Que non, même si cette organisation non gouvernementale (ONG) américaine se présente comme l’une des plus importantes organisations humanitaires avec plus de 40 000 employés dans près de 100 pays. En 2015, elle est venue directement en aide à 92 000 enfants dans les Territoires palestiniens, incluant Ghaza dont les deux tiers de la population dépendent de l’aide étrangère. Soumise à un rigoureux blocus israélien et à la fermeture quasi permanente de la frontière égyptienne, Ghaza est en proie à une crise humanitaire chronique. Vaste programme, mais il est soumis aux donateurs, ainsi qu’aux autorités d’occupation israéliennes car, en fin de compte, l’accès aux Territoires et aux populations palestiniennes n’est pas libre. Tout y est surveillé. Et c’est aussi une question de crédibilité que soulèvent les accusations israéliennes relatives à la destination des fonds dont dispose World Vision. A les croire, ceux-ci ne sont pas seulement énormes, mais seraient distribués de manière occulte, des accusations que cette organisation a jugé irréalistes. Ce sont, dira-t-on, les lois de la guerre où tous les coups sont permis, y compris le mensonge. Mais réellement tous, alors qu’il est possible d’en contester certains, d’en démentir d’autres, mais cette organisation non gouvernementale a opté pour leur rejet global.
Et pour cause, dans tous les pays, ces ONG sont soumises à des règles concernant l’origine et l’usage des fonds qu’elles reçoivent, parce qu’il faut les justifier auprès des donateurs qui ne sont pas uniquement les Etats ou les institutions internationales. World Vision a, en effet, rejeté les chiffres présentés par Israël pour accuser le directeur de cette organisation caritative américaine en activité dans la bande de Ghaza d’avoir détourné des millions de dollars au profit du mouvement Hamas qui dirige le territoire palestinien. Israël, qui espérait réussir un coup double en ciblant d’abord ce mouvement palestinien, a même annoncé jeudi l’arrestation et l’inculpation du directeur à Ghaza de World Vision, Mohammed Halabi. Les services israéliens l’accusent d’avoir détourné chaque année 7,2 millions de dollars (6,5 millions d’euros) pour le Hamas et sa branche armée. Il y a là donc deux faits, l’un se rapportant aux fonds dont disposerait World Vision et qui ferait d’elle une organisation particulièrement riche, tandis que l’autre n’est rien d’autre qu’une accusation de soutien apporté à une organisation palestinienne, ce qui en soi ne constitue pas un crime, bien au contraire, le Hamas étant un mouvement de libération. Réagissant très rapidement, soit quelques heures à peine après leur formulation par les autorités israéliennes, World Vision dit prendre ces accusations très au sérieux, mais réclame des preuves, et il est peu sûr, sinon impossible qu’Israël puisse en disposer au regard des sommes évoquées.
L’ONG, qui n’a « toujours pas vu la moindre preuve » des accusations israéliennes, réplique par les chiffres. Aussi dira-t-elle que le budget total de son organisation depuis une décennie dans la bande de Ghaza s’élève à 22,5 millions de dollars, un chiffre « dur à concilier » avec les dizaines de millions de dollars que M. Halabi aurait détournés selon les services israéliens. Et d’un, car elle ne manque pas d’arguments, et ils sont irréfutables. Car elle précise que la personne mise en cause n’a pris la tête des opérations à Ghaza qu’en octobre 2014, et non pas en 2010 comme cela a été rapporté côté israélien. « Avant cette date, il ne gérait qu’une portion du budget », ajoute-t-on. Même directeur, il n’avait le pouvoir de signature que jusqu’à hauteur de 15 000 dollars. Ce que l’administration israélienne ne peut en aucun cas ignorer, car c’est elle qui contrôle l’activité des ONG dans les Territoires palestiniens occupés, donc y compris World Vision. Un grossier mensonge qui permet néanmoins un autre témoignage sur la situation imposée aux Palestiniens.