Israël fait un geste symbolique à l’égard de la bande de Gaza : depuis lundi 4 avril, les pêcheurs gazaouis peuvent s’aventurer plus loin en mer pour remplir leurs filets. La zone de pêche autorisée en Méditerranée passe de 6 milles nautiques (11 km) à 9 milles, mais seulement au large des parties sud et centre de la bande de Gaza, et non au nord, près de la frontière avec Israël. Nizar Ayyash, le président du syndicat gazaoui des pêcheurs, et le Cogat, organe du ministère israélien de la défense chargé de coordonner les activités dans les territoires palestiniens occupés, l’ont annoncé le 1er avril.
L’économie de la bande de Gaza est en lambeaux, étranglée par un blocus israélien et égyptien qui limite drastiquement la libre circulation des hommes et des biens. Selon un rapport de la Banque mondiale publiée en mai 2015, le blocus a causé la perte de 50 % du produit intérieur brut (PIB). Le taux de chômage s’élève à 60 % chez les jeunes, 45 % au sein de l’ensemble de la population active. Dans ces conditions misérables, la pêche reste une des rares activités traditionnelles viables, alors que l’agriculture a été largement dévastée par les conflits successifs. Mais il s’agit d’une pêche de survivance pour de nombreux professionnels, dont la moitié vit en dessous du seuil de pauvreté. Selon le Cogat, l’extension de la zone de pêche permettra d’injecter près de 100 000 euros dans l’économie locale – une somme dérisoire.
Un bateau non identifié coulé
Les accords de paix signés à Oslo en 1993 entre Israël et la direction palestinienne prévoyaient une zone de pêche de 20 milles. Puis la surface a varié à plusieurs reprises au cours des années, jusqu’à être réduite à 3 milles en 2014, puis 6 milles après la guerre de l’été 2014 consécutive à l’opération Bordure protectrice. Les autorités israéliennes disent lutter à la fois contre de possibles livraisons d’armes au Hamas, les trafics de contrebande classique ou même des tentatives d’attaques par la mer contre Israël. Dans la nuit du 2 au 3 avril, la flotte israélienne a coulé un bateau non identifié approchant depuis l’Egypte. Après des tirs de sommation, a expliqué l’armée, l’équipage a lancé la cargaison par-dessus bord puis a sauté avant que le bateau soit envoyé par le fond.
Les gestes d’ouverture israéliens à l’égard des Palestiniens pour améliorer leurs conditions de vie quotidienne, à défaut de tout processus de négociation politique, sont toujours mesurés au trébuchet. Le gouvernement israélien refuse d’envisager une véritable liberté de circulation des biens et des hommes pour des raisons de sécurité. C’est pour cela par exemple que, malgré des contacts indirects à ce sujet avec le Hamas, Israël n’envisage pas sérieusement l’ouverture d’un « port offshore » au large de Gaza, même sous supervision étrangère.
Autre exemple : l’état-major des forces armées pousse depuis des mois à augmenter fortement le nombre de permis de travail pour les Palestiniens. Ils sont actuellement près de 58 000 employés à l’intérieur d’Israël, sans compter ceux au noir. L’analyse des hauts gradés est simple : plus il y aura de rentrées financières dans les familles et de jeunes hommes occupés, et plus le marais de la violence sera purgé. Début février, le cabinet des ministres a décidé l’octroi de 30 000 nouveaux permis. Mais le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, n’a qu’une majorité d’une voix à la Knesset. Le chef du gouvernement doit en permanence veiller à la susceptibilité de l’extrême droite nationaliste, qui, au fond, ne rêve que d’annexion de la Cisjordanie en partie ou en totalité.