May 26, 2005, 12:27
/..., utiliseront pour supprimer la décision de l’union des universitaires britanniques, en remettant en cause le 26 mai prochain la précédente décision de cet organisme de boycotter les universités de Haïfa et de Bar Ilan.
La décision des universitaires britanniques, soutenue par des milliers d’universitaires, a ouvert une nouvelle brèche et une transformation de qualité ouvrant la voie au boycott du fait même de la nature de l’Etat d’Israël, colonial et raciste, et non plus en se limitant aux conséquences de son expression la plus grossière, qui est l’occupation et ses crimes.
Cette transformation pourra mettre Israël, en tant que régime et entité dans le box des accusés, sur les plans international et populaire, et plus tard officiel, en vue de lui imposer des sanctions internationales.
D’autre part, la question du boycott constitue une épreuve pour mesurer le rôle de nos masses et de nos institutions, des deux côtés de la ligne verte, y compris celui de l’Autorité Palestinienne et du niveau politique dans lequel elle agit.
Il est nécessaire que l’Autorité Palestinienne définisse son orientation et sa fonction, définisse si sa seule fonction possible est de jouer (ou de laisser Israël jouer avec elle) le rôle de soupape de sécurité et de protection d’Israël, que ce soit sur le plan international en faisant face à la demande de sanctions contre Israël et de son boycott, sur le plan arabe et régional en faisant face au mouvement populaire opposé à la normalisation avec Israël et le projet sioniste, ou palestinien en protégeant Israël par la suppression du rôle du mouvement de libération nationale et de la résistance, par tous les moyens.
Est-ce que l’Autorité Palestinienne va ac cepter de fragmenter le projet de libération palestinien et le restreindre à la tentative de mettre fin à l’occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza, ou remettre toute la question palestinienne, dans sa globalité, à l’OLP en tant que partie représentante du peuple palestinien et de sa lutte nationale, afin que l’Autorité puisse assumer alors son rôle dans le cadre du projet palestinien global de libération au lieu de le limiter.
Sari Nusaybeh est pratiquement dans cette attitude... et il joue ce rôle consciemment, intentionnellement, tout en sachant à l’avance ses méfaits, alors qu’il n’est pas obligé de jouer le jeu israélien, comme il n’est pas nécessairement soumis à l’équilibre de forces entre Israël et l’Autorité Palestinienne.
Cet équilibre et l’attitude palestinienne qui en découle constituent un frein à l’élargissement du rôle des mouvements de la solidarité internationale, et notamment les mouvements du boycott qui exigent de sanctions internationales contre Israël, tout en sachant à l’avance que l’Autorité Palestinienne est le résultat et l’otage de cet équilibre.
Mais nous savons aussi que Sari Nusaybeh, de par la liberté académique, et de la responsabilité qu’il porte en tant que président de l’Université d’al-Quds, est libéré de cet engagement ou de cette obligation dans lesquels se trouve l’Autorité Palesti nienne.
La réalité vécue est qu’Israël et son projet d’occupation et de colonisation raciste imposent à la partie palestinienne de les protéger, ils lui font croire qu’elle a intérêt à les protéger tout en l’empêchant d’utiliser une protection pour elle-même, afin que cette voie soit alimentée à la fois par la partie israélienne dominante et la partie palestinienne dominée à partir d’un équilibre de force international, un soutien américain illimité à Israël et une attitude européenne savant manier la duplicité.
A chaque fois qu’une idée ou qu’une campagne internationale de boycott d’Israël est proposée, nous trouvons l’argument officiel européen affirmant que des négociations ou des pourparlers israélo-palestiniens sont en cours ou qu’il existe à l’horizon un plan de désengagement israélien.
Et si la situation l’exige encre plus, il y a une personnalité palestinienne bien positionnée, et ici il s’agit de Sari Nusaybeh, qui lance la bouée de sauvetage, sans prendre en considération l’état de découragement que cela peut entraîner dans les mouvements de la solidarité internationale, dans la résistance palestinienne et la légitimité de cette résistance.
Il y a à l’intérieur du peuple palestinien, et ceci n’est pas nouveau mais se développe actuellement, ceux qui payent le prix d’une telle attitude, et ils sont la majorité, comme il y a ceux qui touchent le prix de cette attitude, mais il y a encore pire, c’est la partie qui touche le prix de son attitude et de l’attitude nationale des autres, qui accuse la résistance d’extrémisme et de terrorisme, de l’anarchie des armes et autres concepts courants en période de domination néolibérale américaine, faisant porter la responsabilité au peuple palestinien, la victime des crimes d’Israël, comme si Israël était la victime ou que le problème réside dans l’attitude palestinienne.
