Ehud Olmert a réussi son mandat. Le Premier ministre israélien, qui vient de démissionner à la suite de scandales financiers, aurait même réussi un sans faute, s’il n’y avait l’échec de l’agression contre le Liban en 2006. Sur tous les autres dossiers, il a eu un parcours presque parfait, ce qui n’est guère le cas de ses interlocuteurs palestiniens, en particulier ceux qui assument les plus hautes responsabilités, Mahmoud Abbas et Ismaïl Hanieh.
Pourtant, Ehud Olmert est arrivé au pouvoir par accident. Après une carrière politique moyenne, parfois médiocre, cet homme plutôt terne, sans aura, avait plutôt brillé par son aptitude à obéir et à se montrer docile. C’est d’ailleurs, en suivant Ariel Sharon, alors Premier ministre, qu’il a réussi à forcer les portes du pouvoir, après avoir tenté l’aventure de la création d’un parti dit centriste. Ariel Sharon malade, Ehud Olmert s’est trouvé propulsé au pouvoir par défaut. Ce qui ne l’a pas empêché de remplir son mandat. Comme tous ses prédécesseurs, il a poursuivi la guerre tout en tenant un discours de paix. Il a créé de nouvelles colonies dans les territoires occupés, tout en parlant de retrait. Il a tué autant, sinon plus de Palestiniens, que les autres chefs de gouvernement israéliens. Il a créé autant de drames et de désagréments pour les Palestiniens. Et après l’échec de l’aventure libanaise, il a accepté la critique et a engagé les changements nécessaires qui permettent au système politique israélien de rester très performant.
Au plan externe, il a su préserver le soutien inconditionnel des Etats-Unis, tout comme il s’est acquis les faveurs de l’Europe, malgré la sympathie grandissante des sociétés européennes envers les Palestiniens. Il a également maintenu les liens établis par Israël dans le monde arabe, comme il a confirmé la percée israélienne dans certains pays traditionnellement favorables aux Palestiniens, comme l’Inde et en Amérique Latine. Dans les négociations avec les Palestiniens, son bilan est encore meilleur. Il a mené Mahmoud Abbas par le bout du nez pendant trois ans. Faisant semblant de négocier, et affichant les larmes de circonstance en évoquant les sacrifices qu’Israël serait prêt à faire pour obtenir la paix, il a fait traîner les choses en longueur, avec la complicité américaine, tout en imposant un fait accompli terrible pour les Palestiniens. Il a fait oublier la promesse de George Bush d’établir un Etat palestinien en 2005. Il a vendu suffisamment d’illusions aux Palestiniens pour les neutraliser complètement.
Pour un homme arrivé au pouvoir juste pour assurer un intérim à la suite de la maladie de Ariel Sharon, le bilan est éloquent. A l’inverse de celui des Palestiniens, qui se rendent compte, avec la démission de Ehud Olmert, qu’ils doivent tout recommencer à zéro, dans des conditions encore plus difficiles. Sur le seul chapitre des négociations, ils doivent tout reprendre depuis le début, en raison de l’avènement d’une nouvelle administration américaine et d’un nouveau gouvernement israélien. Toutes les illusions de M. Mahmoud Abbas sont donc parties en fumée. Pour les Palestiniens, l’image est ainsi inversée.
Mahmoud Abbas s’est englué dans des négociations sans fin et sans utilité avec des dirigeants israéliens rompus à ce genre d’exercice. Alors que ses adversaires disposent d’institutions, de spécialistes et d’équipes très performantes, lui-même continue d’improviser et de fonctionner de manière empirique, donnant à sa démarche une allure suicidaire.
Ses concurrents du Hamas n’ont pas fait mieux. Emportés par une rhétorique creuse, ils ont réussi là où Israël a longtemps échoué : casser l’unité nationale palestinienne. Après avoir remporté les élections générales en Palestine de manière démocratique, le Hamas a s’est rapidement laissé emporter par une tendance démagogique destructrice. Ses combattants multiplient les parades grotesques et les déguisements de circonstance, pour engager le combat contre les militants du Fatah. Et ce qui devait être une guerre contre l’occupant israélien s’est transformé en une guerre civile inter palestinienne [1].(...)