Depuis 1967, Israël occupe sans titre le territoire de la Palestine. Cette occupation militaire
prolongée est régie juridiquement par les Conventions de Genève de 1949. La 4è de ces
Conventions prévoit expressément à son article 49 :
"La puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert
d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle".
Ainsi les colonies de peuplement israéliennes sont-elles illégales en droit international. Cela a
été confirmé par de très nombreuses résolutions du Conseil de sécurité, parmi lesquelles la
Résolution 298 du 25 septembre 1971 et encore la Résolution 446 du 22 mars 1979, aux
termes desquelles le Conseil :
« ….Considère que la politique et les pratiques israéliennes consistant à établir des
colonies de peuplement dans les territoires palestiniens et autres territoires arabes
occupés depuis 1967 n’ont aucune validité en droit et font gravement obstacle à
l’instauration d’une paix générale, juste et durable au Moyen-Orient ;…….
[…]
3. Demande une fois encore à Israël, en tant que Puissance occupante, de respecter
scrupuleusement la Convention de Genève relative à la protection des personnes
civiles en temps de guerre, du 12 août 1949,….. de ne pas transférer des éléments de
sa propre population civile dans les territoires arabes occupés ».
En revanche, les citoyens conscients de l’importance d’une application démocratique des
règles du droit international au bénéfice et pour la sécurité de la communauté internationale
tout entière, ont cherché légitimement comment contraindre Israël et l’ensemble des États à
un respect de normes piétinées depuis des décennies. Une occasion leur a été offerte par la
question des produits exportés pour le compte d’Israël. En effet, les produits en provenance
des colonies de peuplement en peuvent en aucun cas être assimilés à des produits fabriqués en
Israël et favoriser le commerce et la croissance de cet État, alors qu’ils se développent sur des
terres usurpées en violation grossière de la 4è convention de Genève.
De surcroît, l’Union
Européenne a accordé aux produits en provenance d’Israël des avantages tarifaires qui
résultent de l’accord d’association UE/Israël. Non seulement, la plupart des États, notamment
européens, ferment les yeux sur l’entrée des produits des colonies de peuplement illégales
comme produits venant d’Israël, mais, de plus, ils laissent leurs services appliquer à ces
produits des avantages douaniers indus.
Heureusement, suite à la vigilance d’un service douanier allemand, la question a été
récemment soulevée et portée devant la Cour de Justice de l’Union européenne. La
clarification apportée par la Cour est de la plus haute importance (CJUE, 25 février 2010,
aff. C-386, Firma Brita GmbH). Rappelant que les dispositions tarifaires ne pouvaient
s’appliquer qu’à des produits entièrement obtenus en Israël, la Cour considère « que les
produits obtenus dans des localités qui sont placées sous administration israélienne
depuis 1967 ne bénéficient pas du traitement préférentiel défini dans cet accord »
(paragraphe 64 de l’arrêt).
Nous avons là une confirmation de la nécessité de développer une action légitime pour
nous opposer à la violation du droit international par Israël et au silence complice des
autres États.
C’est pourquoi nous sommes nombreux à exiger d’Israël qu’il se retire complètement de
toutes les colonies illégalement implantées et à appeler les citoyens à être vigilants en
mettant leurs comportements en conformité avec les prescriptions du droit international,
par le refus d’acheter les produits en provenance des colonies. Cette action n’est
évidemment pas assimilable à de la discrimination commerciale (interdite par le Code
pénal), puisqu’il ne s’agit pas de s’opposer à la vente de produits d’Israël, mais à celle de produits illégalement fabriqués par Israël sur des territoires ne relevant pas de sa
souveraineté.
C’est pourquoi je me réjouis que Stéphane Hessel, personnalité aussi
charismatique qu’indiscutable, se soit engagé dans ce combat. C’est pourquoi j’invite tous
ceux qui veulent la paix par le droit, à suivre ce mouvement.
Ceux qui refusent cette action ou qui la contestent sont complices de violations graves du
droit international humanitaire.
Monique Chemillier-Gendreau,
Professeur émérite de droit public et de science politique.
La Cour Internationale de Justice dans l’avis rendu le 9 juillet 2004 à propos du mur
construit par Israël confirme :
« que les colonies de peuplement installées par Israël dans le territoire palestinien (y
compris Jérusalem Est) l’ont été en méconnaissance du droit international »
(paragraphe 11 de l’avis de la C.I.J. du 9 juillet 2004).
Cette grave illégalité est poursuivie par Israël dans le silence complaisant de bien des acteurs
de la communauté internationale.