Le moins que l’on puisse dire est qu’il était très attendu. Dès son élection Barack Obama avait fait de la réconciliation entre le Monde musulman et les Etats-Unis l’une de ses priorités stratégiques. Le président américain a déjà réussi une première chose, il n’a pas déçu, ce qui était le plus grand risque pour un discours tant annoncé. On retiendra bien sûr son " Salam Aleikoum " qui a introduit son discours (que certains comparent à " Je suis un Berlinois " prononcé par Kennedy devant le Mur de Berlin) et les paroles d’amitié et de coopération dans un esprit de fraternité entre Etats-Unis et monde musulman. Son discours était réellement équilibré dans la mesure où il a reconnu les difficultés existantes, les torts que pouvaient avoir les Américains sur l’Islam, les erreurs historiques commises au cours des mandats de son prédécesseur, mais il a également demandé aux Musulmans de réfléchir sur leurs visions des Etats-Unis. Obama savait qu’il ne pourrait pas se contenter de rappels historiques ou philosophiques, et qu’il fallait également aborder le cœur central du sujet, à savoir les questions stratégiques actuelles. Et en premier lieu, le conflit israélo-palestinien.
Là aussi Obama a fait preuve d’une très grande clarté, il n’a pas caché à son public les liens stratégiques et l’alliance profonde qui unissent les Etats-Unis à Israël. Ce n’était certainement pas la partie la plus agréable du discours à entendre pour son auditoire présent dans la salle.
Mais c’est à l’honneur d’Obama d’avoir eu ce souci de transparence et de vérité. On ne peut pas l’accuser de double langage. Il a également demandé avec force la fin de la colonisation et martelé sa vision d’une solution à deux Etats, israélien et palestinien. Si George W. Bush affirmait avoir également ce dernier objectif, il ne s’était jamais élevé contre la colonisation. Plus encore, pour la première fois dans la bouche d’un président américain, Obama a évoqué la souffrance des Palestiniens. Celle-ci n’a pas une cause métaphysique, mais elle est bien le produit de l’occupation et de la répression israélienne. On remarquera également, qu’il a, sans légitimer le Hamas, reconnu sa réalité et sa représentativité. Pour une fois le Hamas n’a pas été évoqué par un dirigeant occidental uniquement pour être condamné et accusé de terrorisme. Il lui a bien demandé de renoncer à la violence, mais c’est plus une façon de dresser les conditions d’un partenariat futur que d’en interdire à l’avance l’exercice. On notera également qu’il a renoncé à l’idée d’imposer la démocratie par l’extérieur.
Mais pour reprendre la formule consacrée : le programme est parfait, reste à l’appliquer ! C’est bien le plus difficile.
Deux obstacles se dressent sur la route d’Obama. Le premier est la division inter-palestinienne qui obère toute négociation sérieuse. L’Autorité palestinienne a le soutien du monde extérieur, mais pas celui du peuple palestinien, et le Hamas a les atouts inverses. Il sera difficile d’avancer tant qu’ils ne seront pas réconciliés. Mais bien sûr, le principal obstacle demeure l’attitude du gouvernement israélien. Que devra ou pourra faire Obama si rien ne se passe, si la colonisation se poursuit et s’il n’y a aucune avancée concrète, réelle, vers la création d’un Etat palestinien ? Barack Obama, sans avoir employé l’expression, semble prêt à exercer des pressions sur Israël. Il ne veut certainement pas le faire tout de suite afin de montrer à la fois aux électeurs américains et israéliens qu’il a attendu et fait preuve de patience avant de devoir utiliser cette méthode.
Mais si Obama ne veut pas que la déception soit à la hauteur des espoirs qu’il a suscités, il sait bien qu’il devra en passer par là. Obama peut être à la fois l’ami d’Israël et des Arabes si Israël accepte la paix. C’est impossible si le gouvernement israélien continue de nier les droits des Palestiniens.