Jérusalem et la Cisjordanie ont été secouées lundi 5 octobre par de nouveaux heurts qui ont fait un mort côté palestinien. Le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, a déclaré dans une allocution télévisée qu’il ne poserait « aucune limite » aux forces de sécurité. Peu avant, l’armée et le Shin Beth, le service de sécurité intérieure, avaient annoncé avoir arrêté les cinq membres d’une « cellule » palestinienne soupçonnés d’avoir exécuté un couple de colons, jeudi dans le nord de la Cisjordanie, ainsi que plusieurs individus soupçonnés de les avoir aidés. Le groupe était « affilié au Hamas à Naplouse », selon les autorités israéliennes.
L’enchaînement de violences qui a suivi le mitraillage de ce couple dans leur voiture, sous les yeux de leurs quatre enfants, a réveillé le spectre d’une nouvelle Intifada. Samedi à Jérusalem, deux Israéliens ont été tués, et un troisième, blessé, dans deux attaques dont les auteurs palestiniens ont été abattus. Deux Palestiniens de 13 et 18 ans ont par ailleurs péri lors de heurts avec les soldats israéliens à Bethléem et à Tulkarem, en Cisjordanie, ces dernières vingt-quatre heures. Un autre jeune Palestinien était dans un état critique lundi soir après des accrochages à Jérusalem-Est.
« Nous ne sommes pas prêts à donner l’immunité à quiconque, à tout émeutier (…) ou tout terroriste », a martelé M. Nétanyahou lundi soir. Il a invoqué des incursions sans précédent, selon lui, des forces de sécurité dans les quartiers palestiniens de Jérusalem, les renforts annoncés de centaines de soldats en Cisjordanie et de milliers de policiers à Jérusalem. Il a également évoqué des mesures de rétorsion contre le Mouvement islamique.
Au lendemain de ce discours martial, Israël a entamé la démolition des maisons des familles de deux Palestiniens ayant mené des attentats l’année dernière à Jérusalem. Lundi, M. Nétanyahou a rappelé que les destructions de maisons des auteurs d’attentats ou de leurs familles seraient accélérées, même si ces mesures systématiques n’ont jamais eu d’effet dissuasif.
L’autorité palestinienne dépassée
M. Nétanyahou est soumis à la pression de membres de son gouvernement, l’un des plus à droite de l’histoire d’Israël, qui le critiquent explicitement. Jusqu’ici, dans son camp comme dans l’opposition travailliste, il est attaqué pour son manque d’efficacité, et non pour la ligne qu’il suit.
Le président palestinien, Mahmoud Abbas, a réuni lundi soir ses responsables de la sécurité. L’Autorité palestinienne se trouve placée devant un choix existentiel : la poursuite de la coordination sécuritaire avec les services israéliens, ou bien une logique de rupture, aux conséquences dramatiques. Berlin a exprimé sa vive inquiétude devant « quelque chose de comparable à une nouvelle Intifada ». Paris s’est dit inquiet du « risque d’une escalade dangereuse », et les Etats-Unis ont jugé « inacceptable » le recours à la violence de part et d’autre.
Les tensions ont coïncidé avec les trois semaines de grandes fêtes juives qui s’achevaient lundi soir. Elles se sont focalisées sur l’esplanade des Mosquées (le mont du Temple pour les juifs), troisième lieu saint de l’islam, où le Mouvement islamique s’est montré très actif.
Israël a entamé mardi la démolition des maisons des familles de deux Palestiniens auteurs d’attaques à Jérusalem l’an dernier. Un journaliste de l’AFP a constaté la démolition de la maison de Ghassan Abou Jamal dans le quartier de Jabal Moukabber sur les hauteurs de Jérusalem-Est. En novembre, avec son cousin Oudaï Abou Jamal dont la maison est accolée à la sienne, il avait tué cinq personnes dans une synagogue de Jérusalem-Ouest. Les deux cousins palestiniens avaient été abattus sur-le-champ et la démolition des maisons de leur famille avait été ordonnée.
Toujours dans le quartier de Jabal Moukabber, l’armée israélienne a annoncé avoir également détruit la maison de la famille de Mohammed Jaabis, accusé d’avoir commis en août 2014 une attaque à la pelleteuse contre un bus à Jérusalem et abattu immédiatement également. En outre, selon un communiqué de l’armée, les forces de sécurité ont scellé une pièce de la maison de la famille de Moataz Hijazi, dans le quartier d’Al-Thori, à Jérusalem-Est. Ce Palestinien avait tiré il y a près d’un an sur Yehuda Glick, une des figures de proue des juifs militant pour le droit des juifs à prier sur l’esplanade des Mosquées. M. Glick a réchappé à cette tentative d’assassinat. Le lendemain, M. Hijazi avait été abattu à son domicile et un ordre de démolition de la maison de sa famille avait été délivré.
Israël a déjà pris une disposition exceptionnelle et peut-être inédite en interdisant dimanche et lundi l’accès de la vieille ville à l’immense majorité des quelque 300 000 Palestiniens de Jérusalem-Est qui n’y vivent pas. La vieille ville était surtout parcourue par des touristes déambulant dans les ruelles où des barrages gardés par des centaines de policiers avaient été dressés.
Après la mort du Palestinien de 13 ans à Bethléem, environ 300 jeunes ont attaqué à coups de pierre les soldats israéliens, qui ont riposté par des tirs de gaz lacrymogènes, de projectiles caoutchoutés et, comme de plus en plus systématiquement désormais, à balles réelles.
Des heurts ont en outre éclaté près de Ramallah, à Hébron et dans le camp de réfugiés de Jalazoun, en Cisjordanie. Les heurts sont désormais réguliers autour de la colonie de Beit El, alors que les représailles de colons contre les Palestiniens se multiplient.