« Nous ne permettrons pas aux organisations terroristes de fixer l’ordre du jour d’Israël, et nous ne permettrons à personne de mettre en danger nos ressortissants ». C’est le ministre israélien de la Défense Shaoul Mofaz qui parle ainsi, suite à de nouvelles opérations de ses unités dans la bande de Gaza répondant à des tirs palestiniens contre les colonies juives, répondant eux-mêmes à des « assassinats ciblés de l’armée israéliennes ». Ce regain de violence met à mal une trêve globalement respectée depuis le 21 janvier dernier. Israéliens et Palestiniens sont néanmoins convenus d’assurer le maintien de cette trêve et de maintenir le principe d’une rencontre prochaine entre le Premier ministre Ariel Sharon et le président palestinien Mahmoud Abbas.
Mais davantage que les alternoiements du terrain, c’est bien la bataille politique du retrait de Gaza qui bat désormais son plein. Côté israélien, les ultras n’ont pas renoncé à perturber, sinon à bloquer ce retrait qui devrait commencer en août prochain. Natan Charantski qui a démissionné, le 2 mai dernier, de son poste de ministre des Affaires de la diaspora effectue actuellement une tournée aux Etats-Unis pour susciter l’opposition au retrait des grandes organisations juives américaines. Et le Shin Beth - le service israélien de sécurité intérieure - fait état de ses craintes de voir émerger un « terrorisme juif ». Si le danger est bien réel, chacun garde en mémoire l’assassinat d’Itzak Rabin, le contexte est néanmoins très différent.
« Militairement et stratégiquement, le retrait de Gaza n’est pas une opération complexe », précise un attaché militaire européen en poste à Tel-Aviv, « et les enjeux actuels n’ont rien à voir avec ceux des accords d’Oslo, c’est à dire d’un plan de paix global ».
Le cabinet Sharon lui-même ne cesse de dramatiser le retrait, répétant que ce sacrifice territorial pousse l’Etat hébreu au bord de la guerre civile et qu’il sera la dernière des dernières concessions. En voulant ainsi imposer le retrait de Gaza comme un plan global et final, dissocié de la Feuille de route, fixant pourtant le retrait israélien de Cisjordanie aussi, le gouvernement Sharon prend le risque d’un nouvel embrasement. Et plusieurs responsables israéliens ont, d’ores et déjà, averti qu’une victoire du Hamas lors des prochaines élections législatives palestiniennes de juillet pourraient, tout simplement remettre en cause le retrait de Gaza, lui-même.
La balle est désormais dans le camp du Quartet - Etats-Unis, Russie, ONU et Union européenne - pour faire entendre raison à Tel-Aviv sur deux points essentiels : tout d’abord sur la préparation d’un retrait de Gaza qui ne pourra s’effectuer positivement qu’en concertation avec les Palestiniens ; ensuite sur l’articulation de ce retrait avec la mise en œuvre de la Feuille de route seule perspective pour rêver à nouveau d’une paix globale au Proche-Orient.