Le gel de la colonisation d’Israël est censé mettre un frein à de nouvelles constructions neuves en Cisjordanie, mais il sert aussi à protéger les avant-postes et les maisons de colons construits illégalement. [1]
L’exécution d’un ordre d’évacuation d’avant-postes – une mesure demandée aussi par les USA pour aider à la relance des pourparlers de paix avec les Palestiniens – est reportée depuis des années. Les organisations pacifistes palestiniennes et israéliennes ont porté le problème de ces retards devant la Cour suprême d’Israël qui a demandé à Israël un échéancier pour les démolitions.
L’Etat a répondu la semaine dernière : faire respecter le gel de 10 mois des nouvelles constructions dans les colonies de Cisjordanie allait lui occuper tellement de main-d’œuvre qu’il ne pourra pas, dans l’immédiat, démanteler les avant-postes coloniaux non autorisés.
« La nouvelle situation oblige à reporter les autres exécutions d’ordre public, » a déclaré le procureur de l’Etat devant la Cour qui était saisie pour ordonner l’exécution d’ordres d’évacuation concernant des avant-postes de 250 colons. « L’échelon politique conduit à un réexamen de l’influence du gel sur les ordres de démolitions antérieurs. »
Des critiques doutent de la sincérité du gel
Cette déclaration nourrit le souci que, en dépit des affrontements publics avec les colons juifs sur le gel partiel, le moratoire ne se révèle guère plus qu’un coup de relations publiques, un mirage.
« L’Etat ne veut pas vraiment affronter les colons. Il n’est pas sérieux quand il parle d’appliquer la loi, » dit Hagit Ofran qui a saisi la Haute Cour d’Israël contre les six avant-postes non autorisés, au nom de l’organisation pacifiste la Paix Maintenant. « Vous voulez en sortir avec les constructions illégales. Il y a beaucoup de doutes quant à votre sincérité sur l’application du gel. »
Le gouvernement de Netanyahu s’est exposé, une fois encore, aux feux de la critique en désignant cette semaine les colonies de quelque 100 000 résidents comme secteurs « privilégiés » pour l’aide publique. L’initiative a été qualifiée par le quotidien israélien Maariv de « double langage » concernant l’expansion des colonies.
Cela n’a pas apaisé les colons ni leurs partisans dont quelque 15 000 ont manifesté devant la résidence du Premier ministre, Benjamin Netanyahu, à Jérusalem, mercredi soir.
« Quand Netanyahu subit une forte pression pour geler les colonies, il faut qu’il trouve un moyen pour réduire la pression, » dit Gideon Doron, professeur de sciences politiques à l’université de Tel-Aviv. « Pour la survie du Likoud en tant que parti, il vient et il dit : ‘Même si je vous donne une gifle, je vous donne aussi des bonbons’. »
Israël réagit aux critiques
Le porte-parole du gouvernement, Mark Regev, a déclaré que le gouvernement était sérieux sur le gel et que les colonies concernées par l’aide publique ne toucheront les subventions que pour leur bien-être social et non pour de nouvelles constructions.
Mais les critiques de la politique coloniale d’Israël soulignent que si le gouvernement n’agit pas contre les constructions illégales, le gel va perdre tout son sens. Depuis des années, les officiels du gouvernement parlent de la nécessité de faire appliquer la loi quant aux avant-postes non autorisés, mais ils n’ont jamais vraiment tenus leurs promesses pour ces quelques deux douzaines de colonies où vivent environ 2 000 colons idéologiques.
Même si l’Etat a démantelé plusieurs avant-postes non autorisés, Mr Regev reconnaît que, « Bien sûr, il reste encore beaucoup à faire. »
L’ultime excuse
Une décision d’agir contre les avant-postes illégaux est porteuse de graves conséquences. Elle provoquerait probablement les pires affrontements avec les colons et rapidement une crise politique avec les partisans de la droite de Netanyahu. L’Etat risquerait aussi une crise au sein de l’armée vendant de ces soldats motivés par l’idéologie qui ont déjà menacé de ne pas obéir aux ordres.
Mais Ofran dit qu’assez c’est assez.
« Ils vont nous manipuler pour ces avant-postes illégaux jusqu’à Dieu sait quand » dit-elle. « Ils ont des excuses à chaque fois. Maintenant, l’excuse, c’est le gel ».