblayer les terres agricoles et détruire les biens - c’est là que Caterpillar entre en jeu.
Les bulldozers et les pelleteuses Caterpillar sont impliqués dans le projet de construction du Mur. [19] Le Centre de Recherche sur la responsabilité des investisseurs, basé aux Etats-Unis, dans un rapport spécial sur Caterpillar en mars 2004, a confirmé que des bulldozers Caterpillar « ont été utilisés pour dégager des étendues de terre pour la nouvelle barrière de séparation ». [20]
L’impact de ces déblaiements de terrain est profondément traumatisant pour les communautés qui les subissent. Dans un de ces incidents en octobre 2004, les deux villages cisjordaniens de Asal Al-Foqa et Dir Al-Asal Al-tihta on vu leurs oliveraies détruites par les bulldozers blindés israéliens.
« Les bulldozers militaires ont déraciné des centaines d’oliviers après avoir assiégé les deux villages et empêché les propriétaires des champs de les rejoindre....les terres sont fertiles et sont considérées comme l’unique moyen de subsistance de dizaines de familles dans le village. ». [21]
Dans un rapport précédent de janvier 2003, le Palestine Monitor a rapporté que les bulldozers étaient engagés « dans la destruction de tout le village d’ Al Daba , dans le district de Qalqilia... Les bulldozers blindés Caterpillar de 60 tonnes, faits aux Etats Unis, ne feront qu’une bouchée de 42 maisons, 600 à 700 dunums de terres agricoles, une mosquée et une école élémentaire de 132 enfants. » [22]
Israël prétend que le Mur de Séparation est une « barrière de sécurité » destinée à empêcher les militants palestiniens de pénétrer en Israël. John Dugard, Rapporteur spécial des Nations Unies sur les Droits de l’homme dans les Territoires palestiniens occupés, a rejeté cette déclaration, accusant au contraire le Mur d’être conçu pour incorporer les colons israéliens dans ses limites de facto, confisquer les terres palestiniennes et encourager l’exode des Palestiniens en leur déniant l’accès à leurs terres et à leurs ressources en eau, et en restreignant leur liberté de mouvement. [23]
La Cour Internationale de Justice déclare le Mur de séparation israélien illégal.
Le 9 juillet 2004 la Cour Internationale de Justice (CIJ), la plus haute autorité judiciaire des Nations Unies - a déclaré le Mur de séparation illégal. La CIJ a demandé l’arrêt de la construction du Mur et le démantèlement des sections déjà construites, de même que des compensations pour les Palestiniens affectés par le Mur. Le 20 juillet 2004 l’Assemblée générale des Nations Unies a voté à une écrasante majorité pour demander qu’Israël se conforme à la décision de la CIJ.
La CIJ a aussi demandé que la communauté internationale se mobilise pour arrêter la construction du Mur. Tous les Etats membres de la 4ème Convention de Genève doivent s’assurer qu’Israël se conforme à la Convention, et il y a aujourd’hui un mouvement international grandissant appelant à des sanctions économiques contre Israël pour forcer l’état à se soumettre à ses obligations légales. De même, il incombe aux gouvernements de réprimer les compagnies comme Caterpillar, qui participent à la construction du Mur.
Pour plus d’informations sur le Mur de séparation, voir http://www.nowall.org.uk
VI -La responsabilité de l’entreprise ?
« Comme compagnie et comme individus, nous nous tenons aux plus hauts niveaux d’intégrité et de comportement éthique....Si nous ne le faisions pas, nous mettrions en péril le nom de Caterpillar et notre réputation d’intégrité. »
Code de conduite de Caterpillar dans le commerce international, p. 4
Le code de conduite dans le commerce international de Caterpillar se vante de « standards éthiques élevés », qui « devraient être un exemple à suivre pour les autres ». Cependant les Nations Unies, les groupes internationaux pour les Droits de l’homme et même les propres actionnaires de Caterpillar soutiennent que la compagnie viole sérieusement son propre code de conduite en étant complice de la violation des droits des Palestiniens.
