Ce voyage, Benoît XVI n’en méconnaissait certes pas les aléas, lui qui porte telle une inamovible couronne d’épines un passé pour le moins controversé : véritable aubaine pour les extrémismes de tous bords, se rejoignant, pour des motifs divers, dans une même et discourtoise animosité envers l’homme en blanc. On n’a pas oublié ici en effet - et on n’a pas manqué de le faire savoir à l’intéressé - le fameux discours de Ratisbonne de 2006, dans lequel le souverain pontife paraissait associer islam et violence. Et là, c’est le passé hitlérien attribué au pape que l’on a ressassé à l’envi malgré les dénégations répétées du Vatican, malgré son horreur de la Shoah qu’il formulait à peine descendu d’avion, malgré l’étape obligée au mémorial de l’Holocauste.
Il n’est guère surprenant dès lors (il est regrettable en revanche) que ce pèlerinage n’ait trouvé sa pleine expression que parmi les chrétiens de ces lieux qui ont vu naître, vivre et mourir le Christ. En les adjurant de s’accrocher à leur terre, le pape a traduit sa préoccupation face au harcèlement, tantôt sanguinaire et tantôt sournois, dont sont victimes, depuis des années, les chrétiens d’Orient : ceux d’Israël, et plus particulièrement de Jérusalem, que l’on pousse systématiquement, à force de tracasseries, à l’émigration, mais aussi ceux d’Irak que l’on trucide, ou encore les coptes d’Égypte en butte à mille tribulations et astreintes.
Un autre moment fort de ce voyage aura été ce message d’espérance lancé au pied du mur édifié par les Israéliens en Cisjordanie : tous les ouvrages de ce genre, lesquels n’ont d’autre destination que de séparer les hommes, peuvent un jour être abattus. Il parlait en connaissance de cause, cet Allemand dont le pays s’est trouvé divisé durant près d’un demi-siècle. Pour que s’effondrent les murs cependant, encore faut-il que changent, en même temps que les paramètres géopolitiques, les esprits.
Notre pays serait-il donc le seul où ne cessent de valser les premiers sans qu’évoluent les mentalités, le seul où l’on ne songe qu’à édifier mur après mur ? L’Amérique n’est plus le Grand Satan, vient de décréter l’Iran, libérant pour le coup la journaliste Roxana Saberi détenue pour espionnage. Et après la pause que commandait la guerre de Gaza, Bachar el-Assad a recours aux bons offices du roi de Jordanie pour inciter (ou inviter ?) Israël à une reprise des pourparlers indirects de paix. Dans le même temps, au Liban, c’est le président de consensus que l’on invective parce qu’il a tenté de mettre au vote, en Conseil des ministres, les nominations des hauts fonctionnaires, parce qu’en ce faisant, il a mis en lumière les effets pervers du tiers de blocage. C’est un scandaleux butin que l’on exige en outre, en échange de l’adoption du budget national : des juges partisans, de juteuses caisses de secours aux sinistrés - sous prétexte de panier complet. Amère cerise sur le peu engageant gâteau, Hassan Nasrallah n’a pas caché enfin, dans son discours d’hier, sa prétention à gouverner, seul au besoin, le pays, au motif qu’il a vaincu l’armée israélienne !
Ce sont des murs, encore des murs, que l’on brandit en guise de programme, que l’on nous propose pour tout horizon. Aux électeurs, il incombera de récuser la sinistre maçonnerie.