Photo : Hamad City, l’un des plus récents lotissements de Gaza, a été bombardé récemment par Israël. Mohammed Talatene DPA
L’idée que certains endroits de Gaza sont sûrs est un mensonge.
C’est un mensonge dangereux, car il a forcé les gens à quitter leurs maisons.
Plus de 1,8 million de personnes sont aujourd’hui déplacées. Toutes fuient la mort.
Les parents tentent de sauver leurs enfants de l’horreur des bombardements incessants. Les gens s’accrochent au petit espoir qui subsiste de voir la guerre se terminer bientôt.
À Khan Younis, dans le sud de la bande de Gaza, les craintes se sont aggravées après qu’Israël a commencé son invasion terrestre et intensifié ses bombardements sur la ville. Nous avions espéré que la brève trêve de fin novembre serait prolongée.
Puis la guerre a repris brusquement.
Le bombardement de Khan Younis a été particulièrement intense après la trêve.
Il y avait des martyrs partout.
Il y avait une odeur de missiles dans l’air.
Le bruit des ambulances ne s’arrêtait pas.
C’était comme si la ville avait soudainement pris feu.
L’armée israélienne a commencé à ordonner aux habitants de la zone orientale de quitter leurs maisons.
Cela signifiait qu’il fallait se rendre dans les écoles et les hôpitaux qui étaient déjà pleins. Certaines personnes n’ont pas pu trouver d’endroit où rester et sont maintenant dans la rue.
Un cauchemar
Au début de la guerre, Khan Younis était considéré comme une zone sûre par Israël. Aujourd’hui, tous les habitants vivent un cauchemar dont ils ne peuvent s’échapper.
"Au début de la trêve, nous avons senti que nous pouvions respirer un peu et dormir sans entendre le bruit des avions de guerre et des drones" a déclaré Maryam al-Sayed d’al-Qarara, à l’est de Khan Younis. "Mes trois enfants ont pu dormir et ont commencé à sortir dans la rue sans inquiétude. Mais lorsque l’armée israélienne a commencé à menacer la ville de Khan Younis après la trêve, j’ai eu très peur. Le matin du premier jour après la trêve, j’ai eu l’impression que j’allais mourir à tout moment. J’ai serré mes enfants dans mes bras et nous nous sommes assis dans une pièce. J’ai entendu les voisins dire que l’armée voulait que nous quittions nos maisons. J’ai parlé à mon mari et il m’a dit : "Où allons-nous ? Nous dormirons à la maison cette nuit et demain matin, nous chercherons un autre endroit."
"La nuit a été très difficile", a-t-elle ajouté. "Les bombardements autour de nous n’ont pas cessé un instant. J’ai entendu le bruit des affrontements entre l’armée et la résistance palestinienne. On aurait dit qu’Israël essayait d’entrer dans la ville de Khan Younis avec des chars. J’ai essayé de rassurer mes enfants et de les distraire du bruit des bombardements jusqu’à ce que les longues heures de la nuit passent. Lorsque le soleil s’est levé, mon mari m’a dit qu’il avait trouvé un logement chez l’un de ses parents à l’ouest de Khan Younis et m’a demandé de préparer quelques affaires. Nous nous y sommes installés et quelques heures plus tard, nous avons appris que les chars avaient commencé à s’approcher de la ville de Khan Younis".
Les ordres d’évacuation des zones situées à l’est de Khan Younis ont été suivis d’autres ordres. Quelques jours après la fin de la trêve, Israël a demandé aux habitants du centre-ville de Khan Younis de quitter leurs maisons.
Les habitants de Khan Younis ont dû porter sur leurs épaules les biens qu’ils avaient emportés avec eux.
Les écoles et les hôpitaux ont dû accueillir davantage de personnes déplacées. L’eau potable étant extrêmement rare, le risque de propagation des maladies a augmenté.
Les habitants de Hamad City, l’un des plus récents lotissements de Gaza, ont également reçu l’ordre d’évacuer.
Israël a suivi ses ordres d’évacuation en bombardant cette zone.
"Je ne pourrai jamais oublier la scène des six tours détruites et tombant sur le sol" a déclaré Yasser Fares, qui vivait à Hamad City. "Dans les heures qui ont suivi le bombardement, il ne restait plus grand monde dans la ville. Nous sommes tous sortis à la recherche d’un endroit où nous abriter".
Certains de ses proches se sont rendus à al-Mawasi, une zone située à l’ouest de Khan Younis. Ils ont monté une tente.
"Si nous ne mourons pas des bombardements, nous mourrons de froid, de faim et de soif" a-t-il déclaré. "Il n’y a pas d’autre forme d’abri. Gaza ne peut pas faire face à une guerre aussi laide et violente."
Yasser Fares et sa famille sont dans une école gérée par l’Agence des Nations unies pour les réfugiés de Palestine (UNRWA). "L’école accueille des milliers de personnes déplacées" a-t-il déclaré. "Nous ne pouvons ni dormir ni nous reposer. Mais nous sommes obligés d’accepter cette situation tragique. Nous ferons tout pour assurer la sécurité de nos enfants, même si aucun endroit n’est sûr. Le "sud sûr" est devenu notre cimetière."
Ruwaida Amer est une journaliste basée à Gaza.
Traduction : AFPS