Pendant que des manifestations de joie éclataient dans la bande de Gaza juste après le retrait des troupes israéliennes [le 4 mars], le chef de l’aile radicale du Hamas [exilé à Damas], Mahmoud Al-Zahar, avait explicitement menacé l’Etat hébreu de représailles sur son territoire en réponse aux opérations des forces israéliennes. L’attentat d’hier [6 mars] contre une école talmudique de Jérusalem serait donc lié aux récentes incursions menées dans la bande de Gaza. Le Hamas n’a pas encore revendiqué la responsabilité de ce massacre [l’attentat a fait 8 morts] mais nous savons que l’organisation dispose de réseaux bien établis dans les quartiers arabes de Jérusalem et de ses environs [l’organisation a finalement revendiqué l’attentat dans l’après-midi du 7 mars].
Le terroriste responsable de l’attentat serait un habitant du quartier Jabel Mukaber, situé dans le sud-est de Jérusalem. On ignore encore s’il était membre du Hamas ou d’un autre groupe – il aurait même pu agir seul –, mais tous les soupçons se portent sur l’organisation extrémiste. Les membres du Hamas – ou de tout autre groupe terroriste palestinien – résidant à Jérusalem possèdent des cartes d’identité israéliennes et des plaques d’immatriculation israéliennes, de couleur jaune, qui leur permettent d’entrer librement en territoire israélien et dans les quartiers juifs qu’ils connaissent parfaitement.
Le fait qu’il s’agisse d’une fusillade semble également indiquer que cette attaque était dirigée depuis les quartiers arabes de Jérusalem, où les activités du Shin Bet [les services de renseignements israéliens] empêchent la création d’ateliers de fabrication de bombes, tels qu’il en existe en Cisjordanie. Outre son désir de vengeance, le Hamas est guidé par le besoin de pousser Israël à diminuer ses attaques et éviter une opération israélienne de grande envergure dans la bande de Gaza afin d’y conserver son influence. En ce moment, les chefs du Hamas s’efforcent de négocier un cessez-le-feu temporaire soutenu par une médiation égyptienne.
Mais le Hamas ne se contentera pas d’une simple trêve. Ses chefs veulent qu’Israël s’engage à mettre un terme aux pressions militaires et au siège de Gaza. Le Hamas pourrait ainsi crier victoire et renforcer son influence. Afin de pouvoir faire pression sur l’Egypte et Israël, le Hamas tente de créer une situation où il serait en position de force pour négocier un arrêt des combats. C’est pour cela que les tirs de roquettes se poursuivent sans relâche depuis la bande de Gaza et que l’organisation radicale monopolise toutes ses ressources et attise la colère de la population pour ouvrir un nouveau front en territoire israélien.
Le massacre de l’école talmudique, le récent attentat suicide de Dimona et les émeutes à Jérusalem-Est ces dernières semaines relèvent tous de cette stratégie. Mais ce n’est pas tout. Il faut s’attendre à ce que le Hamas tente dans les jours qui viennent de rallier les groupes armés de Cisjordanie, de Jérusalem-Est et d’autres mouvements islamistes présents en Israël afin d’organiser des violences massives, susceptibles de déboucher sur une troisième Intifada.
Il est également possible que le Hamas s’entende avec d’autres organisations palestiniennes, comme nous avons souvent pu le constater récemment, pour lancer des attaques coordonnées et "particulièrement efficaces". Le Djihad islamique pourrait, par exemple, lancer des tirs de roquettes contre Israël avec la bénédiction du Hamas.
Le plus urgent pour les forces de sécurité israéliennes est d’éviter l’éclatement de troubles massifs résultant des tensions exacerbées en Cisjordanie, à Jérusalem-Est et parmi les citoyens arabes israéliens. L’attentat de Jérusalem est considéré comme une grande victoire par les Palestiniens et pourrait inciter de nombreux jeunes dans les territoires et en Israël à s’en prendre aux forces de sécurité. Il faut également s’attendre à d’éventuelles émeutes ou actes de vengeance commis par des Juifs, poussés par la droite israélienne
Le gouvernement a le choix entre deux solutions. La première consisterait à accepter la proposition égyptienne négociée avec le Hamas pour s’entendre sur un cessez-le-feu. Cette trêve permettrait aux localités [israéliennes] proches de Gaza de souffler un peu et de rabaisser le niveau d’alerte antiterroriste en Israël. Mais dans le même temps, le Hamas pourrait se targuer d’une belle victoire et n’en sortirait que grandi, ce qui signifie que la prochaine vague d’attaques ne toucherait pas seulement Ashkelon mais aussi les habitants d’Ashdod et d’autres localités. Le Hamas victorieux pourrait également gagner des partisans en Cisjordanie et finir de discréditer ce qui reste du gouvernement de Mahmoud Abbas.
Une autre solution consisterait à rejeter les conditions du Hamas pour augmenter la pression militaire sur la bande de Gaza. Le Hamas pourrait ainsi être amené à revoir sa stratégie et à accepter les conditions d’Israël pour un cessez-le-feu. Mais avant cela, il faudra s’attendre à une multiplication des tirs de roquettes et une aggravation du risque d’attentat en Israël et dans les Territoires occupés.
Si le gouvernement opte pour cette seconde option, nous devrons nous préparer à une longue période de combats sur tous les fronts ainsi qu’à un possible ralliement du Hezbollah libanais au Hamas. C’est toute la ligne de front qui doit être prête, notamment dans le Sud, y compris à une possible évacuation des femmes et des enfants. Il nous faut également œuvrer au plan diplomatique pour faire comprendre les motivations d’Israël.