Le quotidien britannique The Guardian, qui a pu "indépendamment authentifier et recouper une grande partie des 1 600 documents confidentiels", est celui qui se montre le plus pessimiste quant à la signification de ces révélations. "Des documents confidentiels révèlent la lente mort du processus de paix au Proche-Orient" : ainsi est titré l’article des journalistes Seumas Milne et Ian Black, selon qui les textes "donnent un aperçu extraordinaire et vivant de l’intérieur de la désintégration d’un processus de paix vieux de vingt ans".
"L’impression générale qui se dégage de ces documents est que la faiblesse et le désespoir des leaders de l’Autorité palestinienne augmentaient à mesure qu’ils échouaient à obtenir un accord, voire un simple arrêt de la construction des colonies, ce qui sapait leur crédibilité envers leurs rivaux du Hamas. Les documents révèlent aussi la confiance inébranlable des négociateurs israéliens et l’attitude souvent hautaine de politiciens américains envers les représentants palestiniens", écrivent les journalistes [1].
"LES PALESTINIENS SONT PRÊTS À ALLER JUSQU’AU BOUT POUR LA PAIX"
Dans un autre article du même quotidien, Jonathan Freedland estime ainsi que "la première victime de ces révélations seraient le sentiment de fierté nationale des Palestiniens et leur sens de la dignité collective dans l’adversité". Car, complète Pierre Haski sur Rue89, "ces révélations seraient acceptables pour les Palestiniens si elles avaient été suivies d’un déblocage des négociations et d’une amélioration de leur sort sur le terrain", ce qui ne fut pas le cas. "Ces révélations risquent de renforcer le discours des islamistes qui accusent l’Autorité palestinienne de ’collaborer’ avec Israël, sans que l’occupation ne cesse", poursuit-il.
Mais, d’une certaine manière, ces révélations pourraient servir la cause palestinienne dans la mesure où les Israéliens y apparaissent sous un jour encore moins flatteur que les Palestiniens. "La révélation de documents discrédite les revendications de Nétanyahou comme quoi Israël n’a pas de partenaire pour la paix", titre le journal israélien Haaretz. "Les documents témoignent du fait que les Palestiniens sont prêts à aller jusqu’au bout pour la paix", écrit le journaliste Akiva Eldar.
De la même manière, Jonathan Freedland dans le Guardian l’affirme : "Maintenant, nous le savons. Israël avait un partenaire pour la paix." "Ces documents font voler en éclats une des pierres angulaires de la diplomatie israélienne : l’affirmation selon laquelle il n’y a pas de partenaire palestinien. Ce thème, répété depuis des années dans la bouche des porte-parole israéliens, est contredit par ces documents, qui montrent que non seulement il y a bien un partenaire palestinien, mais qu’il est plus accommodant que tous ceux qui lui succéderont", poursuit le journaliste.
"À QUI PROFITE LA FUITE ?"
Dans The Times – article payant –, le journaliste James Hider renchérit : "Ces documents dépeignent un Israël qui a publiquement dit qu’il était prêt à faire des concessions douloureuses pour la paix, mais qui, en privé, rejette le compromis le plus généreux que les Palestiniens aient jamais fait".
Mais la question clé est posée par Paul Danahar, chef du bureau du Proche-Orient, pour la BBC. "A qui profite la fuite ?" demande-t-il, tentant ainsi d’identifier la source. "Le Palestinien moyen pourrait se sentir trahi parce que ses dirigeants lui ont raconté une histoire différente (...) Les Américains n’y gagnent pas grand-chose [et] les Israéliens apparaissent grossiers d’avoir décliné des concessions importantes", écrit M. Danahar. "La source la plus probable serait un rival palestinien qui voudrait ainsi affaiblir le leadership du président [de l’Autorité palestinienne] Mahmoud Abbas", conclut-il.