Ils se sont rencontrés alors qu’ils travaillaient au même endroit à Jérusalem, et ils se sont mariés il y a trois ans.
Ils ont d’abord essayé de vivre en Israël, mais les autorités israéliennes n’ont pas donné l’autorisation à Ossama d’y rejoindre son épouse.
Ensuite ils ont essayé de vivre en Cisjordanie occupée, mais certains Palestiniens leur ont mené la vie dure.
Maintenant, ils laissent tomber et partent vivre en Europe.
Etrangers
« Nous n’avons plus de solution pour vivre en Israël ou en Palestine » dit Jasmine tandis qu’elle fait ses valises.
« Nous étions naïfs et nous avons pensé que nous pouvions gagner ce combat mais non.
Aussi, nous devons partir à l’étranger pour démarrer une nouvelle vie ».
Jasmine a déjà l’autorisation de partir. Ossama espère la suivre bientôt.
Nous montons sur le toit de leur maison de village. La lumière du soleil est si forte que vous devez plisser les yeux pour regarder la vue.
Les murets de pierre retiennent la terre en terrasses jusqu’aux collines, les oliviers centenaires sont éparpillés dans le paysage.
« Je me sens comme un étranger ici » dit Ossama. « Dans mon propre pays. Cet endroit est une terre sainte, mais ils se tuent entre eux. C’est comme si c’était une cause
déjà perdue.
« Ici il n’y a aucune chance. Je veux juste recommencer ».
A l’étude
Leur couple est presque unique.
Ni la société israélienne, ni la société palestinienne n’ont accepté leur mariage.
Sur les papiers officiels israéliens, Jasmine me dit que son état marital est : « à l’étude ».
« Notre mariage était une affaire humaine. Nous sommes simplement tombés amoureux » dit Jasmine. « La société autour de nous en fait une affaire politique ».
« Je me sens comme un réfugié. A partir du moment où j’ai décidé de ne plus suivre le courant on m’a dit que je ne faisais plus partie de mon pays ».
Un taxi arrive et Ossama aide Jasmine à porter ses valises.
La course leur fait traverser les terres palestiniennes occupées. Ils passent une tour de guet grise de l’armée israélienne. Ils traversent les check-points de l’armée.
Israël a pris le contrôle depuis presque 40 ans.
Laisser tomber
« Même dans la maison d’Ossama je suis supérieure parce que je suis israélienne » dit Jasmine en regardant par la fenêtre.
« C’est plus facile pour moi de me déplacer. Les soldats me laissent traverser les check-points. Ils ne m’arrêtent pas comme ils pourraient arrêter Ossama. »
Jasmine a perdu tout espoir en son propre pays.
« Les juifs ont été victimes durant des milliers d’années, mais ma nation a échangé son statut de victime contre celui de bourreaux. C’est dur pour moi de le reconnaître. Les juifs sont des occupants désormais et nous sommes racistes. »
La voiture arrive au checkpoint final.
Nous nous tenons debout et Ossama me dit pourquoi lui aussi a perdu tout espoir en son peuple.
« Ils étaient menaçants. Les gens disaient que si j’amenais ma femme ici, nous serions en danger. Même mes amis le disaient. Ils disaient que j’étais un traître. »
« C’est pourquoi je me demande si je veux encore être un Palestinien. Certains me considèrent comme un émissaire israélien. C’est un sentiment de merde. »
A la recherche de la sécurité
Ils se retournent et se dirigent vers le check-point tout proche qui sépare la Cisjordanie d’Israël.
Ils posent les bagages à terre et s’étreignent. Un court baiser.
Je demande à Ossama ce qu’il espère de sa nouvelle vie.
« Je veux pouvoir marcher dans la rue et ne pas être arrêté par l’armée ou la police israélienne. Je veux me sentir en sécurité. Je n’ai jamais ressenti cela. »
Jasmine sourit. « Je veux juste que nous soyons un couple normal, avec des problèmes normaux de location, d’argent. Je ne veux pas que ces problèmes gigantesques interfèrent dans notre mariage. »
Même maintenant, ils ne sont pas tout à fait libres. Ossama ne peut pas traverser le check-point avec Jasmine. Ils ne savent pas quand il pourra la rejoindre en Europe. Ils sont encore un couple englué dans le conflit israélo-palestinien.