Le président américain Barack Obama a « condamné » vendredi soir le recours à la violence contre les manifestants « pacifiques » et appelé au respect de leur liberté d’expression en Libye, au Yémen et au Bahreïn.
En Libye, le vent de révolte qui s’est levé mardi, s’est déjà soldé par la mort d’au moins 84 personnes, selon l’organisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch (HRW), qui s’appuie sur des témoignages de personnel hospitalier et de témoins. Selon un décompte de l’AFP établi à minima à partir de sources locales, 41 personnes avaient péri vendredi soir dans les émeutes concentrées à Benghazi, la deuxième ville du pays, et dans l’est.
Suivant l’exemple de ses voisins tunisien et égyptien qui ont chassé leurs dirigeants, les manifestants réclament le départ immédiat du colonel Mouammar Kadhafi, au pouvoir depuis 1969.
A Bahreïn, petite monarchie du Golfe persique stratégique pour les Etats-Unis qui y base sa Ve Flotte (indispensable pour la guerre en Afghanistan), l’armée s’est retirée de la place de la Perle, épicentre de la contestation.
Des milliers de manifestants antigouvernementaux sont revenus samedi sur la place de la Perle à Manama où ils ont commencé à ériger des tentes, deux jours après la dispersion violente de leur sit-in, selon un correspondant de l’AFP sur place.
Après le retrait des chars de l’armée de la capitale comme le demandait l’opposition, principalement chiite, les manifestants ont commencé à convergé vers la place de la Perle, épicentre de la contestation, à partir de trois axes.
Les protestataires ont enlevé les barbelés qui entouraient cette place du centre de Manama, alors qu’un hélicoptère survolait le secteur. Ils ont ensuite commencé à dresser des tentes place de la Perle.
« Par notre sang, par notre âme, nous te défendrons, Bahreïn », scandaient les protestataires. Peu après, les slogans « Le peuple veut la chute du régime » ont été entendus.
La police n’est pas intervenue, à l’exception d’un bref tir de grenades lacrymogènes sur l’un des axes conduisant à la place, qui n’a pas empêché l’arrivée des protestataires. Environ six personnes ont été hospitalisées pour inhalation de gaz.
Les manifestants, dont un grand nombre de femmes et d’enfants, brandissaient des drapeaux bahreïnis, ainsi que des bannières blanches frappées du mot « Paix ».
L’opposition réclame une monarchie constitutionnelle, un gouvernement élu et une alternance pacifique du pouvoir dans un pays où le poste de Premier ministre est occupé par cheikh Khalifa ben Salman Al-Khalifa, oncle du roi, depuis l’indépendance de Bahreïn, en 1971, et où les ministères clés sont tenus par des membres de la famille royale.
Parallèlement au Yémen, de violents heurts opposaient samedi manifestants et partisans du régime autour de l’Université de Sanaa. Un étudiant a été tué par balle et cinq autres ont été blessés, selon un journaliste de l’AFP témoin de la scène. Il s’agit du premier mort à Sanaa depuis le début de la contestation contre le régime du président Ali Abdallah Saleh il y a une semaine, par les jeunes, notamment les étudiants.
Les partisans du président ont tenté d’entrer en force dans le campus d’où sortent quotidiennement depuis une semaine des manifestations demandant le départ du chef de l’Etat, au pouvoir depuis 32 ans.
La répression des manifestations est plus violente à Aden, grande ville du sud du pays, où neuf personnes ont été tuées depuis mercredi.
En Algérie, où le pouvoir craint un scénario de révolution à la tunisienne, quelque 200 personnes ont commencé à manifester samedi malgré un important dispositif policier déployé dans le centre d’Alger. Aux cris de « Algérie libre et démocratique », « pouvoir assassin », « le peuple veut la chute du régime », les manifestants défilent sur un parcours délimité jusqu’à la place des Martyrs, soit environ quatre kilomètres plus loin. [2]
Un député du parti Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Tahar Besbes, a été grièvement blessé lors d’un affrontement avec la police au cours de la marche organisée à Alger, a rapporté un membre de son parti. « Il a reçu un coup au ventre donné par un policier. En tombant, sa tête a heurté le trottoir », a indiqué à l’AFP Mohsen Belabbas, porte-parole du RCD, selon lequel le député paraissait dans le coma.
Selon le Dr Rafik Hassani qui se trouvait à ses côtés à l’hôpital de Mustepha tout proche, M. Besbes semblait souffrir d’un traumatisme crânien.
En Tunisie, d’où est parti le mouvement de révoltes, le gouvernement a condamné l’assassinat d’un prêtre polonais, « égorgé » par des « extrémistes » vendredi dans le garage d’une école religieuse privée de la région de Manouba, près de Tunis. C’est le premier meurtre annoncé à la fois d’un religieux et d’un étranger depuis la chute du régime de Ben Ali le 14 janvier. [3]
Enfin, à Djibouti, des affrontements ont repris dans la matinée dans une banlieue populaire entre partisans de l’opposition qui réclament la fin du régime du président Ismaël Omar Guelleh et forces de l’ordre. Ces incidents interviennent au lendemain d’un grand rassemblement de l’opposition dans la capitale qui avait dégénéré en violences dans la soirée.