Dans les couloirs, des femmes africaines vêtues de robes très colorées, des femmes voilées, des hommes coiffés de kippa. En présence du Secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon et de la Haut-commissaire aux droits de l’homme, le sommet se déroule dans une salle des assemblées archi-pleine. La présence médiatique a rarement été aussi forte. La Conférence d’examen de Durban s’ouvre toutefois sans la participation de plusieurs Etats occidentaux : les Etats-Unis, le Canada, l’Australie, les Pays-Bas, l’Italie et l’Allemagne. Israël boycotte également le rendez-vous. Face à cette débandade, la réaction désolée de Julie de Rivero .
Le Temps : Comment interprétez-vous le retrait de plusieurs Etats occidentaux de Durban II ?
Julie de Rivero : Ces retraits me sont totalement incompréhensibles. Toutes les demandes des Européens ont été prises en compte lors des négociations. Le texte de déclaration est aujourd’hui solide et sert clairement la cause de la lutte contre le racisme. De plus, ce projet de déclaration est un refus clair du concept de diffamation des religions. Il montre que ce concept n’a pas obtenu de consensus international et qu’il n’a pas sa place au sein des Nations unies.
Quels sont les autres mérites de ce texte, qui fait autant polémique ?
– Au cours des négociations, les Etats ont réussi à enlever la question du conflit israelo-palestinien, un thème qui avait terni la Conférence de Durban en 2001. C’est une chance de dépasser les problèmes connus en Afrique du Sud. Le présent texte est une reconnaissance que la question d’Israël était trop polémique pour être inscrite dans le document.
Qu’en est-il de la liberté d’expression ?
– Le projet de déclaration la renforce, car il dit que c’est le meilleur moyen de combattre le racisme. Le retrait de certains Etats occidentaux est irresponsable. C’est une manière de se tirer une balle dans le pied. Par rapport au Conseil des droits de l’Homme, le consensus trouvé entre le monde musulman et les Occidentaux est remarquable. En se retirant, certains Etats ratent une occasion énorme d’établir des ponts. Ils alimentent la désinformation sur la vraie nature du projet de déclaration.
Quel impact auront ces retraits sur le déroulement de la Conférence ?
– On entoure désormais la Conférence d’une polémique. C’est navrant. On avait pourtant une chance unique d’obtenir un consensus global sur la lutte contre le racisme, qui aurait consolidé l’ONU.
Que pensez-vous de la présence du président iranien Mahmoud Ahmadinejad, connu pour ses dérapages à propos d’Israël ?
– C’est évidemment quelqu’un qui divise. Mais plutôt que d’appliquer la politique de la chaise vide, c’est à nous de lui poser des questions ,lors de cette Conférence, sur le respect des minorités religieuses, sur le racisme et sur la liberté d’expression en Iran. S’il a des propos inacceptables, c’est à chaque Etat de réagir. Il est absurde de lier le résultat de la Conférence aux propos du président iranien. J’ajouterai que c’est donner beaucoup d’importance au personnage. Dans les négociations, l’Iran a été marginalisé sur la question de la diffamation des religions et sur la question de l’Holocauste.
Qu’espérez-vous désormais pour ce sommet ?
– J’espère que les Etats qui sont présents vont rester et qu’ils vont émettre un message fort contre le racisme. Si d’autres Etats occidentaux se retirent, on peut alors se poser la question sur l’engagement des Occidentaux à combattre le fléau du racisme. Ce serait d’autant plus étonnant que ce sont eux qui tiennent le plus aux droits de l’homme