Un pays qu’il n’a cessé de magnifier et de glorifier à chaque étape de sa conquête du pouvoir, y faisant référence jusques y compris dans les périodes les plus désastreuses pour son image, comme lors de sa guerre de destruction du Liban, en juillet-août 2006, missionnant au plus fort du conflit, dans une démarche de provocation, un réserviste de son armée, sollicitant l’avis exclusif de son ministre de la sécurité Avi Dechter pour la répression du soulèvement de la périphérie urbaine de l’Automne 2005 en France, dans une transposition symbolique du conflit israélo-palestinien sur le territoire national, se livrant enfin, périodiquement, à des incantations des « Murmures de Yad Vachem » au « Miracle du XX me siècle », au point que cet atlantiste résolu est apparu, au delà de l’attente de ses plus empressés courtisans, ses commensaux habituels des coteries du parisianisme calfeutré, comme un philosioniste exacerbé par le néo-conservatisme américain [2].
Ce pays…. c’est Israël qui a célébré, le 14 mai 2008, le 60 me anniversaire de sa déclaration unilatérale d’Indépendance, dont il a voulu que la France réserve à son président la première visite d’Etat de son mandat.
Le premier président français de « sang mêlé », tel qu’il se revendique, est sans la moindre contestation possible le plus pro-israélien des chefs d’Etat de l’Histoire de France, le plus honni aussi des dirigeants français au sein de l’opinion arabe depuis Guy Mollet, l’ancien premier ministre socialiste de sinistre mémoire, l’ordonnateur via son proconsul Robert Lacoste des ratonnades d’Alger, le maître d’œuvre de l’expédition de Suez, en 1956, l’agression tripartite franco-anglo-israélienne contre Nasser, le chef charismatique du nationalisme arabe. Triste record peu enviable dont il aurait pu s’en dispenser, qu’il s’est appliqué néanmoins à gommer lorsqu’il en a pris conscience, en abritant la conférence de réconciliation interlibanaise à la Celle Saint Cloud (Juillet 2007) et la conférence des pays donateurs du futur Etat palestinien (Décembre 2007), renouant des relations avec la Syrie, ostracisée par la cécité proharirienne de son prédécesseur, entreprenant au pas de charge en un temps record des voyages officiels dans onze pays arabes, un nombre équivalent à la moitié des états membres de la Ligue arabe. Un record jamais égalé par aucun de ses prédécesseurs.
Jamais président français n’a manifesté autant d’empressement auprès des pays arabes [3], jamais pourtant président français n’a suscité autant d’aigreurs auprès des Arabes. Significative de cet état d’esprit est sa prestation devant le conseil consultatif saoudien le 12 janvier dernier. Confondant sans doute le Conseil consultatif et l’Assemblée des Oulémas, sa dissertation sur le thème des religions a été accueillie dans une indifférence polie, alors que les Saoudiens s’attendaient à des clarifications sur la politique du nouveau président du premier pays musulman d’Europe occidentale par son importance numérique, qui fait de l’Islam la deuxième religion de France.
Plusieurs parlementaires saoudiens, selon certains témoignages, n’auraient même pas daigné mettre les écouteurs de traduction pour saisir la portée de la parole présidentielle. L’orateur français s’en est-il au moins rendu compte ? Pas évident tant il était emporté par sa fougue prédicatrice. Son entourage a-t-il eu la possibilité de l’alerter sur cette dérive ? Pas évident non plus tant il est tétanisé par la nouvelle « égocratie » présidentielle. Imagine-t-on chef d’Etat d’un pays musulman tenir pareil discours théologique devant la représentation nationale française ? A-t-on un instant imaginé le tollé que le prédicateur islamique imprudent aurait suscité en France devant une telle entorse aux usages ?