Cette attitude palestinienne doit prendre fin, et c’est tout d’abord la responsabilité du peuple palestinien.
Son arrêt, non pas par la violence, mais en créant et en affirmant une mobilisation populaire et institutionnelle, y compris de l’Autorité, si possible, pour refuser le comportement de Sari Nusaybeh et de ses acolytes, pour supprimer sa décision et l’accord de coopération avec l’université hébraïque par une décision palestinienne officielle issue d’une opinion générale palestinienne, pour commencer une campagne palestinienne de solidarité avec les enseignants des universités britanniques qui ont défié et ont pris des risques par rapport à leurs postes, pour servir et soutenir le peuple palestinien.
La solidarité internationale avec le peuple palestinien s’élargit en fonction de la lutte palestinienne et non pas en fonction de la compromission de personnalités sous le prétexte de réalisme, de théorisation sur la fin de l’époque de la résistance et des mouvements de libération nationale, sur la nécessité de sauver ce qui est encore possible de sauver.
Le peuple palestinien n’est pas en position de défaite face à Israël.
Israël, où une large majorité populaire et officielle s’est opposée à des accords illusoires qui semblent israélo-palestiniens mais qui en réalité représentent la parfaite domination israélienne, se protège par ces accords et leurs auteurs, pour qu’apparaisse clairement que le seul bénéficiaire de ces accords (Nusaybeh - Ayalon et Genève) est Israël, qui s’est opposé à eux et qui les a enlevés de son agenda officiel et populaire, et que le perdant a été le peuple palestinien alors que l’Autorité Palestinienne les a bénis ou du moins n’a rien dit pour s’y opposer.
Dans la pratique, l’Autorité n’a pas assuré une protection palestinienne aux capacités certes limitées de la légalité internationale, mais qui protège le droit palestinien.
Il faut dire aussi que l’acte de Sari Nusaybeh ne peut se situer dans le cadre de la liberté d’expression, car il ne s’agit pas d’une liberté d’expression mais plutôt d’un acte officiel, au nom d’une université officielle palestinienne, au nom de l’académie palestinienne.
Il s’agit d’un acte effectif visant à imposer une politique à tout le peuple palestinien.
Le choix du moment traduit une attitude hostile envers le mouvement britannique de boycott des universités israéliennes et envers le soutien au droit palestinien.
Israël ne se prive de rien, il a su tirer profit de la mobilisation des maires arabes palestiniens de l’intérieur d’Israël en soutien à la faculté à l’intérieur la colonie Ariel, mettant ce geste en avant au même moment où la décision des académiciens britanniques de boycott de l’institution académique israélienne était annoncée.
Dans ce cas, l’équilibre des forces local et inernational fait que l’attitude d’une personne ou de quelques personnes agit comme un amplificateur, faisant croire qu’il s’agit de l’attitude d’un peuple tout entier, et minimise l’attitude d’un peuple tout entier pour le rendre marginal par rapport à telle ou telle personnalité.
Le mouvement du boycott et le mouvement contre la normalisation
Au moment où les régimes arabes se ruent pour normaliser leurs relations avec Israël et que certains milieux palestiniens lancent la bouée de sauvetage à Israël, voulant la tirer de l’une de ses impasses, au moment où le projet sioniste élargit ses appétits et exige du monde la reconnaissance d’Israël en tant qu’Etat juif et non seulement en tant qu’Etat, la question de la relation entre les mouvements populaires et le rôle palestinien devient crucial.
La relation avec le mouvement arabe refusant la normalisation et le mouvement international de boycott, ainsi que la résistance du peuple palestinien doit être une relation complémentaire si nous souhaitons sa réussite. L’axe palestinien est essentiel, car il influe sur les autres. La position palestinienne devrait être le soutien et le renforcement du rôle de l’opposition à la normalisation et de celui des mouvements de boycott.
L’importance des mouvements opposés à la normalisation tient au fait qu’ils visent le fondement d’Israël, et non des actes précis, isolés en conséquence de ce fondement. Il est également important, pour le mouvement de boycott qui, jusqu’à présent, a une large audience sur le plan international, de réaliser ce point alors que le mouvement opposé à la normalisation est plus actif au niveau arabe, mais la stratégie de complémentarité entre les deux mouvements est importante, ce qui lui assurera la force de durer.
Un rapide survol du mouvement de boycott d’Israël ou les premières leçons que nous pouvons en tirer serait de le comparer avec le mouvement de boycott du régime de l’apartheid en Afrique du Sud.
