Une vraie volte-face ou une simple manœuvre ? Après des consultations avec le ministre de la Défense Ehud Barak et le chef de la diplomatie Avigdor Lieberman sur la situation dans la bande de Gaza et sur le processus de paix, le premier ministre israélien Benyamin Netanyahu est revenu sur sa position. Il a annoncé qu’il était prêt à reprendre des négociations de paix sans condition avec les Palestiniens. Une annonce qui a donné le souffle à la communauté internationale et arabe.
Auparavant, lors d’entretiens à Jérusalem avec l’émissaire spécial américain George Mitchell, M. Netanyahu avait réclamé des Palestiniens que ces derniers reconnaissent Israël comme Etat juif avant que son gouvernement ne reprenne les négociations de paix. Une position refusée non seulement par les Etats arabes et l’Autorité palestinienne, mais aussi par la communauté internationale, notamment les Etats-Unis.
L’Autorité palestinienne a immédiatement rejeté l’exigence d’une reconnaissance d’Israël comme Etat juif. « Il s’agit d’un obstacle sur la voie de la paix et de la création de deux Etats », a déclaré le porte-parole du président palestinien, Mahmoud Abbass. Cette exigence « se heurte aux efforts internationaux, notamment américains, en vue d’un règlement de paix », a ajouté le porte-parole Nabil Abou-Roudeina. « La nouvelle condition de Netanyahu n’a d’autre objectif que d’empêcher les progrès vers les négociations », a, de son côté, estimé Saëb Erakat, soulignant que M. Netanyahu ne veut pas la paix.
Contredisant la position initiale de Netanyahu, George Mitchell avait annoncé que la politique des Etats-Unis se concentre sur une solution à deux Etats, « un Etat palestinien et l’Etat juif d’Israël coexistant en paix ». Ensuite, il a souhaité que l’initiative de paix de la Ligue arabe s’intègre dans les efforts que les Etats-Unis comptent coordonner pour parvenir à un Etat palestinien indépendant. Le plan de paix arabe offre à Israël une paix complète en échange de son retrait total des territoires occupés en 1967 et d’une « solution juste » du problème des réfugiés chassés en 1948 de leurs foyers. « Les Etats-Unis se sont engagés en faveur de l’établissement d’un Etat palestinien indépendant, souverain, où s’épanouiraient les aspirations du peuple palestinien à contrôler son destin », a déclaré Mitchell. L’approche des Etats-Unis se heurte à celle du cabinet israélien, investi le 31 mars, qui écarte l’option de deux Etats tout en se disant prêt à parler de paix avec les Palestiniens sur la base d’un plan privilégiant leur développement économique.
Face à la vague de réprobation, la présidence du conseil israélien a affirmé dans un communiqué que « le premier ministre n’a jamais fixé la reconnaissance d’Israël en tant qu’Etat du peuple juif comme préalable à des négociations de paix et à un dialogue avec les Palestiniens », explique ce texte, en affirmant que « la reconnaissance d’Israël comme pays juif est une affaire de principe essentielle, largement acceptée en Israël et dans le monde, sans laquelle il est impossible de progresser dans le processus de paix et de parvenir à un accord de paix », ajoute néanmoins le communiqué. En plus, Netanyahu a affirmé qu’« Israël ne cherchait pas à régner sur les Palestiniens, mais doit s’assurer que le processus politique avec eux n’aboutira pas à un second Hamastan (Etat du Hamas) au cœur du pays ». Il faisait référence à la bande de Gaza que contrôle le Hamas et d’où sont tirées sporadiquement des roquettes sur Israël.
Le prédécesseur de M. Netanyahu, Ehud Olmert, avait déjà exigé en novembre 2007 que les Palestiniens reconnaissent Israël « comme l’Etat du peuple juif », mais n’était quasiment plus revenu sur ce thème par la suite. A l’époque, cette demande avait déjà été qualifiée « d’inacceptable » par le chef de l’équipe des négociateurs palestiniens, Ahmad Qoreï, qui avait rappelé que l’Autorité palestinienne « reconnaissait déjà l’Etat d’Israël dans les frontières de 1967 ». Les Palestiniens craignent notamment que la reconnaissance d’Israël comme l’Etat des juifs reviendrait pour eux à renoncer au « droit au retour » sur leurs terres des réfugiés palestiniens. Israël se définit selon une loi fondamentale comme « Etat hébreu » tout en comptant 1,3 million de citoyens arabes. Il s’agit des descendants des 160 000 Palestiniens restés sur leurs terres après la création de l’Etat juif. Ils représentent aujourd’hui 20 % de sa population.