Que l’on ne s’y méprenne pas.L’animosité particulière dont gratifient les Arabes Nicolas Sarkozy tient non à ses inclinaisons politiques et affectives, mais à sa propension à l’outrage. Ses prédécesseurs pratiquaient une politique duale, une politique d’ouverture à l’égard des marchés arabes, sur le plan international, une politique de fermeture, sur le plan domestique, à l’encontre de la composante de la population issue de l’immigration. Nicolas Sarkozy se distinguera de cette duplicité par une stigmatisation permanente unilatérale et continue de l’altérité : Karcher, Racaille, égorgeant « des moutons dans les baignoires » resteront à jamais graver dans les mémoires comme la face hideuse d’une xénophobie institutionnelle véhiculée au plus haut niveau de l’Etat par un homme en charge de symboliser la concorde nationale. Le malaise est patent, le mal irrémédiable, l’activisme présidentiel inopérant quand bien même il est enrobé d’une diplomatie nucléaire.
Que l’on ne s’y méprenne pas là non plus. L’anti-sarkozysme des Arabes n’est pas symétrique de son inconditionnalité pro-israélienne. D’autres dirigeants occidentaux ont affiché un appui plus marqué dans leur soutien à Israël que ne l’est le nouveau Président français, sans susciter autant de pulsions révulsives à l’encontre de leur personne. C’est George Bush, sans doute le plus haï des Présidents américains dans le Monde arabe qui aura été le premier dirigeant occidental à se rendre en Palestine, le premier à qualifier d’« occupation » la présence israélienne et de « colonies » les implantations israéliennes dans les territoires palestiniens, sans s’encombrer de préoccupations oratoires.
George Bush et non Nicolas Sarkozy, balbutiant au Caire, fin décembre 2007, les premières syllabes du mot colonie avant de se raviser pour mentionner le terme inexpressif d’« implantation ». Pour le champion du parler vrai, il est des prudences qui retentissent comme des reniements ou plutôt comme des révélations.
Nicolas Sarkozy l’avoue lui-même et ne cache ni son « incompréhension » ni son « indifférence » à l’égard de l’« univers » arabe qu’il « connaît si mal » qui lui est « étranger » [4], allant même jusqu’à récuser le terme de « politique arabe ». Un « non-sens », (…) « ce monde n’est pas unique ». « Nous devons concevoir et mettre en oeuvre une politique adaptée à chacune des régions de ce monde et ne pas nous laisser aveugler par une unité qui n’est que virtuelle », écrivait-il en 2001 alors qu’il avait déjà exercé des responsabilités gouvernementales, notamment au Budget sous le gouvernement de M. Edouard Balladur en 1993-1995, et qu’il était donc supposé être averti du concours financier des Fonds souverains arabes au maintien de la compétitivité des entreprises françaises au 7me rang de l’économie mondiale.
Belle illustration de l’européo-centrisme de cet habitant du « ghetto du gotha » de la ville cossu de Neuilly, concentré de toutes les droites françaises, qui s’échine à édifier une Union européenne et qui dénie dans le même temps aux Arabes de réaliser leur Unité, alors qu’il existe davantage de similitudes et de convergences culturelles, spirituelles et linguistiques entre les 20 pays membres de la ligue arabe qu’entre les 27 membres de l’ensemble européen, davantage de division entre Flamands et Wallons, « Vieille Europe » et « Nouvelle Europe » Catholiques, et Protestants en Irlande du Nord notamment, Anglophones et Francophones, davantage de division donc entre douanier corse, pêcheur maltais et plombier polonais qu’entre Chrétiens et Musulmans arabes, Sunnites et Chiites, habitants du Machreq ou du Maghreb, autant de virtualités que de ferments d’unité au Nord et au Sud de la Méditerranée. Un texte qui témoigne à tout le moins d’une ignorance déplorable des réalités géostratégiques, qui révèle une posture fondée, non sur une vision prospective, mais sur les présupposés idéologiques d’un être compulsif animé d’une pensée convulsive.
L’outrage habite cet homme-là, interdit de séjour dans la périphérie urbaine de la France, un comble pour un chef d’Etat sécuritaire. L’outrage l’habite non par défaut de jeunesse mais par marque de fabrique, qui n’a cessé tout au long de sa campagne électorale et même au-delà, de stigmatiser répétitivement, dans une sorte de gratuité jubilatoire, la composante bariolée de la société française.
