20 novembre 2023, 7amleh, Le Centre arabe pour le développement des médias sociaux a publié un exposé de position intitulé "Nouvelle loi interdisant l’usage de publications terroristes", rédigé par l’avocat Abeer Bakr. Le document vise à analyser la loi du point de vue des droits de l’Homme et à examiner ses répercussions sur le terrain. Le 8 novembre 2023, la Knesset israélienne a approuvé le projet de loi interdisant l’usage de publications terroristes, avec 17 membres de la Knesset votant pour et 4 contre.
La nouvelle loi israélienne criminalise l’usage de matériel publié par une organisation terroriste. Elle stipule que l’usage "systématique et régulier" de publications comprenant un appel direct à perpétrer un acte de terreur tel que défini par la loi israélienne, ou de publications contenant des mots d’éloge, de sympathie ou d’encouragement pour un acte de terreur, dans des circonstances qui indiquent une identification avec une organisation terroriste, est passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à un an.
L’exposé de position indique que la nouvelle loi israélienne ouvre la voie à la criminalisation préventive de personnes qui n’ont ni commis ni planifié de crime et renforce la surveillance des citoyens arabes palestiniens par les autorités israéliennes tout en portant atteinte à leurs droits à la vie privée, à la liberté d’expression et au droit d’accès à l’information. Les tentatives d’adoption d’une législation similaire en France ont été précédemment invalidées, la loi étant considérée comme inconstitutionnelle en raison de la violation des droits et de l’absence d’intention criminelle de commettre un acte de terrorisme. Même la loi antiterroriste britannique, qui comporte une disposition criminalisant l’usage de publications, le fait dans le contexte de publications utiles à une personne planifiant de commettre un acte interdit.
Le document examine de nombreux aspects, notamment la tentative de la loi de punir une personne sur la base de ses pensées et de ses sentiments, ce qui est contraire au principe premier et fondamental du droit pénal, selon lequel les pensées seules ne peuvent constituer une infraction pénale. En outre, l’ambiguïté et le flou de la loi brouillent les frontières entre ce qui est interdit et ce qui est autorisé d’une manière qui ne permet pas à l’individu de comprendre pleinement si ses actions sont autorisées ou non.
En outre, la loi viole la vie privée des citoyens en autorisant la surveillance de leurs activités dans l’espace numérique avant qu’ils n’aient été condamnés, accusés ou même soupçonnés d’un quelconque délit, les transformant ainsi en criminels potentiels. Elle limite également les journalistes dont le travail repose entièrement sur l’usage de contenu et l’accès aux faits, en particulier pendant les périodes d’urgence, ce qui peut non seulement limiter la liberté des journalistes mais aussi nuire au droit du public à la liberté d’expression et au droit de rechercher, de recevoir et de transmettre des informations par le biais de n’importe quel média.
Il convient de noter que de nombreuses organisations de la société civile en Israël ont exprimé leur opposition à la loi, contrairement aux organisations de droite qui l’ont accueillie favorablement. La mise en pratique de cette nouvelle loi, en particulier à un moment où le pays est exposé à des crises continues et à de graves violations humanitaires, amplifiera la tendance à la criminalisation. Ceci est particulièrement pertinent à une époque où de nombreuses personnes recherchent une variété de sources d’information sans autre motif que celui de rester informées. On s’attend à ce que cette loi ait des conséquences considérables sur les libertés et les droits et qu’elle contribue à la peur et à l’intimidation. Cette loi aura probablement un effet dissuasif glaçant, décourageant la participation politique, la liberté d’expression ou les activités qui s’opposent aux politiques israéliennes, en particulier celles liées à la guerre d’Israël contre la bande de Gaza, en raison de l’utilisation d’un langage peu clair et de définitions larges et vagues.