La prise de position politique de la municipalité de Bezons pour la reconnaissance de l’Etat palestinien ne semble pas être du goût de l’Etat. La sous-préfète d’Argenteuil, Martine Clavel, a adressé un recours gracieux au maire (PCF) lui demandant d’annuler une délibération votée en conseil municipal le 14 février dernier. Cette dernière, votée à la majorité, concernait la reconnaissance de la Palestine et définissait cet Etat sur les frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale et l’exercice du droit au retour pour les réfugiés, allant dans le sens des résolutions de l’ONU.
D’après la préfecture, « cette délibération est étrangère à tout intérêt communal (article L1111-2 du code général des collectivités territoriales), intervient dans le domaine international et ne relève pas de la compétence du conseil municipal ».
Le maire ira en justice s’il le faut
« La raison évoquée sur le fait qu’une collectivité n’a pas à s’occuper de politique internationale est une raison ridicule dans la mesure où nous nous occupons des questions internationales à travers nos différents jumelages avec la Palestine mais aussi le Maroc, la Hongrie, le Portugal », regrette Dominique Lesparre.
L’édile précise également qu’il est « hors de question » de retirer cette délibération et accepte le risque d’aller jusqu’au tribunal administratif. En effet, selon la préfecture, le maire a deux mois à compter de ce recours gracieux pour procéder au retrait de la délibération. A défaut, le préfet peut en demander l’annulation auprès du tribunal administratif.
En 2013, la préfecture avait déjà saisi le tribunal administratif alors que la ville avait élevé au rang de citoyen d’honneur Majdi Irhima-Al-Rimawi. Ce prisonnier palestinien a été condamné à quatre-vingts ans de prison en Israël pour sa participation à l’assassinat du ministre de droite nationaliste, Rehavam Zeevi, en 2001. Le tribunal administratif de Cergy avait ordonné l’annulation de cette distinction évoquant une délibération « non justifiée par un intérêt local ».. La plaque installée devant l’hôtel de ville avait dû être retirée, laissant l’olivier planté là en symbole
Dans le cas d’aujourd’hui, le maire ira aussi jusqu’au bout pour le « symbole » et par « solidarité au peuple palestinien ». « Passer au tribunal administratif nous donnera l’occasion de montrer que ces décisions de l’Etat ne concernent que la Palestine », ajoute-t-il. Sur son blog, il s’était notamment insurgé du fait que Faire citoyens d’honneur Íngrid Betancourt, Aung San Suu Kyi ou bien encore le soldat israélien Gilad Shalit, comme a pu le faire la mairie de Paris, ne serait pas empiéter sur les attributions de l’État alors que prendre position en faveur de la Palestine et de la Paix le serait ! ».
« Je trouve que c’est une juste cause »
A Bezons, l’engagement de la municipalité pour la cause palestinienne ne choque pas les habitants, au contraire. « Je trouve que c’est une juste cause », annonce d’emblée Christophe, habitant de la ville depuis les années 1980.
« Tout le monde est pour la Palestine mais personne n’ose le dire haut et fort, c’est bien que la ville se prononce ». Malika, Bezonnaise depuis sa naissance, est du même avis : « Ce que subi le peuple palestinien depuis si longtemps, ce n’est pas normal ». La jeune femme a d’ailleurs fait un don à l’association West Bani Zaïd lors de son dernier banquet de solidarité. « Ce n’est pas religieux, ce n’est pas contre la laïcité, je ne vois pas pourquoi cela pose problème à l’Etat et d’autant plus que beaucoup de pays ont déjà reconnu l’Etat palestinien, je ne vois pas ce que l’on attend ».
Laïla aussi est allée pour la première fois au banquet : « c’est bien comme démarche, plus jeune j’étais de toutes les manifestations pour soutenir les Palestiniens, sourit-elle.
Photo de couverture : Bezons (Val-d’Oise), le 30 novembre 2017. Fadwa et Arab Barghouti, respectivement épouse et fils de Marwan Barghouti, député et leader palestinien, emprisonné en Israël depuis 2004, aux côtés du maire (PC) Dominique Lesparre, de Raymond Ayivi, conseiller municipal en charge de la solidarité internationale et Christian Leduey, président de l’association Bezons West-Bani Zaïd. Ville de Bezons