Effroyables et illégales. C’est en ces termes que B’Tselem a qualifié mercredi les frappes qui ont détruit l’été dernier des milliers de maisons dans la bande de Gaza. Centre israélien d’information pour les droits de l’homme dans les territoires occupés, l’ONG basée à Jérusalem publie une étude accablante, qui passe en revue 70 cas où des Palestiniens sont morts chez eux, sous les bombes. Au total, ils seraient 606 à avoir ainsi perdu la vie durant les cinquante jours de l’opération « Bordure protectrice ». Pour 70% de ces victimes, il s’agissait de femmes, de retraités ou de mineurs. Parmi eux, 93 enfants qui n’avaient pas cinq ans.
On se rappelle que plus de 2200 Palestiniens ont péri dans la bande de Gaza durant la guerre, dont des centaines d’enfants. Environ 18 000 maisons ont été détruites ou gravement endommagées, laissant plus de 100 000 habitants à la rue. Simultanément, au moins 4000 roquettes palestiniennes ont été lancées sur la population israélienne, tuant cinq civils dont un garçon de quatre ans.
Militants du Hamas ciblés
Pour B’Tselem, il est clair que l’armée israélienne avait pour consigne de cibler les domiciles supposés de militants du Hamas ou du djihad islamique. Des opérations punitives particulièrement meurtrières, interdites par le droit international humanitaire (DIH). L’ONG met en doute la bonne foi de l’état-major militaire, pour qui ces maisons servaient en fait de centres de commandement ou comme « infrastructure terroriste ». Le plus souvent, c’est la biographie militante de la personne ciblée qui a été mise en avant, notent les défenseurs israéliens des droits de l’homme.
Selon le droit, martèle B’Tselem, il ne suffit pas qu’une cible constitue un « objectif militaire ». Pour devenir légitime et justifier les pertes civiles, il faut que sa destruction offre un avantage militaire clair aux attaquants. Bref, les dirigeants israéliens ne peuvent pas simplement dégager leur responsabilité en accusant le Hamas d’avoir volontairement opéré depuis des zones résidentielles.
Boucliers humains
Or, ce rapport tombe quelques jours à peine après celui d’une autre ONG israélienne, Physicians for Human Rights (Médecins pour les droits de l’homme), accusant l’armée d’avoir utilisé des civils comme boucliers humains ou empêché la population de fuir des zones bombardées. Et il y a un mois, l’organisation Amnesty International qualifiait de « crime de guerre » la destruction d’immeubles d’habitations.
La procureure générale de la Cour pénale internationale, Fatou Bensouda, a annoncé il y a deux semaines l’ouverture d’un examen préliminaire servant à déterminer s’il existe une « base raisonnable » pour ouvrir une enquête sur des crimes de guerre présumés. Une menace devenue réelle pour Israël car l’Etat de Palestine est devenu membre de la CPI au début de ce mois.
Enfin, à Genève, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a lancé sa propre investigation. Sans oublier celle mise sur pied par le secrétaire général, Ban Ki-moon, qui s’interroge sur la destruction d’infrastructures internationales.