« Je ne démissionnerai pas. » A quelques heures de la publication du rapport final de la commission Winograd [1] chargée d’enquêter sur l’échec de la guerre du Liban en été2006, Ehoud Olmert a confirmé qu’il ne céderait pas sa place même s’il « tire les leçons des erreurs passées ». Dans la foulée, ses conseillers ont fait savoir qu’il n’y aurait pas non plus d’élections anticipées en 2009 (la législature se terminant en 2010), comme le souhaite une frange grandissante de députés.
Le 30 avril 2007, le président de commission Eliahou Winograd a déjà pointé du doigt le manque d’expérience d’Ehoud Olmert et de son ministre de la Défense de l’époque, Amir Peretz, ainsi que la désorganisation de l’armée.
Précédentes démissions
Le général chargé des opérations au Liban avait démissionné dès la fin du conflit. Il a été suivi par le chef de l’état-major, Dan Haloutz, puis par Amir Peretz, qui a, de ce fait, également abandonné la présidence du Parti travailliste. Quant à Ehoud Olmert, son indice de popularité a plongé pour atteindre le record historique de 2,5%.
Certes, huit mois plus tard, le premier ministre a retrouvé une petite santé politique puisque sa cote de confiance frôle les 20%. En outre, contrairement à ce qui s’était passé lors de la publication du rapport intermédiaire, il bénéficie du soutien d’éditorialistes importants ainsi que du mouvement La paix maintenant pour lesquels il serait « irresponsable » de le faire tomber au moment où le dialogue reprend avec les Palestiniens. Quant au très influent rabbin Ovadia Yossef, le leader spirituel du parti religieux orthodoxe Shas, il vient de lui accorder sa bénédiction publique.
De son côté, le nouveau ministre de la Défense et président du Parti travailliste, Ehoud Barak, affirme « vouloir prendre son temps » avant de décider s’il provoquera ou non la chute du gouvernement. Pourtant, durant la campagne qui devait l’amener à succéder à Amir Peretz, l’ex-général avait promis que son parti rejoindrait l’opposition à la fin des travaux de la commission. Mais Ehoud Barak semble tenir à son prestigieux fauteuil. Il évoque « les dangers qui menacent le pays » pour expliquer son peu d’empressement à démissionner.
Colère des familles
Pour l’heure, seuls les familles de soldats morts au combat et les rescapés du conflit exigent encore la tête de leur premier ministre. Après avoir publié un rapport alternatif, ils multiplient d’ailleurs les pétitions. Seront-ils suivis ? « Dans son document final, la commission Winograd examine les soixante dernières heures de la guerre. Elle veut savoir pourquoi Ehoud Olmert a autorisé une offensive terrestre visant à conquérir le Sud-Liban alors qu’il s’y était opposé pendant un mois, que la secrétaire d’Etat (américaine) Condoleezza Rice exerçait des pressions pour qu’Israël ne se lance pas dans cette aventure, et que les membres du Conseil de sécurité s’étaient déjà mis d’accord sur les termes d’un cessez-le-feu entrant en vigueur le 14 août 2006 », explique le chroniqueur Yoav Krakovsky. « En fait, la commission veut savoir comment 33 soldats israéliens sont tombés durant cette opération. S’il s’avère qu’ils sont morts pour rien, le premier ministre ne pourra pas rester au pouvoir. »
Sa démission ne provoquerait cependant pas automatiquement des élections anticipées puisque le Kadima (le parti le plus important de la majorité) pourrait se voir confier par le président Shimon Peres le soin de rechercher un autre premier ministre dans ses rangs. Deux noms sont d’ores et déjà sur toutes les bouches : ceux de la ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, et du « faucon » Shaoul Mofaz.