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II - L’Union Méditerranéenne : un dérivatif. La diplomatie nucléaire : un leurre
Nicolas Sarkozy a voulu célébrer le premier anniversaire de son entrée en fonction comme 6me Président de la V me République Française en le couplant d’un voyage officiel en Israël au moment des célébrations du 60me anniversaire de la déclaration d’indépendance de l’Etat hébreu, afin de conférer un relief particulier à cet évènement et signifier par là sa véritable rupture avec la traditionnelle position de la diplomatie française.
Programmé à l’apogée de sa carrière pour constituer une apothéose à son pouvoir, ce voyage intervient toutefois au périgée de sa popularité, alors que le paysage est de surcroît particulièrement chahuté avec le nouveau revers diplomatique du camp pro-occidental au Liban, les rebuffades essuyées par George Bush du fait des dirigeants d’Arabie Saoudite et d’Egypte lors de sa dernière tournée au Moyen-orient, le 14 mai dernier, et les rebondissements judiciaires concernant le premier ministre israélien Ehud Olmert. Ce voyage a même été décalé d’un mois pour éviter un télescopage dans l’opinion entre son hommage à l’indépendance d’Israël et la dépossession palestinienne, dont une large fraction de l’opinion mondiale aussi bien dans le Monde arabe, qu’en Afrique, en Asie, en Amérique latine et en Europe, en rendent responsables les pays occidentaux.
Court-circuité dans la stabilisation de la situation libanaise et l’amorce de pourparlers syro-israéliens, Nicolas Sarkozy paraît comme en voie de marginalisation, en panne d’inspiration, à la recherche d’un second souffle, son projet phare de l’Union euro - méditerranéenne battu en brèche, son équipe frappée de désuétude devant le nouveau cours de l’histoire de la politique régionale. Son déplacement perd de ce fait de son éclat au point d’apparaître comme caricaturalement encombrant de par la sollicitation excessive de cette amitié tant pour le pays hôte que pour le visiteur, voire même un handicap pour la diplomatie du meilleur ami français d’Israël.
Afin de déblayer la voie à ce voyage et reconquérir le terrain perdu dans le Monde arabe, à tout le moins atténuer les critiques quant à son alignement outrageusement inconditionnel sur la politique israélienne, Nicolas Sarkozy s’est appliqué à faire une visite-éclair au Liban, début juin, et à envoyer son premier ministre François Fillon signer un accord de coopération dans le nucléaire civil, à Alger, le 21 juin, soit la veille de sa visite en Israël. L’accord franco-algérien prévoirait la livraison à l’Algérie de réacteurs nucléaires par le groupe Areva et la formation de personnels du centre nucléaire d’Alger et comporte un deuxième volet sur la défense.
Pour tenter de calmer le courroux arabe, la France a fait savoir en outre que Nicolas Sarkozy se rendra « quelques heures » en Palestine, sans doute pour une photo avec poignée de main avec le président palestinien Mahmoud Abbas, une opération « PO and PR : photo opportunity and public relations », opération de compensation bien connue des voyagistes américains destinée à la galerie et visant à établir un faux équilibre de traitement. Grâce lui soit donc rendu.
La France n’est pas l’Amérique. Première puissance continentale de l’Europe, au début du XX me siècle, à un moment où l’Europe était le centre du monde, la France n’est plus qu’au 7me rang des puissances mondiales au début du XXI me siècle. Cette relégation est sans doute imputable à la montée en puissance des grands ensembles (Chine, Inde), à la perte de son empire, mais aussi et autant aux déboires français de l’expédition du Mexique (1861-1867), à l’expédition de Suez (1956) et du désastre de Sedan (1870), au désastre de 1940, au désastre de Dien Bien Phu (1954).
A vu de ce bilan, le devoir de modestie est une mesure de salubrité publique, le devoir de lucidité un impératif de survie d’autant plus nécessaire que les coups de menton répétitifs et les déclarations pétaradantes paraissent rétrospectivement pathétiquement dérisoires sur un sujet de grande sensibilité où toute la responsabilité n’est pas exclusivement imputable aux Arabes et nulle injustice jamais infligée au peuple palestinien, à en juger par les déclarations prémonitoires des pères fondateurs de l’Etat juif qui mesuraient pleinement les conséquences de leurs actes.
