Pour le Président américain, pas de doute : « c’est la force morale de la non-violence qui a fait pencher l’arc de l’Histoire vers la justice une fois encore ». Hommage donc à Gandhi et , bien sûr à Martin Luther King, l’émancipateur des Noirs américains...
Tant il est vrai qu’à partir de la Tunisie, bientôt suivie par l’Egypte, le monde arabe vient de démontrer à la face du monde sidéré, l’extraordinaire puissance morale – et donc politique – de l’action non-violente de masse.
Cette révolution populaire peut se synthétiser ainsi : mobilisation de masse, refus de l’emploi de la violence, résistance non armée face à la répression, et victoire. Mais le succès n’aurait pas été aussi éclatant sans l’application d’une recommandation souvent rappelée par les participants : « Ne sous-estimez pas le pouvoir des images et des vidéos, prenez-en autant que vous pouvez ! » D’où la forêt de bras tendus ne fermant plus le poing vengeur mais brandissant des portables enregistrant en direct et retransmettant l’image de l’événement vers le monde entier...
Une révolution gandhienne
Cet extraordinaire mouvement a appliqué, sans certainement la connaître en profondeur, la stratégie gandhienne qui a inspiré Luther King. Ce qui a triomphé, c’est cette forme de lutte politique fondée sur l’effet déstabilisant profond que doit produire chez l’oppresseur la non-résistance de milliers et de millions de personnes jusque-là humiliées, attaquées et violées dans leurs droits, leur personne, leur corps même.
Cette non-violence suppose non pas une absence de confrontation, mais bien au contraire la visualisation maximale d’une transgression, d’une désobéissance civile de masse, absolument pacifique, par exemple à partir d’un grand rassemblement non autorisé ou de lieux interdits...Ce rassemblement attire un détachement armé du régime oppresseur qui s’expose ainsi, face à la foule aux mains nues, et qui n’a alors le choix que de réprimer ou de céder, c’est-à-dire dans les deux cas à perdre politiquement aux yeux de l’opinion publique
Ce genre de « scène » doit, pour être politiquement efficace, se dérouler sous les yeux du monde bientôt amené à se solidariser avec les victimes. Cela suppose de la part des masses qui manifestent une détermination sans faille. En d’autres termes, dans la révolution gandhienne ce qui est et reste fondamental c’est la perception et la dénonciation de la violence d’autrui, en l’occurrence du régime oppresseur.
C’est exactement ce qui s’est passé en Tunisie et en Egypte. Cette révolution non-violente marquera le 21e siècle ; elle ouvre la porte à une nouvelle vision anthropologique, à une autre société, à une autre humanité.