La colonisation de la Palestine dénoncée : Au nom de la poésie, faut-il oublier l’injustice et l’oppression ?
Intervention de la section Sète-Bassin de Thau de l’AFPS34
au Festival Voix Vives de Méditerranée en Méditerranée à Sète (Festival de poésie où sont invités des poètes de tous les pays bordant la Méditerranée)
Le jeudi 30 juillet des militants de la section sont allés écouter les deux poètes palestiniens Walid Alswairki et Bashir Shalash. Chacun des poètes a été convié par l’animateur, avec beaucoup de pertinence et de délicatesse, à faire part au public de son vécu en tant que poète de Palestine. C’est ainsi que Walid, dont les parents ont été chassés par l’armée israélienne de leur village, a parlé de l’interdiction qui lui est faite de revenir dans son pays d’origine du fait de son statut de réfugié. Il ne peut donc pas accompagner sa femme palestinienne et leur fils de neuf ans en Cisjordanie lorsqu’ils rendent visite à la famille de celle-ci au cours des vacances scolaires. A la fin de cette lecture-entretien, les représentants de la section sétoise sont venus remercier les poètes pour la beauté de leurs textes et leur ont offert les roses rouges de la solidarité.
Le festival avait invité également deux poètes israéliens dont l’un, Eliaz Cohen, était présenté clairement dans le programme comme résidant dans une colonie en Cisjordanie c’est-à-dire en territoire palestinien occupé. Dans un article écrit par lui [1]
il confirme habiter dans le bloc de colonies de Gush Etzion et il représente sa colonie dans le Conseil Yesha, l’organisation regroupant les conseils municipaux des colonies de Cisjordanie.
La section Sète-Bassin de Thau de l’AFPS34 a donc diffusé un tract, avec la participation d’adhérents de Montpellier, le vendredi 31 juillet pour s’étonner de l’invitation aux Voix Vives d’un représentant du système de colonisation en Cisjordanie. Il était décidé d’interpeller le poète et les organisateurs sans appeler ni à le boycotter ni à empêcher son expression.
Le poète-colon a pu lire ses œuvres qui magnifient l’amour, le dialogue entre cultures et religions ainsi que le « partage généreux de la terre d’Israël ».
A la fin de la lecture, un entretien très court avec Eliaz Cohen a eu lieu comme cela avait été prévu par la section de Sète. Tout en lui disant que sa poésie était belle, il lui était demandé comment il pouvait vivre dans une colonie. Sa réponse : « Je crois en la paix entre les enfants d’Isaac et ceux d’Ismaël. Avec mes amis Palestiniens, je veux partager la terre d’Israël ». Puis lui était demandé à qui appartenait la terre sur laquelle était construite la colonie où il habite. Sa réponse était sans équivoque : « Elle appartient à Israël comme le dit la Bible. ». L’entretien se terminait là.
Mais l’attitude d’un certain nombre d’organisateurs et animateurs du Festival vis à vis de l’AFPS34 a été très étonnante : agressivité et dénigrement.
Lors de la traduction de l’introduction d’Eliaz COHEN concernant l’incendie par des colons de la maison palestinienne où Ali, bébé de 18 mois était brulé vif, la traductrice a refusé de traduire cela prétextant que le temps manquait. Peur de voir surgir la politique alors qu’on voudrait la nier ? Une militante est alors intervenue pour compléter la traduction.
CONCLUSION La poésie ne doit pas être utilisée pour banaliser et justifier un système d’oppression tel que la colonisation de la Palestine ni à Sète ni ailleurs.
Mais nous devons faire œuvre d’explication : le but visé par nos actions qui relèvent du boycott culturel est d’expliquer que vouloir maintenir une "parité" entre poètes palestiniens et poètes israéliens invités est un leurre, ce n’est pas parce que les uns et les autres sont invités dans le même festival que cela contribue à la paix si on occulte les rapports occupant/occupés.