« Si j’étais un dirigeant arabe, je ne signerai jamais un accord avec Israël. C’est normal : Nous avons pris leur pays. Il y a eu l’antisémitisme, les Nazis, Hitler, Auschwitz, mais était-ce leur faute ? Ils ne voient qu’une seule chose : Nous sommes venus et nous avons volé leurs terres. Pourquoi devraient-ils accepter cela ? » avertissait déjà David Ben Gourion, le premier chef du gouvernement, le 18 juillet 1948, dans les semaines qui suivirent la déclaration unilatérale d’indépendance de l’Etat Hébreu [5].
« Ma perception de la conjoncture israélienne reste subordonnée à une autre à laquelle je suis encore plus sensibilisée ; celle qui se produisit il y a quelques siècles, de l’autre côté du monde, quand d’autres persécutés et opprimés vinrent s’établir sur des terres occupées depuis des millénaires par des peuples plus faibles encore et qu’ils s’empresseront d’évincer. Je ne puis évidemment pas ressentir comme une blessure fraîche à mon flanc la destruction des Peaux Rouges et réagir à l’inverse quand les Arabes Palestiniens sont en cause », lui répondra en écho, l’anthropologue Claude Lévy-Strauss, dans une réplique à Raymond Aron [6]et au-delà à tous les inconditionnels de l’activisme pro-israélien.
Facteur aggravant, ce fâcheux concours de circonstance survient au moment où la France s’apprête à prendre la présidence de l’Union européenne et que Nicolas Sarkozy, prenant le relais des Etats-Unis, s’emploie à dépasser le clivage israélo-arabe au profit d’un front commun anti-iranien au sein d’une Union méditerranéenne. Dans ce contexte, le projet d’Union Méditerranéenne apparaît comme un dérivatif au combat visant à sécuriser l’espace national arabe, de la même manière que l’Afghanistan a détourné les Arabes de leur principal champ de bataille, le combat pour la libération de la Palestine et des autres territoires arabes (Golan, Sud-Liban) de l’occupation israélienne.
Sceller une Union transméditerranéenne sur la base d’une division raciale du travail, « l’intelligence française et la main d’œuvre arabe », selon le schéma esquissé par Nicolas Sarkozy dans son discours de Tunis le 28 avril 2008, augure mal de la viabilité d’un projet qui signe la permanence d’une posture raciste au sein de l’élite politico-médiatique française, une posture manifeste à travers les variations séculaires sur ce même thème opposant tantôt « la chair à canon » au « génie du commandement » forcément français lors de la première guerre Mondiale (1914-1918), tantôt « les idées » du génie français face au pétrole arabe » pour reprendre le slogan de la première crise pétrolière (1973) : « Des idées, mais pas du pétrole ».
Substituer de surcroît l’Iran à Israël comme le nouvel ennemi héréditaire des Arabes viserait à exonérer les Occidentaux de leur propre responsabilité dans la tragédie palestinienne, en banalisant la présence israélienne dans la zone au détriment du voisin millénaire des Arabes, l’Iran, dont le potentiel nucléaire est postérieur de soixante ans à la menace nucléaire israélienne et à la dépossession palestinienne. Dans cette perspective, la diplomatie nucléaire de Nicolas Sarkozy apparaît comme un leurre. Elle se présente comme une offre pour mineurs frappés d’incapacité, dont la capacité nucléaire sera maintenue ad vitam sous tutelle, dont l’objectif caché est d’éponger le surplus monétaire généré par les pétrodollars, de la même manière que les gros contrats d’armements des décennies 1980-1990 avaient ponctionné les trésoreries des pétromonarchies.
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III- Le pari de Nicolas Sarkozy sur George Bush et Ehud Olmert, « le pari d’un tricard sur deux tocards ».
