Un rappel historique mais surtout la présentation des lois et réglementations mises en place par Israël avec un objectif central : vider Jérusalem de sa population palestinienne et la présenter au yeux du monde comme la capitale éternelle, une et indivisible de l’État d’Israël. Tout concourt à cet objectif : rendre la vie des Palestiniens impossible pour les forcer à partir, organiser par des lois le transferts forcés de cette population, annexion du territoire, construction du mur.
Cet événement a été organisé dans le cadre de la Campagne Jérusalem-Est : une capitale à protéger de l’AFPS.
En première partie, les présentations de Nada Awad de l’Université Al Quds de Jérusalem et de Rania Muhareb de Al Haq ont été particulièrement éclairantes.
Jérusalem à l’heure du déménagement de l’ambassade américaine par Rania Muhareb, juriste, chargée de plaidoyer à l’association Al Haq.
La présentation portait sur les limites changeantes de la ville de Jérusalem et la politique d’Israël qui vise à modifier le caractère, le statut et la composition démographique de la ville. La déclaration du Président américain le 6 décembre 2017, reconnaissant Jérusalem comme capitale d’Israël, en violation du droit international, a donné le feu vert à la politique de transfert forcé, menée par Israël à Jérusalem.
Depuis 1948, le statut de Jérusalem a été constamment modifié par Israël, contrairement à de nombreuses résolutions des Nations unies sur le statut spécial de la ville. En 1948, Israël a annexé la partie ouest de la ville de Jérusalem, où aucune souveraineté n’est reconnue par la communauté internationale jusqu’à ce jour. En 1967, Israël a occupé et illégalement annexé la partie est de Jérusalem, qui fait partie du territoire palestinien occupé. Depuis 2002, Israël construit un mur d’annexion dans le territoire palestinien occupé, y compris dans et autour de Jérusalem-Est. Le mur d’annexion est reconnu comme illégal depuis 2004, quand la Cour internationale de justice a constaté qu’il atteint au droit des palestiniens à l’autodétermination.
Aujourd’hui, deux projets de loi en considération par le parlement israélien visent à modifier à nouveau les limites municipales de la ville de Jérusalem, contrairement à son statut en droit international, pour réaliser ce qu’Israël appelle le « Grand Jérusalem ». Avec l’adoption de ces projets de loi, Israël pourra annexer de manière illégale les colonies israéliennes dans la périphérie est de la ville de Jérusalem, tout en retraçant les limites municipales de Jérusalem pour exclure les quartiers palestiniens derrière le mur d’annexion, transférant ainsi près d’un tiers de la population palestinienne de Jérusalem de la ville, ce qui constitue une infraction grave à la quatrième convention de Genève et un crime de guerre.
Voir le contenu de l’intervention de Rania Muhareb
Transferts forcés à Jérusalem : la Nakba continue par Nada Awad, spécialiste des droits humains, chargée du plaidoyer au Community Action Center de l’université Al Quds de Jérusalem.
La présentation portait sur le transfert forcé des Palestiniens de Jérusalem et l’intensification des politiques de transfert à travers les politiques de révocation de résidences. En effet suite à l’annexion de l’est de Jérusalem en 1967, l’autorité d’occupation israélienne a donné aux palestiniens un statut de résident révocable.
Depuis 1967, Israël suit une politique visant à maintenir une majorité démographique juive dans la ville. Selon le plan municipal 2020, les palestiniens ne peuvent dépasser 40% de la population de la ville. Afin d’atteindre cet objectif, les autorités d’occupation utilisent l’argument « sécuritaire » pour introduire de nouvelles manières de révoquer les résidences des palestiniens et accélérer le transfert de la population.
Ces cas deviendront ensuite des législations, comme démontré avec l’amendement de la loi d’entrée en Israël en mars 2018, permettant au ministre de l’intérieur israélien de révoquer le statut de résident des palestiniens sur base de « manquement d’allégeance ». Ce critère avait été introduit par le ministre de l’intérieur en 2006 avant d’être introduit dans la loi israélienne en 2018 malgré son illégalité au regard du droit international humanitaire.
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Le film de Al Haq « Tout est interdit » a montré les conséquences de ces politiques discriminatoires sur le quotidien du petit village palestinien de Nabi Samwil.
Le village palestinien de Nabi Samwil, situé en Cisjordanie, est visé depuis 1967 par les responsables israéliens. Bien que non inclus dans les limites municipales élargies de Jérusalem, Israël considère le village comme zone d’importance stratégique de par sa proximité à la ville. Vers le début de l’occupation, en 1971, les forces israéliennes ont démoli les maisons des résidents, constituant un transfert forcé direct, alors que dans les décennies suivantes, Israël a continué à créer un environnement propice au transfert forcé des résidents palestiniens de Nabi Samwil. La désignation du village comme zone C et en tant que « parc national » l’a soumis à un régime de planification illégal, où la construction, y compris celle de structures simples, est largement interdite. Nabi Samwil s’est encore isolé après la construction du mur d’annexion, laissant les résidents se heurter à de sévères restrictions de circulation et d’accès en raison de leur statut de détenteurs de cartes d’identité cisjordanienne et de l’emplacement des villages à l’est de la ligne verte. La vidéo d’Al-Haq « Tout est interdit : la vie à Nabi Samwil » illustre la vie quotidienne des palestiniens à Nabi Samwil, y compris les difficultés auxquelles ils sont confrontés en raison des politiques et des pratiques israéliennes qui ciblent le village. En examinant les réalités sur le terrain, Al-Haq cherche à illustrer la politique d’Israël pour le village tout en soulignant la détermination des palestiniens à rester sur leurs terres.
Voir la présentation du film sur le site d’Al Haq (trailer en arabe sous-titré anglais ci-dessous)
La deuxième partie de la conférence était consacrée à la contribution d’entreprises françaises à la colonisation israélienne de Jérusalem-Est à travers leur implication dans le réseau de transport en commun et particulièrement le tramway.
Renée Prangé de l’AFPS a présenté l’évolution de la colonisation de Jérusalem-Est (en rappelant l’obsession israélienne de maintenir la supériorité numérique de la population juive au détriment de ses habitants palestiniens) et a démontré très clairement que le réseau de transport en commun en est un des outils essentiels.
Lire le contenu de l’intervention de Renée Prangé de l’AFPS