Quel est le degré de responsabilité de Caterpillar dans l’usage final qui est fait de ses bulldozers ? Caterpillar convient que la compagnie doit agir d’une façon responsable et éthique, mais soutient qu’elle ne peut pas être tenue pour responsable pour l’usage final de ses machines. Comme l’exprime le PDG Jim Owens dans une lettre à Kevin Clark, de l’ISM :
« Nous partageons votre compassion pour les familles qui connu des pertes au Moyen-Orient. Cependant, le fait demeure qu’avec plus de deux millions de nos machines en activité à travers le monde, nous n’avons tout simplement pas la possibilité pratique ou le droit légal de déterminer comment nos produits sont utilisés après leur vente ». [24]
Cependant Caterpillar sait parfaitement comment ses produits sont utilisés en Palestine. En effet, en avril 2004, un groupe des propres actionnaires de Caterpillar a introduit une résolution critiquant l’usage final des produits de la compagnie. La résolution posait la question de comment « les directeurs de Caterpillar pouvait concilier leur acquiescement » à l’usage fait par l’armée israélienne de leur équipement contre les civils avec le Code de conduite dans le commerce international. Notant les « coûts en relations publiques » négatifs pour Caterpillar de son implication dans les opérations militaires israéliennes, la résolution demandait aux directeurs de Caterpillar d’établir une enquête externe sur le rôle de la compagnie en Palestine.
Dans un engagement sans précédent avec un acteur non gouvernemental, le Rapporteur spécial des Nations Unies Jean Ziegler a écrit à Jim Owens on mai 2004 pour exprimer son inquiétude devant l’implication de Caterpillar en Palestine.
"Je suis profondément inquiet devant les actions des forces d’occupation israéliennes à Rafah et dans d’autres lieux de Gaza et de Cisjordanie, qui utilisent les bulldozers blindés fournis par votre compagnie pour détruire des fermes, des serres, de vieilles oliveraies et des terres agricoles cultivées, ainsi que de nombreuses maisons palestiniennes et parfois des vies humaines, dont celle de la pacifiste américaine Rachel Corrie."
La lettre met en particulier l’accent sur la violation des droits des Palestiniens à la nourriture , qui font partie intégrante de la Convention internationale des Droits économiques, sociaux et culturels. Si les Etats sont soumis à la Convention et sont les ultimes responsables de son respect, la lettre expose clairement que le secteur économique privé a ses propres responsabilités dans le respect du droit à la nourriture. La lettre continue :
"Dans ce contexte, nous nous inquiétons aussi du fait que l’autorisation de la livraison de vos bulldozers D9 et D10 Caterpillar à l’armée israélienne, via le gouvernement des Etats-Unis, en connaissance certaine du fait qu’ils sont utilisés pour de telles actions, pourrait impliquer une complicité ou une acceptation, de la part de votre compagnie, de violations réelles et potentielles des Droits de l’homme, y compris le droit à la nourriture".
En dépit de l’accusation sans précédents de possible complicité dans des violations des Droits de l’homme, Caterpillar n’a pas répondu à la lettre du Rapporteur spécial des Nations Unies.
De plus, il n’a pas fourni d’informations sur les « mesures urgentes » que, selon la lettre, la compagnie doit prendre pour faire face à ces inquiétudes.
Les liens militaires de Caterpillar
Caterpillar affiche ouvertement l’utilisation de ses bulldozers et excavateurs dans des conflits militaires comme ceux d’Iraq, d’Afghanistan et de Bosnie. [25]25
Son site internet affirme que ses produits sont disponibles pour les forces militaires américaines et étrangères, et que la compagnie a développé de nouveaux bulldozers pour usage spécifique à des fins militaires, dont un nouveau D7 modifié. L’armée israélienne a récemment commandé 25 bulldozers blindés D9 Caterpillar renforcés par Israel Aircraft Industries, et le Ministère de la Défense américain a acheté 14 bulldozers blindés Caterpillar D9R à l’armée israélienne pour les utiliser dans l’opération Enduring freedom en Irak. Les produits Caterpillar sont aussi exposés dans des salons d’exposition d’armes, y compris le Defense Systems and Equipment International (salon international dees systèmes de défense et d’équipement) à Londres et Eurosatory à Paris. Le Ministère de la Défense du Royaume Uni a conclu deux contrats avec Caterpillar UK Ltd en 2001 et 2000, pour £ 20-50 millions. [26]
Caterpillar est aussi le bénéficiaire direct des programmes d’assistance du gouvernement des Etats-Unis, puisque qu’Israël est le destinataire n° 1 de l’assistance militaire américaine, et que 75 % de cette aide doit être dépensé dans des compagnies américaines. Dans une lettre envoyée au groupe Une Voix Juive pour la Paix en août 2003, le PDG de Caterpillar Jim Owens a confirmé que les bulldozers de la compagnie sont vendus à Israël via le US Foreign Military Sales Program (programme américain de ventes militaires à l’étranger). Comme le note Une Voix Juive pour la Paix « les bulldozers Caterpillar ne sont pas fournis à Israël comme équipement pour la construction, mais, explicitement, comme armes ». [27] Ou, selon les mots de l’analyste du Proche Orient Robert Fisk, le bulldozer Caterpillar qui a tué Rachel Corrie « faisait partie de l’aide habituelle des Etats-Unis à Israël ». [28]
VII -Agissez !