Le zèle néophyte manifesté par Nicolas Sarkozy à l’égard du Liban ne doit pas faire illusion. L’escapade de Beyrouth ne dissipe pas, loin s’en faut, la tenace suspicion générée par son attitude outrageusement pro-israélienne dans la guerre de destruction menée par Israël contre le Liban, en juillet 2006. Beaucoup à Beyrouth, Paris, Alger, Damas, Le Caire, Khartoum, Rabat, Sana’a, Tunis, Téhéran, Islambad, Kaboul et ailleurs se souviennent du soutien sans faille qu’il a manifesté au premier ministre Ehud Olmert, contre un pays jadis considéré comme un « protégé » de la France, fustigeant le Hezbollah de « mouvement terroriste » mais ne soufflant mot ni sur la disproportion de la riposte, ni sur les importants dégâts infligés aux infrastructures civiles et à l’écologie libanaise, ni enfin aux violations répétées du Droit Humanitaire International et aux lois de la guerre par l’usage d’armes prohibées notamment des armes à fragmentations et à sous munitions.
Le nouveau tropisme arabe de Nicolas Sarkozy ne doit pas faire illusion, non plus. Il ne résulte pas d’un libre choix, mais d’un choix contraint, un choix par défaut, largement conditionné par le désaveu de l’Irlande au projet de traité européen de Lisbonne dont il a été l’un des grands artisans, la rebuffade de son nouvel ami libyen sur la coopération transméditerranéenne et la déconfiture de ses deux meilleurs alliés, les coqueluches des médias occidentaux, les parangons de la civilisation atlantiste, le Président américain George Bush et le Premier ministre israélien Ehud Olmert.
Le pari de Nicolas Sarkozy sur ces deux personnalités en fin de mandat piteux s’est révélé être à l’usage « le pari d’un tricard sur deux tocards » pour reprendre l’expression argotique puisée du jargon national. Au point que l’hypothèse du report du voyage de ce sang mêlé dans son pays de prédilection est envisagée pour la deuxième fois depuis le début de son mandat. Au point que le président syrien Bachar el Assad, si vilipendé par ailleurs mais dont la présence au sommet euro-méditerranéen de Paris est néanmoins ardemment souhaitée, apparaît, paradoxalement, et contre toute attente, comme le sauveur de la diplomatie sarkozienne en plein naufrage.
Rien ni personne ne saurait occulter cette réalité d’une cruauté amère. Pas plus l’exhibition des symboles de sa diversité, que l’affichage des belles amazones de sa garde rapprochée médiatique, pas plus le froufroutement vestimentaire de Rachida Dati, sa Garde des sceaux, que le tourbillonnement catabolique de Rama Yade, sa secrétaire d’Etat aux Droits de l’Homme, ou le verdoyant langage de sa transfuge beur préférée Fadela Amara [7]. Sous couvert de langage de vérité, l’homme, d’un seul élan, a décrié les Arabes, outragé les Musulmans et dénigré les Africains, ces spécialistes de la « répétition ».
Quoiqu’il fasse, quoi qu’il dise, désormais, quand bien même il aura réussi à grappiller quelques contrats nucléaires ici, un trempolino militaire là, la rupture est consommée entre Nicolas Sarkozy et les Arabes bien avant son entrée en fonction. La désinvolture méprisante qu’il leur aura témoignée ne lui sera pas pardonnée car impardonnable un tel comportement de la part d’un chef d’Etat [8], de la part de ce chef d’Etat que les Arabes « indiffèrent » mais qu’il sollicite néanmoins, le Qatar pour lubrifier les difficiles négociations sur la libération des infirmières bulgares de Libye, en juillet 2007, et le Roi de Jordanie pour le transport amoureux de sa nouvelle dame de cœur anciennement à gauche, en janvier 2008.
L’homme du renouveau est porteur d’un discours anachronique. L’homme de la rupture aura été l’homme de la brisure des illusions dont se berçaient les Arabes et les Africains sur le rôle alternatif de la France au sein du leadership occidental, comme contrepoint à l’hégémonie américaine. Sous l’effet d’une « démocratie de l’émotion », une politique d’affichage de démagogie médiatique, la magie de la « Patrie des Droits de l’homme » s’est dissipée, la France est démasquée : la présidence sarkozienne est une présidence cupide, le sarkozysme, un combat d’arrière-garde, une mystification, un anachronisme cathartique, nécessaire mais salutaire, une parenthèse de l’Histoire de France.
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