...le PCHR lance un appel au secours l’Union Européenne, afin d’arrêter ce crime de guerre.
Lettre ouverte à la présidence européenne, appel à une action pour protéger les civils palestiniens.
Monsieur le Premier Ministre,
Bertie Ahern T.D.
Monsieur le Président du Conseil Européen,
Cher M. Ahern,
Nous vous écrivons pour exprimer notre vive préoccupation à propos de la nouvelle détérioration des droits humains et de la situation humanitaire dans les Territoires Palestiniens Occupés (TPO), particulièrement dans la Bande de Gaza.
Nous pensons que la dernière escalade des actions militaires israéliennes dans la Bande de Gaza, y compris l’offensive militaire massive qui doit être lancée à Rafah aujourd’hui, dans le but annoncé de détruire des centaines de maisons de réfugiés palestiniens, exige votre attention en urgence.
Nous appelons à une action immédiate de l’Union Européenne, en tant que haute Parie Contractante de la Quatrième Convention de Genève, afin d’assurer un arrêt immédiat de cette escalade des violations de la Convention perpétrés par les forces d’occupation israéliennes dans les Territoires Occupés.
[Nous appelons tous spécialement à l’envoi immédiat d’une protection internationale pour la population civile palestinienne dans les Territoires Occupés].
La semaine passée les forces d’occupation israéliennes ont fait usage de plus en plus de violence pendant toute une série d’attaques aériennes et terrestres dans la Bande de Gaza, utilisant des hélicoptères de combat, des chars, des bulldozers et d’autres véhicules blindés.
Ces attaques avaient pour cibles des zones résidentielles à très forte densité de population civile dans la ville de Gaza et dans le camp de Rafah au sud de la Bande de Gaza. Elles étaient très loin du principe de proportionnalité et de distinction requis par le droit international.
En conséquence, depuis la nuit de lundi 10 mai 2004, au moins 30 Palestiniens dont 21 civils qui ne combattaient pas, ont été tués par les forces d’occupation israéliennes pendant des opérations militaires israéliennes dans la Bande de Gaza. Plus de 258 civils palestiniens ont été blesses et au moins188 propriétés civiles ont été détruites ou endommagées.
La caractéristique de l’incursion israélienne à grande échelle dans le quartier de Zeitoun qui a commencé au petit matin, mardi 11 mai, c’est la destruction ciblée, dans cette zone résidentielle très peuplée, de propriétés et d’infrastructures civiles. Cela comprend les réseaux d’eau et d’électricité, les routes, les dégâts infligés à 83 maisons d’habitation et de 42 bâtiments à usage commercial ou leur destruction ainsi que celle de 30 voitures et l’arasement de 100 dunums (10 hectares) de terres agricoles. Au moins 16 Palestiniens, dont 7 civils qui ne combattaient pas, ont été tués pendant cette incursion qui a pris fin au petit matin, jeudi 13 mai. 200 autres civils palestiniens ont été blessés. Pendant cette incursion les forces d’occupation israéliennes ont aussi établi des positions militaires dans des habitations civiles. Ainsi des tireurs d’élite ont pris position dans des propriétés civiles dans la zone. Des hélicoptères de combat ont tiré des missiles sur la foule dans les rues et sur des propriétés civiles, et ont ouvert le feu avec des mitrailleuses. Les forces israéliennes ont utilisé des civils palestiniens comme boucliers humains pendant les fouilles des maisons. Des explosifs et des blindés ont été utilisés pour détruire des propriétés civiles. Le couvre-feu a été imposé dans le quartier, empêchant l’accès des équipes de secours médical et l’aide humanitaire.
Les Israéliens ont intensifié leurs actions à la suite de la destruction d’un véhicule blindé par des groupes armés palestiniens qui ont entraîné la mort d’au moins 6 soldats israéliens.
Dans le camps de réfugiés de Rafah dans le sud de la Bande de Gaza, les forces d’occupation israéliennes ont lancé une incursion aux petites heures de jeudi 13 mai utilisant des bulldozers, des hélicoptères de combat, des chars et d’autres blindés. Encore une fois cette incursion a pris pour cible une zone résidentielle civile très peuplée.
Les actions israéliennes se sont intensifiées après la mort de plusieurs soldats israéliens, tués pendant l’incursion. Cette incursion a entraîné la mort de 14 civils palestiniens, dont certains tués par des missiles tirés par des hélicoptères sur la foule dans la rue. De plus, au moins 48 civils ont été blessés. Les forces israéliennes se sont retirées momentanément samedi 14 mai mais les préparatifs d’une opération militaire majeure ont commencé ce matin (17 mai 2004) autour de Rafah, dans la perspective d’une offensive militaire prolongée.
Le PCHR est tout particulièrement préoccupé par la démolition des maisons palestiniennes, sur une échelle sans précédent à Gaza qui a caractérisé cette opération à Rafah. Le camp de réfugiés de Rafah, situé près de la frontière avec l’Egypte a été soumis à plusieurs reprises à des opérations de démolition.
Depuis le début de cette Intifada en septembre 2000, les forces d’occupation israéliennes ont démoli partiellement ou totalement environ 2000 maisons palestiniennes à Rafah, « nettoyant » une vaste étendue de terre le long de la frontière avec l’Egypte. Des milliers de civils palestiniens se sont retrouvés sans abri, pour nombre d’entre eux pour la deuxième ou la troisième fois. Les démolitions sont en général menées sans donner d’avertissement qui laisse le temps de faire appel contre l’opération et de rassembler ses biens. Un nombre toujours plus grand de Palestiniens a été tué ou blessés pendant ces opérations. [Depuis lundi 10 mai, au moins 101 maisons ont été détruites ou endommagées dans le camp de Rafah, faisant 1371 sans-abris civils]. 23 bâtiments commerciaux ont aussi été détruits ou endommagés. Des responsables israéliens ont déclaré que l’opération de démolition en cours amènera probablement la destruction de plusieurs centaines de maisons.
