Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, lors de son discours devant l’Assemblée générale des Nations unies, mardi 1er octobre.
Benyamin Nétanyahou ne s’est jamais montré aussi déterminé à utiliser, si besoin est, la force militaire pour détruire le potentiel nucléaire de l’Iran que lors de son discours devant l’Assemblée générale des Nations unies, mardi 1er octobre, mais jamais non plus le premier ministre israélien n’a semblé aussi isolé. Il y a encore un an, ses propos très martiaux auraient provoqué une vague d’anxiété au sein de la communauté internationale, toujours inquiète des répercussions économiques que ne manquerait pas de provoquer une crise majeure au Proche-Orient.
Si M. Nétanyahou apparaît aujourd’hui comme un prophète de malheur, c’est que son auditoire veut croire aux perspectives ouvertes par le début de détente diplomatique qui s’instaure entre les Etats-Unis et l’Iran. "Israël n’acceptera jamais qu’un Etat voyou qui a menacé à plusieurs reprises de nous rayer de la carte possède des armes nucléaires. Face à une telle menace, Israël n’aura d’autre choix que de se défendre seul. Je veux qu’il n’y ait aucun doute à ce sujet : si Israël est forcé d’agir seul, il agira seul", a martelé le premier ministre israélien.
Lundi, lors de son entretien avec le président Barack Obama, M. Nétanyahou avait paru se contenter de la réaffirmation de son hôte selon laquelle, face à l’Iran, "toutes les options sont sur la table", un code diplomatique pour signifier que le recours à des frappes militaires est envisagé. Il s’agissait alors de sauvegarder le caractère consensuel de cette visite à la Maison Blanche, lequel a souvent fait défaut dans le passé. Le vice-président américain Joe Biden avait réaffirmé qu’un Iran doté de l’arme nucléaire représenterait "une menace existentielle pour Israël et un danger inacceptable pour la paix mondiale" et ses propos allaient dans le sens de ce que souhaitait entendre M. Nétanyahou.
SEULE PUISSANCE NUCLÉAIRE AU PROCHE-ORIENT
Son discours à l’ONU montre qu’ils n’étaient pas suffisants. Le premier ministre israélien a voulu prendre date, et signifier que si les Etats-Unis faisaient preuve d’atermoiement face à un Iran proche du "seuil" nucléaire, Israël, lui, saura prendre ses responsabilités. Pour deux raisons : parce qu’une bombe iranienne représenterait une incontestable menace pour sa survie, et aussi – même si ce n’est pas revendiqué officiellement –, parce que l’Etat juif n’entend pas renoncer à son double statut de première puissance régionale et de seule puissance nucléaire au Proche-Orient.
Pour autant, M. Nétanyahou est obligé de tenir compte d’une nouvelle donne diplomatique : comme il admet que les sanctions contre Téhéran jouent un rôle positif (les Israéliens revendiquent en avoir été à l’origine en ne cessant d’alerter sur le danger du programme nucléaire iranien), il accepte le principe du dialogue avec le président iranien Hassan Rohani, à condition que les sanctions ne soient pas allégées prématurément, et surtout qu’elles soient renforcées – comme pour la Syrie –, par la menace de l’utilisation de la force.
Le problème de M. Nétanyahou est que si son discours aux connotations très va-t-en-guerre est bien perçu par son parti, le Likoud, et par l’ensemble de la droite israélienne, il apparaît très décalé, presque anachronique, pour ceux qui, en Israël comme dans la plupart des chancelleries occidentales, se refusent à cette comparaison messianique entre le régime iranien et Amalek, l’ennemi juré du peuple juif dans la Bible.
HASSAN ROHANI VOLE LA VEDETTE À M. NÉTANYAHOU
L’assistance clairsemée présente dans l’hémicycle a montré éloquemment que, pour la plupart des Etats membres de l’ONU, la tonalité belliciste – sans surprise – du discours de M. Nétanyahou n’était pas, pour cette année au moins, pertinente : Hassan Rohani avait volé la vedette au premier ministre israélien.
Son intervention n’en a pas moins été très révélatrice des priorités du gouvernement israélien. M. Nétanyahou a consacré plus de vingt-cinq minutes à l’Iran, et moins de deux minutes au processus de négociations en cours avec les Palestiniens, et ce pour réitérer, de façon rituelle, la volonté d’Israël d’aboutir à un "compromis historique" avec Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne, quitte à accepter pour cela des "concessions douloureuses".
Sauf que la distance semble toujours aussi grande entre les paroles et les actes, à en juger par les rares informations qui filtrent des négociations en cours : les responsables palestiniens constatent que leurs homologues israéliens insistent sur les mesures devant garantir la sécurité de l’Etat juif, tout en se refusant à aborder la question essentielle des frontières du futur Etat palestinien.