A cet égard, il est important de rappeler quelques points qui pourraient aider à dessiner les contours d’une politique israélienne dans l’avenir proche. En effet, M. Netanyahu a derrière lui une expérience au poste de premier ministre à la tête d’une coalition de droite et d’extrême droite de 1996 à 1999, qui a suivi une politique de « ligne dure » en ce qui concerne les questions-clés du conflit avec les Palestiniens, mais aussi vis-à-vis d’une Administration démocrate à Washington.
La politique de la colonisation accélérée à Jérusalem et en Cisjordanie a représenté l’un des points forts de sa politique. Tout le monde se rappelle de l’épisode de la construction d’une nouvelle colonie de peuplement juif à Djebel Abou-Ghoneim, dans le sud de Jérusalem-Est, un site que les Israéliens ont rebaptisé du nom hébreu de « Har Homa ». En effet, la crise israélo-palestinienne, suscitée par la mise en chantier par l’Etat hébreu, le 18 mars 1997, d’une onzième colonie juive, sur les territoires arabes annexés à Jérusalem, avait mis alors le processus de paix en danger mortel. Tandis que les Palestiniens n’avaient pas cessé de répéter qu’il fallait s’attaquer aux « causes de la crise », à savoir la politique de colonisation, M. Netanyahu se contentait de déclarer : « La colonisation continuera aussi bien à Har Homa que dans les autres implantations ».
Par ailleurs, il n’accordait pas une grande importance aux négociations avec les Palestiniens. Pour lui, ces négociations n’étaient qu’un moyen, parmi d’autres, d’imposer sa vision pour l’avenir d’Israël. En outre, il semble partager les tendances qui voient d’un mauvais œil les dangers potentiels émanant des Arabes en Israël sur la nature juive de l’Etat, notamment le Mouvement islamiste, dont il a réclamé en 2002 sans mise hors de la loi. En conséquence, l’on ne peut pas exclure une entente entre lui et M. Lieberman qui a brillé pendant la dernière campagne électorale, du fait de sa position contre les « Arabes d’Israël » et ses exigences d’obtenir d’eux un engagement dit de « citoyenneté ».
Enfin, le chef du Likoud avait prouvé par le passé ses capacités à s’opposer aux exigences de Washington en ce qui concerne ses grandes orientations. Déjà, en mars 1997, le maître de la Maison Banche avait souligné qu’il aurait préféré que la décision israélienne de construire la colonie de Har Homa à Djebel Abou-Ghoneim, à Jérusalem-Est, ne fut pas prise. Selon lui, une telle décision ne contribuait pas à la confiance mais, au contraire, apportait « la méfiance ». Or, mis devant un choix difficile, Washington allait à deux reprises, en mars 1997, mettre son veto au Conseil de sécurité de l’Onu aux projets de résolution dénonçant la poursuite des implantations israéliennes à Jérusalem-Est. Fort du soutien des organisations juives aux Etats-Unis, il se sentait en droit de déclarer, à la veille de sa rencontre avec le chef de l’Exécutif américain, le 20 janvier 1998, pour discuter l’avenir du processus de paix : « Ceux qui envisagent un accord sous la pression sont toujours déçus et ils le seront encore cette fois ». Les déclarations du premier ministre israélien, sa politique de colonisation, accélérée dans les territoires occupés et la définition formulée par son gouvernement de ce qu’il considérait comme les « intérêts vitaux et nationaux » d’Israël en Judée-Samarie indiquaient alors que le « veto » israélien devait s’appliquer non seulement aux Palestiniens mais aussi au parrain américain du processus de paix.
Bien entendu, beaucoup de changements ont été enregistrés pendant la décennie passée, toutefois M. Netanyahu semblerait rester, au fond, fidèle à ses convictions. Son acceptation tardive de l’idée de « deux Etats », soutenue par la nouvelle Administration américaine, ne reflète en rien un changement radical mais plutôt une tactique. Désireux de ne pas heurter cette Administration qui avance la notion du « changement », il est convaincu qu’il a en sa possession au moins trois cartes maîtresses à jouer pour retarder un « affrontement » éventuel entre sa politique et celle de M. Obama. La première concerne la lutte contre le « terrorisme » appliquée dans le cadre de la feuille de route sur toutes les factions palestiniennes qui prônent la résistance ; la deuxième est la lettre de garantie adressée par le président sortant, Georges W. Bush, à M. Sharon en avril 2005, lettre qui lie les poings de n’importe quelle Administration américaine en ce qui concerne les questions-clés du règlement définitif ; et enfin le dossier nucléaire iranien, pays que l’Etat hébreu considère comme un danger « existentiel » et que les Etats-Unis veulent écarter.