A un double titre : il est pluraliste et il
est amené à construire son Etat alors qu’il n’a
pas achevé, loin de là, sa lutte de libération
nationale.
Le nationalisme palestinien dirigé par une élite
politique nationale, l’Organisation de libération
de la Palestine (OLP), est dominé par une
force majoritaire, le Fatah. Avec la création de
l’Autorité nationale palestinienne (ANP) après
les accord d’Oslo de 1993, ce front politique est devenu le parti de gouvernement
tandis que les autres composantes de l’OLP et les mouvements islamiques
sont devenus des forces d’opposition.
L’échec final du processus d’Oslo et l’éclatement de la seconde Intifada ont inévitablement
remodelé les rapports de forces au détriment du Fatah et au profit
du Hamas, laissant même prévoir l’affirmation d’une nouvelle élite politique - et aussi économique - dominée par le mouvement islamiste local.
Dans ce contexte brièvement évoqué, la question qui se pose est de savoir si
le système politique palestinien sera longtemps dominé par la confrontation bipolaire
entre le nationalisme arabe « laique » et l’islamo-nationalisme, ou si une
« troisième voie », susceptible de modifier les termes du débat politique, va
émerger. C’est tout l’enjeu représenté par Moustapha Barghouti et sa « Nouvelle
initiative » et qui, à l’élection présidentielle de janvier dernier, a réalisé
un score très honorable avec 19% des voix.
Ces entretiens avec Moustapha Barghouti permettent de connaître les éléments
politiques et idéologiques qui pourraient caractériser cette gauche nouvelle
palestinienne naissant sur les cendres de la gauche traditionnelle (communiste,
socialiste ou nationaliste radicale).
A la lecture de ce recueil réalisé par Eric Hazan, on peut avoir une idée des grands
enjeux théoriques et pratiques que devra affronter cette mouvance de gauche
laïque et démocratique. Quel programme, quelle stratégie (objectifs prioritaires,
alliances internes et internationales, formes de mobilisation et de lutte...)
tant que l’indépendance n’est pas conquise et où les luttes politiques et sociales
internes restent surdéterminées par la nécessité de l’unité nationale contre
l’occupant ?
Ce nouveau mouvement est confronté à des problèmes gigantesques pratiquement
sans précédent dans le mouvement d’émancipation des peuples.
Certes, les réflexions de Moustapha Barghouti ne peuvent prétendre apporter
des réponses sur ces questions centrales mais elles ont le mérite de présenter
les termes du débat interpalestinien qui concerne au premier chef tous les Palestiniens
mais aussi le mouvement international de solidarité.
Bernard Ravenel