Depuis quelque temps des voix, certes minoritaires, s’élèvent en France pour appeler à la reconnaissance, par la France, de l‘Etat de Palestine. Les partisans de la juste cause du peuple palestinien ne peuvent que s’en féliciter car cela représente un changement qualitatif important par rapport au mutisme des responsables et hommes politiques sur ce problème, mutisme qui est en fait un soutien implicite à la politique israélienne Toutefois ces prises de position sont toujours accompagnées par le renvoi dos à dos des Palestiniens et Israéliens, les premiers parce qu’ils prôneraient la disparition d’Israël, les seconds parce qu’ils font tout pour empêcher l’existence d’un Etat palestinien. (Voir l’article de Jack Dion dans Marianne). C’est un exemple parfait de la tendance qu’on observe sur le plan international et qui consiste à attribuer la même responsabilité à l’opprimé et à l’oppresseur. Dans ces conditions il nous a paru indispensable de mettre les points sur les i à propos de cette polémique.
Concernant la partie palestinienne nous rappelons que lors des accords d’Oslo (1993), l’OLP a reconnu l’existence d’Israël, a raye de sa charte toute référence à la disparition de cet Etat et s’est contentée d’édifier un Etat palestinien sur 22 % du territoire national palestinien. Ces accords devaient être complétés par des négociations en vue de la mise au point des modalités pratiques. Outre le sabotage systématique de ces négociations par les négociateurs israéliens qui fait que 25 ans se sont écoulés sans aucune avancée, on, constate le développement de la colonisation illégale et sauvage de la Cisjordanie. Les observateurs objectifs ne font plus allusion à ces négociations qu’ils considèrent comme un piège dans lequel les Palestiniens sont tombés et pensent que le niveau de cette colonisation est tel que cela représente un obstacle majeur à l’édification d’un Etat palestinien ayant un minimum de cohérence territoriale. Seuls quelques gouvernements européens dont celui de la France continuent à y faire référence et invitent les Palestiniens à continuer à y participer en ajoutant que c’est le seul moyen de résoudre ce problème. Nous sommes en droit de nous demander s’ils le pensent vraiment car si c’était le cas ce serait de l’aveuglement pur et simple ou de la complicité avec Israël ce qui nous parait l’hypothèse la plus probable.
Côté israélien non seulement il n’est pas douteux que tout est mis en œuvre pour qu’il n’y ait pas d’Etat palestinien. Ils ne s’en cachent plus comme on a pu le lire, récemment, dans l’interview d’une ministre israélienne paru dans Marianne et qui a pour titre « Il n’y aura pas d’Etat palestinien ». A notre avis ce comportement s’inscrit dans le projet du Grand Israël prôné par Jabotinsky en 1925 qui consiste à édifier un Etat qui va du Nil à l’Euphrate peuplé uniquement de juifs.
Dans un soi-disant souci d’équité, ces mêmes personnalités accordent la même légitimité aux Palestiniens et aux Israéliens, d’avoir un Etat sur la terre palestinienne. Là également nous voudrions rappeler des données qui sont peut-être oubliées et qui remettent les choses à leur place. Si la légitimité des palestiniens ne souffre aucune restriction il n’en est pas de même de celle des israéliens. L’édification de l’Etat d’Israêl est le résultat d’une entreprise coloniale qui a commencé en 1917, et s’est poursuivie durant le mandat britannique sur la Palestine : la population juive qui représentait 4% de la population palestinienne en 1917 et qui vivait en bonne intelligence avec ses voisins palestiniens s’est révélée avoir atteint 32% à la fin du mandat britannique ce qui montre bien que l’Angleterre mandataire a bien favorisé l’émigration des juifs européens en Palestine contrairement à ses affirmations. Dès la fin de la guerre 39-45 une offensive bien organisée et bien dirigée par le monde occidental a abouti au partage de la Palestine mais dans les faits à la création du seul Etat d’Israël qui s’est révélé être un Etat bien structuré et surtout bien armée qui est arrivé très facilement à vaincre la dérisoire et courageuse résistance palestinienne ainsi que les armées arabes qui sont venues à la rescousse mais qui étaient dans un tel état de faiblesse qu’il est ridicule de les qualifier d’armée.. Il est clair que la légitimité qu’on accorde à Israël est celle du conquérant qui s’empare par la force d’un territoire et s’attribue l’appartenance à ce territoire. C’est exactement ce qui est arrivé en Algérie et qui s’est terminé comme on le sait. Cette légitimité acquise par la force ne peut, en aucune manière, être mise sur le même niveau que celle des Palestiniens qui vivent sur ce territoire depuis plusieurs siècles.