"L’engagement de Caterpillar dans la responsabilité sociale assure notre capacité à répondre aux besoins d’aujourd’hui sans sacrifier la capacité de répondre aux besoins des générations futures ".
Caterpillar « D’un coup d’œil »
War on Want croit que les compagnies doivent être tenues pour responsables de leur complicité dans les violations des Droits de l’homme. Cependant le gouvernement du Royaume Uni préfère soutenir l’approche volontaire de la « responsabilité sociale des entreprises », en dépit du fait que celle-ci s’est montrée une alternative inefficace à la réglementation. Aussi longtemps que la volonté politique de brider les pouvoirs des entreprises fait défaut à nos élus, c’est à nous de faire pression.
Nous demandons à tous les lecteurs et ceux qui nous soutiennent de prendre les mesures suivantes :
– 1.Boycottez Caterpillar. Caterpillar ne produit pas seulement des équipements pour la construction, il vent également des chaussures et des vêtements au Royaume Uni, ainsi que d’autres produits comme des véhicules miniature Caterpillar, des montres, des chopes, des sacs et de la papeterie. Ne les achetez pas - et dites à vos amis et à votre famille d’en faire de même.
– 2.Dites à Caterpillar de cesser de fournir ses bulldozers à l’armée israélienne. Ecrivez à Jim Owens, PDG de Caterpillar, en lui demandant de suspendre toutes les ventes de D9 Caterpillar à Israël tant qu’ils sont employés en violation des droits des Palestiniens.
Son adresse : James W. Owens, Caterpillar Inc, 100 NE Adams St, Peoria, IL 61629-1425, USA ; ou envoyez-lui un courriel : owens_james_w@cat.com
– 3.Interpellez le gouvernement du Royaume Uni pour qu’il soutienne l’encadrement obligatoire des responsabilités des entreprises pour réguler les activités de compagnies comme Caterpillar.
Ecrivez à Rt Hon Jack Straw MP, Secretary of State for Foreign and Commonwealth Affairs, Foreign and Commonwealth Office, King Charles Street, London SWIA 2AH, en demandant au gouvernement d’abandonner sa promotion des alternatives volontaires et de soutenir à la place une régulation obligatoire des entreprises.
– 4.Achetez l’huile d’olive du commerce équitable Zaytoun, et aidez à défaire les dommages causés par les bulldozers Caterpillar. Zaytoun est un projet non lucratif basé au Royaume Uni, pour l’achat d’huile d’olive extra vierge biologique à des agriculteurs palestiniens à des prix équitables. L’huile d’olive est la colonne vertébrale de l’économie agricole palestinienne, mais plus de la moitié de la récolte d’olives du pays reste invendue et se perd. Pour plus d’informations voir :
www.zaytoun.org ou courriel : order@zaytoun.org.
Suivez les campagnes de War on Want sur :
http://www.waronwant.org /palestine et http://www.nowall.org.uk.
Et aussi :
Site Caterpillar, en lien avec la campagne au Royaume Uni : http://www.caterkiller.org
Site Stop Caterpillar : http://www.catdestroyshomes.org
Site Stop the Wall : http://www.stopthewall.org