L’inégal rapport de force entre occupant et occupé fait que rien ne peut sortir des « négociations » bilatérales en cours sans une implication déterminée de la communauté internationale pour faire prévaloir le droit sur la force.
Le film des derniers jours en apporte une illustration caricaturale.
On a vu dans un premier temps Benjamin Netanyahou charger le « médiateur » américain Martin Indyk d’informer Mahmoud Abbas du refus israélien de libérer le quatrième groupe de prisonniers politiques « d’avant Oslo ». Cela, en violation de ses engagements et simultanément à la relance d’un appel d’offre pour la construction de 708 logements dans les colonies de Jérusalem-Est.
La partie palestinienne a choisi d’y répondre sur le plan du droit en annonçant par la voix de Mahmoud Abbas sa décision de signer et faire siennes 15 conventions ou traités internationaux. Autrement dit de s’engager à respecter ces conventions, avec parmi elles, celle sur les droits de l’enfant, les droits des femmes, la protection consulaire ou la 4ème Convention de Genève sur la protection des populations civiles en temps de guerre.
La réponse israélienne n’a pas tardé : les Palestiniens ont franchi la ligne rouge et devront payer le prix de leur audace. Premières mesures de rétorsion : blocage de la 3G, toujours pas déployée en Cisjordanie (on se souvient du message des jeunes palestiniens à Obama lors de sa visite : « M. le Président inutile de venir avec votre smartphone : nous n’avons pas de réseau !… »), et refus de permettre à un opérateur présent en Cisjordanie d’étendre son réseau à Gaza… Pourtant, Israël avait donné son accord pour laisser les équipements arriver à destination après trois années de blocage. Ces agissements portent un nom : punition collective.
A ce stade, on est en droit se poser une question. En quoi la signature de ces conventions représente-t-elle une menace pour la sécurité d’Israël ? Que diable la « seule démocratie du Moyen-Orient » aurait-elle à craindre par exemple à voir la Palestine s’engager au respect des droits de l’enfant ? A l’évidence ce qu’elle refuse, c’est que la Palestine se comporte comme un Etat normal au sein de la communauté des nations. A noter que cette convention a été signée par tous les pays à l’exception des nouveaux admis à l’ONU (Soudan Sud et Palestine) et parmi les signataires, seuls les Etats-Unis et la Somalie ne l’on pas encore ratifiée.
La partie israélienne dispose de la force, poursuit ses faits accomplis sur le terrain et estime pouvoir tout s’autoriser dès lors qu’on lui résiste.
Elle n’hésite pas à travestir les faits comme vient de le faire le ministre Libermann qui a dénoncé la « démarche unilatérale » de Mahmoud Abbas en direction des Nations Unies … à quelques heures de l’établissement par Israël de la liste des prisonniers à libérer ! Mensonge et enfumage avec une pitoyable tentative d’inversion de la chronologie.
A ses premières mesures de rétorsion elle a notamment ajouté le blocage, lui aussi parfaitement illégal, des taxes prélevées pour le compte de l’Autorité palestinienne (environ 100 millions de dollars par mois), essentiel pour payer les fonctionnaires en Cisjordanie comme à Gaza… ainsi que la « légalisation » de la colonie de Netiv Ha’avot construite sur des terres privées palestiniennes accompagnée de l’appropriation comme « terres d’état » d’un km2 alentour.
Cela interrogera-t-il notre gouvernement qui salue les efforts de John Kerry, en appelle aux négociations et aux « arrangements mutuellement consentis » comme si on avait affaire à deux partenaires égaux et de bonne foi ?
Les dernières semaines de « négociations » nous promettent sans doute d’autres surprises. La seule à même de faire bouger les lignes serait que la France et l’UE osent enfin dire non aux provocations israéliennes et sanctionnent ces violations permanentes du droit érigées en méthode de gouvernement.
Oui, M. Hollande, vous pouvez le faire : la ligne rouge est franchie depuis longtemps.
Il faut par contre accepter de regarder la réalité, cesser d’amadouer l’occupant et tenir une position cohérente. C’est vous qui aviez insisté sur le respect du Droit international en affirmant que « C’est la meilleure garantie pour respecter les frontières, pour régler les différends et pour faire prévaloir la sécurité collective ».
C’était le mardi 27 Août 2012 lors de votre allocution à l’occasion de la Conférence des Ambassadeurs…