Mes amis à l’étranger me demandent souvent comment je vais, un an après la flambée de violences à Gaza. J’ai du mal à trouver les mots pour décrire la terreur qui m’empêchait alors de dormir la nuit, sans savoir si je reverrais la lumière du jour. Il m’est aussi difficile de décrire l’angoisse des personnes que j’ai interrogées et qui ont survécu à l’anéantissement de leur famille par les frappes israéliennes, ou l’agonie de voir de grands immeubles de Gaza réduits en poussière.
Donc je réponds : je ne vais pas bien, mais je suis en vie.
Au cours des 11 jours d’hostilités qui ont débuté le 10 mai 2021, 260 Palestiniens ont été tués à Gaza, dont au moins 129 civils et 66 enfants, selon les Nations Unies. Douze civils en Israël ont également été tués à la suite de tirs indiscriminés de roquettes palestiniennes. L’escalade de la violence s’est produite dans la foulée d’efforts discriminatoires de la part des autorités israéliennes pour forcer les Palestiniens à quitter leurs foyers à Jérusalem-Est occupée ; ces politiques israéliennes font partie des crimes contre l’humanité d’apartheid et de persécution à l’encontre de millions de Palestiniens.
Human Rights Watch avait alors documenté des crimes de guerre manifestes commis pendant les hostilités par les autorités israéliennes, ainsi que par des groupes armés palestiniens.
J’ai parfois encore l’impression d’entendre les puissantes explosions, les sirènes des ambulances, puis les voix de survivants qui relataient des scènes d’horreur lorsque leurs murs s’étaient effondrés sur eux. Je me souviens des foules qui étaient sorties dans la rue après le cessez-le-feu, célébrant le fait d’être vivant.
Tant qu’il n’y aura pas d’efforts sérieux en Israël ou en Palestine pour tenir les auteurs de graves abus responsables de leurs actes, un nouveau cycle d’hostilités semble souvent imminent. Le nouveau cycle éclate généralement avant que Gaza ne se soit complètement reconstruite après la dernière flambée de violences. Parallèlement, les restrictions draconiennes imposées par Israël à la circulation des personnes et des biens continuent d’être en vigueur, contribuant à limiter l’accès aux services de base et rendant 80 % de la population tributaire de l’aide humanitaire.
En marchant récemment dans la rue al-Wahda, dans la ville de Gaza, je me suis souvenu des mots d’Omar Abu Al-Awf, âgé de 16 ans, seul survivant de sa famille après que les frappes israéliennes ont tué 44 civils sur cette rue : « Pourquoi ont-ils tué ma famille et m’ont-ils laissé orphelin ? Jusqu’à ce jour, nous possédions une maison. J’avais une famille. Chaque membre de la famille avait un rêve. Tout a disparu en une seconde. »
Je ne vais pas bien, mais je suis en vie.