[1] voir aussi
Barack Obama : le redressement
par Kharroubi Habib
Depuis quelques mois, Barack Obama enchaîne les succès diplomatiques à l’international et politiques sur la scène américaine. Sur le premier terrain, il est en effet parvenu à contenir, voire à désarmer le front d’Etats qui, jouant sur la crise financière mondiale dont le système financier américain a été à l’origine, ont voulu contraindre Washington à céder de son exorbitant pouvoir de décision dans les institutions financières internationales.
Il a su instaurer un climat de pragmatisme dans les relations sino-américaines malgré les divergences qui opposent les deux pays. Il est parvenu à réchauffer les rapports américano-russes en signant avec le président Medvedev un important accord de limitation des arsenaux nucléaires des deux Etats.
Au plan politique interne américain, Barack Obama a engrangé deux succès de taille : faire approuver par les congressistes ses deux projets de réforme les plus contestés et combattus par un puissant conglomérat d’oppositions. Celui de la réforme de la santé, puis celui de la réforme du système financier américain. Quand il a bouclé sa première année à la Maison-Blanche en janvier dernier, bien peu ont été les commentateurs à miser sur une perspective aussi positive pour le Président américain, à l’aura sévèrement affectée à ce moment-là par sa chute de popularité aussi bien dans l’opinion américaine que celle internationale, et en grande difficulté politique face à un Congrès plus que réticent à lui accorder son onction à la mise en œuvre de ses promesses électorales.
En quelques mois pourtant, Barack Obama est parvenu à redresser la situation en sa faveur, puisqu’en terme de popularité, il bénéficie d’un regain et qu’il réussit tout ce qu’il a entrepris de faire.
Le seul point noir dans l’action du Président américain de ces derniers mois est son apparente impuissance à faire avancer les choses dans le dossier du conflit proche-oriental. Certes que sur ce dossier, il agit directement comme il s’y est engagé durant sa campagne électorale. Mais en ne faisant pas preuve de la même fermeté et pugnacité qu’il a montrées sur ceux des projets de réforme face aux oppositions parlementaires et lobbying qui voulaient les faire capoter. Il est à espérer que Obama ne veuille pas sur ce dossier rester sur son attitude, maintenant qu’il est libéré du souci qu’a été pour lui l’adoption de ses deux projets de réforme.
Ce n’est peut-être pas un simple hasard de calendrier si Mahmoud Abbas a été invité à se rendre à Washington sous peu, après que le projet de réforme du système financier américain eut été approuvé par le Sénat. Une rencontre entre Obama et Abbas qui pourrait être l’occasion pour le premier de signifier qu’il ne se contentera plus d’essuyer sans réagir les rebuffades du Premier ministre israélien aux demandes américaines de gestes destinés à permettre la reprise du processus de négociation entre Israël et les Palestiniens.
C’est en tout cas ce qu’attendent de lui ceux qui, parmi les Palestiniens ou dans le monde arabe, persistent à croire en sa promesse de faire aboutir la solution des deux Etats vivant en paix côte à côte, et ce malgré ses prises de position conciliantes plus que de raison envers l’entêtement du gouvernement de Tel-Aviv, qui ont grandement nui à « l’obamia » que son élection a fait naître dans les opinions palestinienne et arabe.
http://www.lequotidien-oran.com/?ne...
[2] voir aussi Antoine Ajoury dans l’Orient le Jour :
L’UPM menace-t-elle le rôle de la société civile ?
Conférence : Michel Tubiana analyse l’impact des modifications apportées par l’Union pour la Méditerranée par rapport au processus de Barcelone.
Le 4e Forum civil s’est réuni à un moment particulier de l’histoire des rapports institutionnels euro-méditerranéens, affirme d’emblée Michel Tubiana, avocat, président d’honneur de la Ligue des droits de l’homme (LDH) et secrétaire général de la plateforme Euromed. À un moment où le processus de Barcelone a été officiellement remplacé par l’Union pour la Méditerranée (UPM), alors que l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne a profondément modifié les processus décisionnels européens. À un moment où l’étendue géographique a également bougé, puisque si cette union concerne toujours la Méditerranée, d’autres pays non riverains de notre mer commune sont maintenant pris en compte, à l’instar de la Mauritanie et de la Jordanie, et bien sûr du reste des pays non méditerranéens membres de l’UE.
« C’est donc un bouleversement à la fois institutionnel et géographique. En même temps, les constantes de la situation euro-méditerranéenne n’ont pas changé », estime M. Tubiana. De fait, les principaux conflits demeurent : « Le peuple palestinien continue à souffrir de l’occupation qu’il subit, le Sahara occidental reste un objet de conflit et de litige, Chypre est toujours divisée, sans oublier la question des minorités religieuses et ethniques dans tel ou tel pays, y compris depuis quelques années au sein de l’Union européenne. » Michel Tubiana estime en outre que les processus démocratiques au sud de la Méditerranée sont toujours obérés par des atteintes massives aux libertés fondamentales. « Et l’on voit bien, il suffit d’en constater les à-coups, comment ces questions pèsent sur l’UPM dont on sait qu’elle a subi un certain retard et dont on peut espérer que le prochain sommet se tienne », ajoute-t-il.
