A l’époque où il était Premier ministre, Yitzhak Rabin ne manquait jamais une occasion de rappeler à quel point il était important de trouver une solution au conflit israélo-palestinien avant que l’Iran ne possède des armes nucléaires. Rabin était convaincu que la fin de l’occupation israélienne et la signature d’un accord de paix avec la Syrie et le Liban permettraient d’isoler le régime de Téhéran et d’affaiblir le Hamas et le Hezbollah.
A en croire le porte-parole de Benyamin Nétanyahou, l’actuel Premier ministre estime que le programme nucléaire et les activités terroristes de l’Iran sont prioritaires par rapport à la reprise des négociations avec les Palestiniens. De son point de vue, l’initiative de paix saoudienne [lancée en l’an·2000 pour régler le conflit israélo-arabe], en attente d’interlocuteur israélien depuis sept ans, peut encore patienter. L’administration Obama a déjà proposé l’ouverture de négociations directes avec Téhéran. Le ministre des Affaires étrangères iranien, Manouchehr Mottaki, a déclaré, le 18·avril, que si l’administration américaine changeait d’attitude à l’égard de l’Iran et traduisait ses paroles en actes, le gouvernement iranien pourrait également revoir certaines de ses positions. Sans doute faisait-il allusion à un changement de point de vue américain sur la question de l’occupation israélienne.
Voici une conversation imaginaire entre Manouchehr Mottaki et la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton, au lendemain d’une rencontre entre Barack Obama et Benyamin Nétanyahou.
Hillary Clinton Tout d’abord, reconnaissons tous que nous devons respecter les résolutions des Nations unies· ?
Manouchehr Mottaki Ai-je bien entendu· ? Vous avez bien dit "tous"· ? Je pense que vous connaissez l’existence de la résolution·1397 du Conseil de sécurité de l’ONU, initiée par votre ancien président, George W.·Bush, il y a de cela sept ans. Elle confirme le soutien des Nations unies en faveur d’une solution à deux Etats, Israéliens et Palestiniens vivant en paix, côte à côte. Au fait, vous vous souvenez de l’engagement pris par Ariel Sharon, il y a six ans, pour démanteler toutes les colonies illégales· ? Peut-être ne savez-vous pas ce qui est arrivé au rapport rédigé par l’employée du bureau du procureur d’Etat israélien, celui qui disait que la plupart de ces colonies étaient situées sur des propriétés privées appartenant à des Palestiniens· ? J’ai regardé dans les rapports annuels israéliens : depuis les accords d’Oslo [1993], le nombre de colons est passé de 110·000 à 280·000. Et c’est sans compter ce qu’ils appellent les "nouveaux quartiers" de Jérusalem-Est.
Clinton Ce serait plus facile pour nous si vous respectiez le traité international sur la non-prolifération des armes nucléaires.
Mottaki Pourquoi est-ce que vous vous acharnez sur nous alors vous ne dites rien du refus israélien de signer ce traité· ? Vous savez aussi bien que moi ce que font les Israéliens sur le site nucléaire de Dimona.
Clinton Mais les Israéliens ne disent pas qu’ils veulent faire disparaître l’Iran de la surface de la Terre. D’ailleurs, pendant qu’on y est, vous devriez peut-être dire à votre président d’arrêter de nier l’Holocauste.
Mottaki Quand vous verrez mon homologue israélien, Avigdor Lierberman [le ministre israélien d’extrême droite], demandez-lui ce qu’il pense du barrage d’Assouan [il avait menacé de détruire le barrage] et quel est le prochain dirigeant arabe qu’il projette d’exécuter. Pendant que nous parlons de guerre, les Israéliens en ont mené plusieurs. Même leur grand ami, George Bush, a estimé que les attaques dirigées contre les populations civiles de Gaza et du Liban étaient allées trop loin. Et qu’en est-il du plan de paix saoudien proposant une normalisation des relations en échange de territoires· ? Quant aux propos d’Ahmadinejad sur l’Holocauste, j’ai entendu le professeur israélien Mme Hannah Yablonka dire que la comparaison faite par Lieberman entre les députés arabes de la Knesset et les collaborateurs à l’époque nazie ne faisaient que dénaturer la réalité de l’Holocauste.