C’est du moins ce que soutient la Banque mondiale dans un rapport publié jeudi et qui lance un appel non pas à « des mesures techniques qui doivent être décidées par des ingénieurs, mais à des réformes politiques profondes que les gouvernements de la région tardent à prendre car elles ne sont pas très populaires ».
Selon le rapport de la Banque mondiale, la disponibilité de l’eau par habitant diminuera de moitié d’ici 2050 dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord et les ressources en eau renouvelable chuteront de 20 % en raison des changements climatiques. La banque exhorte donc les pays à agir, d’autant plus qu’ils disposent déjà des plus basses réserves d’eau renouvelables au monde.
Selon les calculs de la banque, les ressources en eau renouvelable du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, qui étaient de 4000 mètres cubes par an par habitant sont présentement de 1100 mètres cubes par an par habitant. Elles chuteront à 550 mètres cubes par an par habitant en 2050, prédit la banque, si rien n’est fait. La moyenne mondiale serait quant à elle de 6000 mètres cubes par an par habitant, à cette même date.
Cette situation pourrait avoir de graves conséquences sur les nappes souterraines et les réseaux hydrographiques naturels déjà très limités de la région, dit la banque. L’institution ajoute que la baisse de la qualité des eaux représente déjà des coûts importants pour la région. Elle dit par exemple qu’il en coûte près de 3 % du PIB pour l’Iran et jusqu’à 1,5 % pour les autres pays de la région.
Changer les mentalités
La Banque mondiale prône principalement une meilleure gouvernance pour prévenir la catastrophe annoncée. Elle souligne notamment que les usages domestiques, commerciaux et industriels de l’eau ne représentent que 10 à 15 % des besoins en eau d’un pays, et que le reste va à l’agriculture.
Selon la banque, il faut absolument changer la manière de penser l’agriculture en réduisant l’irrigation, par exemple en instaurant des allocations d’eau. En raison de la croissance urbaine, elle suggère aussi de diminuer les emplois dans l’agriculture, d’autoriser les agriculteurs à pratiquer une agriculture à forte valeur ajoutée et à importer davantage de produits alimentaires pour protéger l’eau de la région.
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Ce que n’évoque pas la banque mondiale, c’est que l’eau est une arme, notamment au Proche-orient. Ainsi l’usage qu’en fait Israël au détriment des Palestiniens en leur interdisant l’accès aux nappes phréatiques palestiniennes, détournées au profit d’Israël. Il n’est donc pas surprenant que la question de l’eau dépende du Ministère de la Guerre israélien.
Voir sur le site du Monde diplo le blog Lettres d’eau et :
Gestion de l’eau : entre conflits et coopération
lundi 14 janvier 2008, par Philippe Rekacewicz et Salif Diop
(...)
Au Proche-Orient et dans les pays du Golfe, la pénurie d’eau est une réalité qui alimente aussi les tensions. Dans cette région, on est passé d’une situation de stress hydrique à une situation de pénurie, qui pourrait bien à l’avenir s’accentuer et devenir critique. La résolution des questions liées à l’usage de l’eau conditionne en partie les espoirs de paix. L’Etat hébreu n’a guère de ressources propres en eau, si ce n’est les nappes phréatiques palestiniennes de Cisjordanie qu’il exploite illégalement pour son propre profit. Il dépend essentiellement du Jourdain et de sources situées au Liban et en Syrie. Pour Israël, la protection « militaire » de ces sources d’approvisionnement n’est pas un vain mot : en 1964, sous la menace d’une opération armée israélienne, un projet de canal de dérivation sur le plateau du Golan entre les fleuves Hasbani (Liban) et Yarmouk (Syrie) ne fut jamais réalisé. En 2001, les Israéliens ont à nouveau menacé de bombarder un tout nouveau canal de dérivation des eaux du même fleuve Hasbani, et un peu plus tard promettaient le même sort au barrage de l’Unité en construction sur le fleuve Yarmouk, si toutefois il était mis en service…
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Voir enfin "Palestine, la question de l’eau" par Abdel Rahman Tamimi
"Dès 1967, l’eau des territoires occupés a été placée par Israël sous contrôle militaire et les résidents arabes se sont vu interdire de creuser de nouveaux puits, tandis que les colonies juives en foraient sans restriction. Selon la Banque mondiale, 90 % de l’eau de la Cisjordanie est utilisée au profit d’Israël, les Palestiniens ne disposant que des 10 % restants. Trop complexe, la question de l’eau a été reportée aux négociations finales".
B’Tselem accuse Israël d’être responsable de la pénurie d’eau qui affecte aujourd’hui les Territoires palestiniens occupés. En marge d’un discours officiel qui fait passer Israël pour le "mécène" de l’eau dans les territoires occupés, le rapport de la plus grande organisation israélienne de défense des droits de la personne revient sur les stratégies hydrauliques occultées par cet Etat. Discriminations institutionnalisées, négligences volontaires, interventionnisme arbitraire, etc., les droits les plus élémentaires de la population palestinienne sont bafoués.
Cette politique, discriminatoire, se traduit par une inégalité de traitement entre Palestiniens et colons juifs d’une part, entre Palestiniens et citoyens d’Israël d’autre part. Tandis que des centaines de milliers de Palestiniens souffrent de restrictions drastiques notamment durant l’été, les implantations israéliennes bénéficient, elles, de l’eau courante toute l’année. Israël, dont un tiers des réserves hydrauliques provient des ressources aquifères issues des montagnes de Cisjordanie, consomme près de 86 % de l’eau de la région. Les Palestiniens en utilisent 8 à 12 %, et les colons juifs 2 à 5 %. Après plus de trente années d’occupation, quelque 180 villages de Cisjordanie ne sont toujours pas raccordés à un système de distribution.
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