Paris, le 6 juillet 2010
M. François Baroin
Ministre du budget, des
Comptes publics et de la
Réforme de l’Etat
139, rue de Bercy
75572 Paris Cedex 12
Monsieur le Ministre,
Suite à votre nomination au gouvernement, le décret (numéro 2010-3553 du 1er avril dernier), vous place en responsabilité relativement aux douanes de notre pays.
Vous reprenez ainsi une des attributions de votre prédécesseur, Monsieur Eric Woerth.
J’ai saisi ce dernier, le 12 octobre 2009, sans obtenir la moindre réponse de sa part, d’un fait grave concernant précisément cette responsabilité, à savoir l’importation illicite en France de produits déclarés comme étant « Made in Israël » tandis qu’ils sont en fait produits dans les colonies israéliennes illégales installées, contre le droit international, dans les Territoires palestiniens occupés. Copie de ce courrier est joint à cette lettre.
Comme vous le savez l’Accord d’association Union européenne-Israël, en vigueur depuis l’an 2000, est très strict et précis sur ce point. Ne peuvent entrer en France et en Europe, au bénéfice de cet accord, que des produits fabriqués en Israël, stricto sensu, c’est-à-dire dire en deçà des frontières dites de 1967 (article 83 de l’accord).
Nous avions signalé deux cas à Monsieur Eric Woerth, mais ils sont plus nombreux en vérité, à savoir les gazéificateurs « Soda Club » qui proviennent en totalité d’une colonie israélienne, et ceux de la société « Agrexco » – détenue pour moitié par l’Etat israélien – qui proviennent pour une part significative de la Vallée du Jourdain occupée.
On pourrait ajouter encore les produits et cosmétiques « Ahava » vendus en France par les magasins « Sephora » notamment.
La Cour européenne de Justice (CEJ) nous a donné raison, en particulier sur les produits « Soda Club », en affirmant dans son arrêt – dit arrêt Brita en date du 25 février 2010 – que les produits israéliens pouvant bénéficier de l’accord ne pouvaient être, strictement, que ceux issus du territoire israélien et en aucun cas des Territoires palestiniens occupés. Cet arrêt fait jurisprudence et a portée générale dans tout l’espace européen.
La société Brita a été déclarée en fraude et les douanes allemandes, à l’origine de la saisine de la CJUE, ont été déclarées dans leur bon droit tandis qu’elles avaient fait obstacle à l’entrée de ce produit sur le marché allemand, avec bénéfice des avantages tarifaires.
Malgré cette décision de justice qui s’impose à la France, aucune réponse du ministre Eric Woerth ne nous a été faite. Et si les douanes françaises, dans une réponse récente, reprennent les conclusions de cet arrêt de façon générale, elles ne répondent pas à la question posée sur les conditions d’entrée effectives des gazéificateurs Soda Club (qu’on trouve également sous la marque Soda Stream) sur le territoire national.
J’ajoute, s’agissant de la société « Agrexco », qu’il conviendrait de procéder à des enquêtes sérieuses car on peut par ailleurs voir couramment des produits exportés par cette société israélienne spécifiés comme étant « Produce of Israël » tandis que le code barre de l’emballage est autre que le 729. Il en va de même pour le gazéificateur de « Soda Club » mis en vente sous un étiquetage « made in Israël ». Ce sont-là des fraudes graves qui constituent des tromperies sur l’origine.
Il convient donc sans attendre de mettre un terme à cette situation qui est connue de vos services mais aussi, et sans conteste possible, du ministre qui vous a précédé à ce poste.
La loi est la loi et il appartient au ministre en charge notamment des Douanes de la faire respecter fermement.
Dans l’attente,
Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l’assurance de mes salutations distinguées.
Jean-Claude Lefort
Président de l’AFPS
Député honoraire