En tant que plateforme qui a fait le choix d’être un partenaire à la fois indépendant et critique, mais aussi un partenaire institutionnel, « nous avons pris acte des changements intervenus, mais comment ne pas dire notre interrogation, pour ne pas dire notre inquiétude ? » se demande M. Tubiana.
Selon lui, le processus de Barcelone n’était pas parfait. Il présentait, néanmoins, deux points d’ancrage qui paraissent essentiels. Le premier est de faire référence explicitement à des valeurs communes, un destin partagé et les droits de l’homme. Ces références ont connu un sort plus ou moins effectif. « Et si les différents accords de partenariat conclus, y compris sous l’empire de la politique de voisinage, comprenaient une clause dite » droits de l’homme, « on a bien vu les limites de l’effectivité de cette clause », témoigne l’avocat français.
Le second point est la construction, qui ne fut pas sans difficultés, de rapports devenus riches, avec et entre les sociétés civiles du nord et du sud de la Méditerranée. « La reconnaissance de la participation des sociétés civiles à la construction du partenariat euro-méditerranéen est un acquis, même imparfait, incontestable du processus de Barcelone », estime M. Tubiana qui se demande : « Qu’est il advenu (de la reconnaissance de la participation des sociétés civiles) avec la création de l’UPM dans le contexte de l’application du traité de Lisbonne ? » Selon lui, il est trop tôt pour dresser un bilan de la conjugaison de ces bouleversements institutionnels. « Nous sommes donc obligés de nous en tenir aux actes et aux déclarations officiels. »
Les projets de développement économique, conjoints privés-publics, sont présentés comme des moyens concrets de dépasser les antagonismes politiques pour privilégier les coopérations effectives. « Après tout, pourquoi pas ? affirme Michel Tubiana, l’UE a bien commencé par la communauté du charbon et de l’acier. » Mais au-delà des années passées depuis le début de la construction européenne, M. Tubiana se demande si les deux situations sont comparables.
Il y a cinquante ans, l’Europe alliait un processus commun de développement économique à une volonté politique de dépasser les antagonismes meurtriers pour créer une union. « Sans aller jusqu’à rêver d’une union comparable entre le Nord et le Sud de la Méditerrané, le rejet, dans le cadre de l’UPM, du » Politique « à la marge de cette initiative qui privilégie la dimension économique (y compris l’environnement) laisse alors ouverte la totalité des questions que le processus de Barcelone n’avait pu qu’effleurer », estime-t-il. Ainsi, le conflit israélo-palestinien et la difficulté qu’a l’UE à déterminer sur ce sujet une politique commune, efficace, et respectueuse de la légalité internationale, pèsent de tous leur poids sur les processus en cours au point de modifier les institutions initialement prévues de l’UPM, voire d’en bloquer les initiatives. « À supposer celui-ci réglé, il faudra aussi en régler d’autres... », s’inquiète M. Tubiana.
Or le rejet de la politique aux frontières de l’UPM, c’est aussi la quasi-inexistence de toutes références aux droits de l’homme, à la bonne gouvernance et à la démocratie. « Certes, il s’agit de préoccupations qui existent mais de manière si marginale que l’on peut se demander si la référence faite à ces questions ne s’apparentent pas plus à une révérence obligée qu’à une volonté réelle de les aborder », distingue-t-il. Comment donc gérer les relations avec des régimes qui prolongent indéfiniment l’état d’urgence, qui méprisent la presse, qui emprisonnent les défenseurs des droits de l’Homme, qui empêchent les associations d’exister ?
Le secrétaire général de la Plateforme civile Euromed se demande dès lors si « nos revendications de sociétés civiles autonomes et indépendantes seront prises en compte dans le cadre de ce partenariat rénové ». Dans ce contexte, M. Tubiana s’inquiète de la nouvelle place reconnue de la société civile : « Nous sommes entendus, au sens strict du terme, lors des conférences ministérielles, mais sommes nous écoutés ? »
« Nous avons bien compris quel est l’objectif de l’UPM : donner de la chair économique au partenariat euromed. Reste à savoir ce qu’est advenu de l’âme de ce partenariat, celle qui fait des peuples des acteurs, celle qui permet aux sociétés de dialoguer, de partager un destin commun et de s’approprier des valeurs communes. C’est la question que nous posons », conclut Michel Tubiana.
http://www.lorientlejour.com/numero...