Dans ce dernier cas, l’accent a été mis sur la dénonciation de la nature et de l’illégalité de ce régime, ce qui veut dire que quelle que soit la position de ce régime sur un point précis, mauvaise ou moins mauvaise, le mouvement international de boycott et la résistance locale se seraient poursuivis et développés.
Mais dans la situation palestinienne, les institutions de la société civile palestinienne ont fait une erreur lorsqu’elles ont essayé d’activer les pressions internationales et les mouvements de boycott sur un sujet précis concernant des détails et non le fondement avec tous ses constituants.
Au cours de la première intifada, la question soulevée fut de mettre fin à l’occupation, mais dans la deuxième intifada, les campagnes des institutions de la société civile palestinienne se sont limitées à la colonisation et les colonies, puis au mur de l’occupation.
Il est vrai que ces questions sont extrêmement importantes et vitales, mais l’expérience nous montre qu’Israël se complaît toujours dans la fragmentation palestinienne qui insiste sur une partie de l’injustice ou sur un constituant et non sur le fondement de l’injustice ou le fondement d’Israël en tant que régime colonial et raciste.
Cette stratégie de fragmentation a échoué dans toutes les épreuves et a des répercussions négatives sur la lutte palestinienne. Les outils de cet échec ont été soit la cour suprême israélienne soit les "négociations" israélo-palestiniennes qui ne s’achèvent pas par des résultats favorables aux Palestiniens.
Quant aux initiatives et documents communs comme le document Ayalon-Nusaybeh ou le document de Genève, ils ne sont plus que des documents tentant de sauver Israël de ses impasses, ce qui a des répercussions négatives sur les initiatives populaires et sur l’esprit de la lutte.
L’action officielle, semi-officielle ou de la direction palestinienne, a des répercussions importantes, que ce soit positivement ou négativement. Malheureusement, elle a été, au cours de la dernière période, plutôt négative.
Où est la participation palestinienne au mouvement arabe opposé à la normalisation et comment pouvons-nous expliquer cette fragilité nationale où ce sont des outils palestiniens qui assènent des coups au mouvement international du boycott au moment de son élaboration, et aux parties palestiniennes qui ont participé à mettre en place ce mouvement international ?
Les Palestiniens de l’intérieur
La société palestinienne de l’intérieur, les citoyens de l’Etat d’Israël, ne sont pas exemptés de la participation à cette campagne et à cette importante bataille. La question qui se pose est : est-ce que les institutions palestiniennes à l’intérieur d’Israël vont-elles participer au boycott ou bien vont-elles se contenter d’une attitude de spectateur et se cacher derrière le prétexte de "la spécificité de la situation" israélienne pour justifier leur passivité.
Nous avons une expérience qui a prouvé sa force et sa réussite, qui est la conférence internationale contre le racisme à Durban, en 2001, lorsque les institutions de la société civile palestinienne ont défini leur stratégie pour encercler le régime raciste israélien, et ont attiré le soutien et la coopération populaire internationale la plus large, en dénonçant Israël en tant que régime colonial et raciste à cause de ses crimes contre tout le peuple palestinien, des deux côtés de la ligne verte et dans l’exil.
L’essentiel a été dans le rôle de nos institutions de l’intérieur, nous nous sommes comportés non seulement en tant que partie du peuple palestinien et mais aussi de la cause palestinienne, comme les autres parties de notre peuple dans le pays ou dans l’exil, nous avons surmonté le comportement fragmenté pour prendre en compte la situation palestinienne générale et bien évidemment, en corollaire, le fondement d’Israël.
Un mouvement opposé à la normalisation et un mouvement de boycott d’Israël ne sont pas seulement les affaires de ceux qui parmi les amis du peuple palestinien, prennent l’initiative, mais ce sont également notre responsabilité.
Tout comme Israël et ses appareils utilisent à mauvais escient le nom de nos masses à travers les positions des maires des autorités locales ayant soutenu l’académie dans la colonie d’Ariel (par une publicité non payante dans Haaretz du 2 mai), et tout comme l’Etat utilise l’accord de coopération entre les universités d’Al-Quds et l’université hébraïque, il nous faut clarifier notre position.
Il est exigé de nous, en tant qu’institutions de la société civile, palestinienne, arabe, internationale, des comités et unions des étudiants arabes, des enseignants et universitaires arabes, de nos institutions nationales et médiatiques, que nous soutenions le mouvement international de boycott d’Israël et que nous en soyons partie prenante.
Ceci n’est pas nécessairement en contradiction avec la revendication de nos droits, mais au contraire, cela peut aider nos revendications, et tout dépend de la vitalité de notre rôle.