Dans la banlieue de Los Angeles, le casino Hawaiian Gardens est supposé verser tous ses gains à des œuvres de charité. Chaque jour, le gagnant du bingo repart avec 500 dollars en poche, et les perdants avec la certitude que leurs billets verts serviront de bonnes causes. Sauf que les vrais gagnants de cette roulette se trouvent à des milliers de kilomètres du lieu. Chaque dollar dépensé au bingo finance, en réalité, les colonies juives en Cisjordanie.
Depuis plus de vingt ans, des millions de dollars ont pris la direction d’Israël, ce qui fait monter au créneau tous les opposants à cette machine à sous destinée à renforcer les lobbys pro-israéliens aux Etats-Unis. Le casino, propriété d’un juif américain multi-millionnaire, Irving Moskowitz, focalise davantage l’attention depuis que Obama a exigé de l’Etat hébreu le gel des colonies en Cisjordanie, considérées comme un obstacle majeur sur la voie de la paix.
“L’argent du casino a permis la construction de quelque 50 à 70 000 habitations. Et si l’administration américaine souhaite stopper les colonies, elle doit d’abord s’attaquer à ce casino”, explique un “opposant”. Irving Moskowitz s’est joué de la loi, qui exige que le casino Hawaiin Gardens ne doive servir que des causes charitables, en montant une Fondation à son nom. Les responsables du casino affirment, mais sans avancer de preuves, que des aides sont versées à certaines communautés fragiles de Californie, voire au Kosovo et en Amérique Latine. “Moskowitz, qui a perdu plusieurs proches pendant l’Holocauste, est convaincu qu’Israël doit survivre pour rester un havre de paix pour tous les juifs du monde. Sa Fondation y finance des programmes religieux, éducationnels, culturels, voire des services de secours d’urgence”, explique, par ailleurs, le site de sa Fondation. Rabbi Haïm Dov Beliak, opposé à Moskowitz, avance que ladite Fondation aurait versé plus de 100 millions de dollars aux colons juifs depuis sa création.
Complicité des autorités ?
“Il ne s’agit pas de simples opérations d’achat de terres arabes, mais d’opérations politiques que toutes les administrations américaines ont tolérées”, s’insurge Rabbi Beliak. Ce dernier a même participé au lancement de la Coalition pour la Justice Hawaiin Gardens et Jérusalem, censée stopper le flux d’argent du casino vers les colonies. Ses consultations des registres de la taxe ont démontré que la Fondation a versé des sommes colossales à Beit Hadassah, une colonie de juifs ultra-orthodoxes installée à Al Khalil (Hébron).
Le "philanthrope" juif, qui n’a jamais caché son hostilité envers les Palestiniens, avait fortement critiqué Ariel Sharon pour son retrait de Gaza en 2005, et fourni des fonds aux colons pour qu’ils se battent contre leur évacuation. Moskowitz ne compte pas s’arrêter en si bon chemin puisqu’il est en train de construire un autre grand casino pour augmenter ses recettes. “Sans que les autorités américaines trouvent à y redire”, se désole Rabbi Beliak, qui pointe même du doigt la complicité des autorités : selon lui, celles-ci n’hésitent pas à mettre en prison des musulmans qui ont collecté et envoyé des fonds à Gaza, et donc au Hamas, considéré comme une organisation terroriste. Deux poids deux mesures, donc.