L’Afps34 a toujours apprécié les efforts de ce festival et de sa directrice d’inviter des poètes de la Méditerranée. La directrice de ce festival s’est toujours employée à faire entendre la voix des poètes palestiniens depuis 17 ans. Mais là nous estimons qu’il y a eu une erreur.
Notre intervention, qui n’avait rien d’agressif, avait pour but de dénoncer la colonisation. La réponse d’Eliaz Cohen montre que nous avions, malheureusement, eu raison de l’interpeller.
Voici Le tract diffusé :
Association France Palestine Solidarité 34
Sète-Bassin de Thau
afpssete@gmail.com afpsgl34@gmail.com www.france-palestine.org
AU NOM DE LA POÉSIE, FAUT-IL OUBLIER L’INJUSTICE ET L’OPPRESSION DONT SONT VICTIMES CERTAINS POÈTES INVITÉS PAR LE FESTIVAL VOIX VIVES ? FAUT-IL NOUS BERCER DE L’ILLUSION QU’ÊTRE POÈTE DONNE TOUS LES DROITS Y COMPRIS CELUI DE BAFOUER LE DROIT INTERNATIONAL ?
Voici l’histoire de deux poètes tous les deux invités des Voix Vives.
L’un nous vient d’un camp de réfugiés palestiniens en Jordanie, ses parents ont dû fuir devant les exactions de l’armée israélienne en 1948, il n’a jamais pu revenir en Palestine comme les quelques millions de réfugiés victimes de la Nakba, la catastrophe de l’expulsion, il s’appelle Walid ALSWAIRKI, et son cœur est lourd lorsqu’il ne peut accompagner sa femme palestinienne et habitant la Cisjordanie et leur fils de neuf ans pendant les vacances scolaires.
L’autre nous vient d’une colonie israélienne implantée en territoire palestinien, en Cisjordanie, dans l’illégalité puisque en contradiction avec les résolutions des Nations-Unies qui interdisent l’expropriation des paysans palestiniens. Si Elias COHEN est favorable à la coexistence entre les peuples palestinien et israélien, pourquoi remet-il en cause le partage des terres entre ces deux peuples tel que celui-ci a été défini en novembre 1947 par la résolution 181 de l’ONU ? Pourquoi se rend-il complice de l’occupation par Israël de terres qui ne lui appartiennent pas, du détournement des ressources en eau des villages palestiniens, de l’arrachage par les colons des oliviers plantés par les Palestiniens depuis des décennies sur leurs terres, de leur enfermement derrière un nouveau « mur de la honte », de l’apartheid qui leur est imposé ?
Lisons ensemble ces quelques strophes de « L’enfant réfugié » de cet autre poète palestinien « insurgé de la liberté », Mahmoud DARWICH, afin de ne pas oublier les souffrances d’hier et celles d’aujourd’hui et d’œuvrer ensemble pour qu’adviennent la justice et la liberté pour les Palestiniens où qu’ils se trouvent dans le monde !
« Racontez-moi mon pays, ce pays qui semble un rêve où se perd, où se noie l’horizon de ma vie. Parlez-moi des vignes accueillantes sans fin offertes au regard, de la terre généreuse fouaillée par les labours et d’où le vert toujours ressurgira… Le soleil danse de joie quand vient le temps de s’étendre sur elle et les oiseaux à sa vue accordent soudain leurs chants. Parlez-moi des nids au creux humide de l’arbre, malmenés par la saison qui les disperse aux quatre vents… du bruissement des mûriers dans la cour de la maison, du parfum enfin des mille et un aromates, ornements des hautes pentes de nos vivantes collines. Racontez-moi ! Car mon cœur est une aire vide. Ecoutez-le soupirer et languir de la caresse des épis ! Remplissez ce lieu absent d’histoires de mon pays : de ces histoires qui recèlent plus d’or encore que les chansons. Réveillez mon souvenir ! Et sachez qu’après un siècle, je ne me trouverai toujours pas rassasié par les rappels insistants de la mémoire… »
AFPS 34
Espace Martin Luther King
27 bd louis Blanc
34000 Montpellier
afpsgl34@gmail.com
afps34.wordpress.com
www.france-palestine.org