Le sommet de jeudi (4 septembre) à Damas a consacré le rôle régional de la Syrie, qui a clairement indiqué que toute avancée dans les négociations de paix avec Israël était suspendue aux prochains changements d’administration aux États-Unis et dans l’État hébreu, estiment des analystes.
À l’ouverture du sommet quadripartite (Syrie, France, Turquie, Qatar) organisé à l’occasion de la visite du président français Nicolas Sarkozy, le chef de l’État syrien Bachar el-Assad a donné le ton en affirmant qu’une avancée réelle ne serait possible qu’« avec la venue d’une nouvelle administration américaine convaincue du processus de paix ». Hier, la presse syrienne, pour sa part, insistait sur le « tournant historique » marqué par le sommet. Celui-ci a « consacré le rôle important que joue et peut jouer la Syrie à l’avenir pour la sécurité, la stabilité et la paix » dans la région, soulignait le quotidien gouvernemental Techrine. C’est la Syrie qui « détient la décision de guerre et de paix et sans (elle) la région restera plongée dans l’inconnu », jugeait à Beyrouth le quotidien as-Safir, proche de l’opposition soutenue par Damas et Téhéran.
Si Damas ressort gagnant du sommet, aucun résultat concret n’a par ailleurs été enregistré. « Il n’y a pas eu de percée majeure », note auprès de l’AFP Andrew Tabler, journaliste au mensuel basé à Damas Syria Today. « C’est un succès symbolique pour Damas qui est sorti de son isolement, mais en substance rien ne s’est passé. » « Tout le monde attend les prochaines élections aux États-Unis et (les primaires du Kadima) en Israël. D’ici là, les parties dans la région feront du surplace », ajoute-t-il.
Bachar el-Assad a confirmé ses propos jeudi sur al-Manar. « Nous attendons de voir quelles seront les orientations de la (nouvelle) administration (américaine). Qu’on le veuille ou pas (la présence des) États-Unis est fondamentale dans ce processus », a souligné le président syrien. Il a également dit attendre les élections primaires du 17 septembre au sein du Kadima, le parti du Premier ministre Ehud Olmert, qui a annoncé sa prochaine démission, pour « déterminer l’avenir » des négociations. « Assad : Des négociations directes uniquement après Bush et Olmert », résumait hier le quotidien israélien Maariv.
Aymane Abdel Nour, directeur du site Internet all4syria, basé à Damas, confirme : en ce moment, « on ne peut réaliser des avancées réelles sur le terrain », avance-t-il. « Un dossier comme les négociations avec Israël (...) est complexe et quelques réunions ne suffisent pas pour trouver une solution (...). Ce genre de dossier a besoin de toutes les parties et l’acteur principal reste les États-Unis », explique-t-il. La Syrie réclame la restitution du plateau du Golan conquis par Israël en juin 1967 puis annexé en 1981.
« Les participants au sommet ont envoyé le signal fort qu’ils étaient prêts à investir dans la paix, la balle est maintenant dans le camp américain », surenchérit Paul Salem, directeur du centre Carnegie pour le Proche-Orient. « Mais même si les choses avancent techniquement », comme avec la tenue d’un 5e round de négociations indirectes en septembre, ce sont les États-Unis « qui tranchent ». Selon lui, « pour voir du concret, il faudra attendre le printemps 2009 », après que la nouvelle administration américaine, démocrate ou républicaine, eut fixé sa ligne politique dans la région.
Damas et Washington sont en froid, l’actuelle administration de George W. Bush accusant la Syrie de soutenir le terrorisme en appuyant le Hezbollah et en facilitant l’infiltration d’insurgés en Irak. Elle lui reproche également son alliance avec l’Iran. « Le chemin reste long », conclut l’analyste syrien Ahmad al-Hajj Ali, selon qui Washington doit s’engager dans la même voie que la France en choisissant le dialogue avec Damas.