Traversant les camps de réfugiés de Boureij et Nousseirat, d’où était originaire la majorité des 18 morts, plus de 10 000 personnes, brandissant les drapeaux du Hamas, du Jihad islamique ou du Fateh, ont crié « vengeance ». « Ô martyrs bien-aimés, nous riposterons à Tel-Aviv ! » « Que Dieu détruise les Juifs. Ils ont brisé mon cœur, ils me l’ont arraché. Il était mon plus jeune fils. J’espère qu’il est au paradis et que eux iront en enfer », a affirmé Oum Talha, dont le fils Talha, 13 ans, a été tué dans un raid aérien à Boureij. La famille d’un autre adolescent tué, Islam al-Issawi, 15 ans, tente de retenir ses larmes. « Des résistants ont tiré des RPG. Les chars et un hélicoptère ont ensuite tiré, touchant Issam », a raconté son frère Mohammad, 14 ans, témoin de l’attaque.
L’armée israélienne avait lancé une série d’opérations dans Gaza suite à la mort de trois de ses soldats dans une embuscade tendue par le Hamas qui contrôle la bande de Gaza depuis juin 2007 après en avoir chassé le mouvement rival Fateh du président Mahmoud Abbas. Parmi les Palestiniens morts, figure un journaliste de l’agence britannique Reuters, Fadel Chanaa, 23 ans. Aux funérailles, ses collègues ont porté son corps, recouvert d’un drapeau palestinien, et disposé sur un autre brancard sa caméra brisée et son gilet pare-balles encore couvert de sang.
Le Hamas a appelé dans un communiqué sa branche armée, les Brigades Ezzedine al-Qassam, à « frapper l’ennemi sioniste partout et par tous les moyens possibles en réponse aux crimes de Boureij (car) l’ennemi ne comprend que le langage de la force ». De son côté, le Premier ministre israélien Ehud Olmert a réaffirmé qu’il considérait le Hamas comme le « seul responsable direct de ce qui se passe dans la bande de Gaza. Nous lui en ferons payer le prix ». Cependant, selon la radio militaire, les responsables israéliens hésitent à lancer une vaste opération terrestre à Gaza de crainte que le Hamas tire « une pluie de roquettes » sur le sud d’Israël durant la célébration de la Pâque juive qui débute samedi et dure huit jours. D’autres responsables militaires cités par les médias affirment que le Premier ministre préfère attendre la fin de la visite du président américain George W. Bush, prévue à la mi-mai à l’occasion des célébrations du 60e anniversaire de l’État d’Israël, avant d’envisager une offensive d’envergure. La police israélienne a été placée en état d’alerte avancé et la Cisjordanie totalement bouclée de crainte d’un attentat pendant la fête.
La Maison-Blanche s’est dit « inquiète » face à aux violences, alors que l’Union européenne, emboîtant le pas au patron de l’ONU Ban Ki-moon, a appelé à la retenue. Le Foreign Office a déploré « la mort de civils, d’enfants innocents et du journaliste de Reuters, que nous jugeons particulièrement troublante ». Et au Caire, la Ligue arabe a condamné les opérations israéliennes, les qualifiant de « crimes de guerre ».
La violence s’est poursuivie hier avec la mort de deux activistes du Jihad islamique en Cisjordanie et d’un autre du Hamas à Gaza, tués par l’armée israélienne, alors que 13 roquettes ont été tirées depuis le territoire palestinien contre le sud d’Israël. Face à cette escalade, le président palestinien Mahmoud Abbas a appelé depuis Moscou à organiser « au plus vite » une conférence sur le Proche-Orient dans la capitale russe, affirmant que les négociations de paix avec Israël n’avançaient pas suffisamment. Il a aussi de nouveau appelé à un « cessez-le-feu immédiat » à Gaza aux termes duquel les groupes armés palestiniens mettraient fin aux tirs de roquettes contre Israël, et ce pays arrêterait ses opérations et lèverait le blocus imposé au territoire palestinien.
Au moins 413 personnes ont été tuées depuis la conférence de paix d’Annapolis le 27 novembre aux États-Unis, qui a marqué la reprise des pourparlers israélo-palestiniens après une interruption de plusieurs années.