Les Israéliens affirment que toutes les maisons qu’ils viennent de démolir étaient vides ou utilisées par des tireurs d’élite palestiniens ou pour cacher des tunnels de contrebande, mais ceci ne correspond en rien au principe de proportionnalité et de distinction.
La nature stratégique de cette opération de démolition a été mise encore plus en évidence par des déclarations faites le mois dernier, concernant le projet de construire une tranchée parallèle à la ligne frontière, du côté palestinien du camp, dans la même zone.
Ainsi [la nécessité de sécurité militaire immédiate dont se prévalent les Israéliens n’est pas fondée].
Comme vous le savez certainement, le droit humanitaire international, surtout la Quatrième Convention de Genève, est fondé sur le principe de protection de la population civile en cas de guerre ou d’occupation. La Quatrième Convention de Genève met en place un vaste éventail de protections pour les civils sous occupation, y compris la protection de la vie et de la propriété des civils.
De manière spécifique, [la destruction massive de propriétés civiles menée de manière injustifiée et illégale et sans qu’il y ait nécessité militaire est une grave violation de la Convention] telle que définie dans l’article 147 et [un crime de guerre comme défini à l’article 85.5 du Premier Protocole Additionnel]. De plus, l’article 33 de la Convention interdit « les punitions collectives et toute mesure d’intimidation de cet ordre ».
L’échelle et les conditions des destructions récentes et envisages à Rafah s’inscrivent contre l’idée de nécessité militaire immédiate que les Israéliens mettent en avant. Comme l’a déclaré le Commissaire-Général de l’UNRWA, Peter Hansen, "Avec ces opérations militaires disproportionnées, Israël commet une violation grave du droit humanitaire. Cette punition collective ne peut en rien calmer la situation ou améliorer la sécurité d’Israël".
Cependant, bien que la communauté internationale ait reconnu clairement l’applicabilité de la Convention pour les Territoires Palestiniens Occupés (TPO) et aussi les violations répétées par Israël dans ses actions dans les TPO, ces démolitions illégales et d’autres violations continuent à recevoir l’aval de la Haute Cour israélienne.
Vendredi 14 mai 2004 le PCHR a soumis à la Haute Cour une demande au nom de 13 familles, contre la destruction prévue de maisons dans le Bloc O à Rafah. Bien qu’un ordre temporaire ait été émis vendredi soir, la demande a été rejetée par la Haute Cour dimanche 16 mai, invoquant les nécessités des opérations militaires. Israël a régulièrement refusé d’accepter l’applicabilité de jure de la Quatrième Convention de Genève dans les TPO et la Haute Cour d’Israël a systématiquement refusé de tenir les militaires et l’Etat israéliens pour responsables en conformité avec leurs obligations explicites dans le cadre de la Quatrième Convention de Genève et de la loi et des traités internationaux sur les droits humains qui s’y rapportent, dont l’Etat d’Israël est partie.
Dans ce contexte [le PCHR veut rappeler aux Etats Européens leurs obligations légales]indiquées par la Quatrième Convention de Genève afin d’assurer le respect par Israël de la Convention dans le TPO.
En ce qui concerne l’obligation générale, contenue dans l’article 1, d’assurer le respect de la Convention en toutes circonstances, [toutes les Hautes Parties Contractantes ont l’obligation d’assurer l’arrêt des violations par les militaires israéliens et d’assurer la protection de la population civile palestinienne].
Les actions requises pour remplir cette obligation ne sont pas spécifiées dans l’article 1 mais peuvent inclure un éventail d’activités légales dont la suspension des accords d’association entre l’Union Européenne et Israël et le non renouvellement d’autres accords et privilèges commerciaux. Il peut aussi s’agir de réduire les représentations diplomatiques, de réduire ou interdire le commerce des armes, la technologie militaire et la coopération scientifique, de réduire les exportations et/ou importations.
De mùanière plus spécifique, l’article 146 exige que les Hautes Parties Contractantes se chargent de rechercher et de poursuivre les responsables qui ordonnent ou commettent de graves violations de la Convention.
Alors que nous apprécions votre récente condamnation de l’opération de destructions de maisons menée les jours passés par les militaires israéliens, nous considérons qu’un telle déclaration n’est pas suffisante pour remplir les conditions requises des Etats Européens en tant que Hautes Parties Contractantes.
Au vu de la détérioration rapide de la situation actuelle et des intentions exprimées des commandants militaires israéliens quant à la démolition imminente de centaines de maisons palestiniennes il convient de prendre des mesures concrètes immédiates telles qu’imposées à toutes les Hautes Parties Contractantes à la Quatrième Convention de Genève.
Au vu de la gravité de la situation actuelle et des opérations militaires majeures en cours dans la Bande de Gaza et surtout à Rafah, le PCHR demande instamment aux Etats de l’Union Européenne d’[envoyer immédiatement une force de protection internationale des Palestiniens dans les Territoires Palestiniens Occupés].
Au vu de l’impunité effective qui continue à se développer en ce qui concerne les violations par Israël des droits humains et du droit humanitaire internationaux dans les TPO, le cycle de violence continuera à s’élever jusqu’à une situation d’absence totale du droit.
[Une action concrète en conformité avec les obligations légales clairement établies est requise d’urgence, afin d’imposer la fin de l’escalade de la violence actuelle et pour faire un pas vers une paix juste et durable pour les Israéliens et les Palestiniens].
Merci de nous avoir accordé votre attention.
Salutations respectueuses
PCHR, Gaza, 17 mai 2004