Il ne devrait pas y avoir de relation entre l’annonce de la prochaine venue de Barack Obama à Jérusalem - vers le 21 mars - et la formation du prochain gouvernement dirigé par Benyamin Nétanyahou. Mais l’annonce de cette visite, confirmée le 5 février par la Maison Blanche, intervient alors que le premier ministre israélien est au centre de marchandages politiques compliqués : le choix de ses partenaires au sein de la prochaine coalition gouvernementale implique des orientations politiques contradictoires.
Si M. Obama a décidé de se rendre en Israël, c’est certes pour réaffirmer que l’Amérique sera toujours garante de la sécurité de l’Etat juif, mais aussi pour tenter de réactiver un processus de paix israélo-palestinien aujourd’hui moribond, même si la Maison Blanche prend soin de souligner qu’il ne présentera pas de " plan de paix ". Ce qui suppose que M. Nétanyahou soit dans le même état d’esprit.
Or, certains partenaires potentiels de M. Nétanyahou sont favorables à une relance des pourparlers israélo-palestiniens, alors que d’autres y sont hostiles. L’annonce de la visite de M. Obama facilite la tâche de M. Nétanyahou si celui-ci cherche à s’entourer d’éléments jugés modérés, elle la complique s’il est obligé de faire appel aux formations ultranationalistes et ultraorthodoxes.
Le 5 février, la prestation de serment des 120 députés de la Knesset élus le 22 janvier a été marquée par l’accolade appuyée de Yaïr Lapid, chef du parti Yesh Atid (" Il y a un avenir ") à M. Nétanyahou, manifestement embarrassé par l’empressement de celui qui se pose déjà comme un rival.
Enchères
Fort de ses 19 sièges et de son aura de champion de la classe moyenne, M. Lapid fait monter les enchères, réclamant le ministère des affaires étrangères (pour lui), mais aussi les ministères de l’éducation, de la justice et du logement, ainsi que la présidence de la commission des finances de la Knesset.
L’entourage de M. Nétanyahou laisse entendre que son succès électoral a monté à la tête de l’ancien journaliste, qui a d’ailleurs déclaré qu’il se verrait bien, dans un avenir proche, à la place de M. Nétanyahou.
Si Avigdor Lieberman, chef du parti ultranationaliste Israel Beiténou (" Israël, notre maison ") a immédiatement stigmatisé ce député " qui n’a pas siégé une seule journée et veut déjà être premier ministre ", c’est qu’il est inquiet : le premier ministre lui a promis qu’il retrouverait les affaires étrangères, lorsqu’il en aura fini avec ses ennuis judiciaires. Mais, outre que son procès pour abus de confiance et fraude n’aura pas lieu avant plusieurs mois, M. Lieberman n’est pas le titulaire idéal pour amorcer des relations décrispées avec les Etats-Unis.
A Washington, on préférerait de beaucoup que Tzipi Livni, chef du parti centriste Hatnouah (" Le mouvement ") retrouve ce ministère. Sauf que Yaïr Lapid est difficilement contournable, surtout s’il est confirmé qu’il a conclu un pacte avec Naftali Bennett, chef du parti nationaliste religieux Habayit Hayehoudi (" La maison juive "), aux termes duquel les deux formations entreront au gouvernement, toutes les deux ensemble ou pas du tout.
Or, M. Bennett présente deux inconvénients : un vieux contentieux avec M. Nétanyahou (du temps où l’intéressé était son chef de cabinet) et son hostilité définitive à un Etat palestinien.
Si M. Nétanyahou se résigne à faire entrer Yaïr Lapid et Naftali Bennett dans son gouvernement, il est probable qu’il devra faire une croix sur les partis ultraorthodoxes Shass et Judaïsme unifié de la Torah, ses " alliés naturels " avec la formation de M. Lieberman. Pourquoi ? Le principal cheval de bataille de M. Lapid est la conscription obligatoire des jeunes haredim (" croyants-Dieu "), autrement dit une déclaration de guerre pour les partis ultraorthodoxes.
Il reste au moins trois semaines à M.Nétanyahou pour bâtir sa coalition gouvernementale.