Si le Hamas parvient à envoyer 250 000 Israéliens se réfugier dans les abris antiaériens, il ne peut que crier victoire. Si, lors de nos représailles, nous tuons des enfants et des civils, le Hamas est encore vainqueur. Et, en bout de course, si nous mettons sur pied une commission d’enquête, c’est pour nous une troisième défaite. Le Hezbollah avait très bien compris cette doctrine des trois étapes. Désormais, c’est au Hamas de la mettre en application. Comment nous en sortir ? Tout simplement en adoptant une approche radicalement différente.
Par le passé, qui est toujours sorti vainqueur d’une guerre ? Celui qui est venu avec des inventions et les a mises en application sur le champ de bataille, que l’on songe à des découvertes comme la poudre à canon, le char d’assaut ou la bombe atomique. En d’autres mots, le vainqueur est celui qui change la situation présente et rebat les cartes, celui qui parvient à introduire de l’inédit dans une guerre.
Tsahal est tout à fait en mesure de détruire la totalité de la bande de Gaza, mais elle ne le fera pas, tout simplement parce que nous ne pouvons pas assassiner la population civile. Le Hamas tire évidemment avantage d’une telle situation en se servant cyniquement de la population de Gaza comme d’un bouclier. Les vieux, les femmes et les enfants fournissent une profondeur stratégique aux chefs terroristes. Sans les masses palestiniennes, le terrorisme ne pourrait survivre.
Alors, voici quelques idées qui pourraient être utilisées par Tsahal. Chaque fois qu’une roquette sera tirée, Israël répliquera contre la population civile, mais sans user de moyens létaux. Des canons arroseront l’ensemble de la bande de Gaza de gaz lacrymogènes, et ce à intervalles de plus en plus rapprochés. Des haut-parleurs géants diffuseront des bruits terrifiants de sirènes d’alarme, d’explosions et de cris stridents, toutes les dix puis quinze minutes, puis toutes les heures. On pourrait aussi y inclure de la musique israélienne, des refrains du style “C’est la faute au Hamas”, exactement comme un gigantesque lavage de cerveau, en augmentant chaque fois un peu plus les décibels, de façon à empêcher toute vie normale.
Pendant les grands rassemblements palestiniens, des avions arroseraient les militants du Hamas de peinture rouge. Et le monde s’interrogerait : pourquoi de la peinture rouge ? Tout simplement pour que notre système d’alerte antibalistique Tzeva Adom [“Couleur rouge”] et le sort de Sderot et d’Ashkelon [villes israéliennes qui reçoivent les roquettes du Hamas] fassent enfin la une de la presse internationale. Il faudrait évidemment compléter le tout par un désengagement réellement complet de Gaza, c’est-à-dire couper définitivement l’approvisionnement de Gaza en carburant – qui est livré par une société israélienne – et cesser les transferts mensuels d’argent liquide. Il ne faudrait pas plus de dix jours de ce traitement pour que les habitants de Gaza, épuisés de ne pas avoir dormi, les yeux brûlés par les gaz lacrymogènes, les oreilles sifflantes et les vêtements souillés de peinture rouge, empêchent de leurs propres mains les tirs de roquettes sur l’Etat hébreu. Personne ne pourrait plus accuser Israël. Il serait évident que c’est le Hamas qui, en tirant des roquettes sur nous, a déclenché un cortège de mesures absurdes dont seule sa population fait les frais.
Guy Bekhor
Yediot Aharonot