L’accord annoncé le 13 août, puis signé en grande pompe le 15 septembre entre Israël et les Émirats arabes unis, complété par une déclaration commune avec le Bahreïn, est extrêmement inquiétant pour le peuple palestinien : son sort serait-il passé ouvertement au deuxième plan au profit des intérêts militaires, sécuritaires et économiques des pays arabes voisins ? L’État d’Israël, grand exportateur de technologies sécuritaires qu’il fournit bien volontiers aux despotes de la région, est-il devenu incontournable ? Netanyahou, fort du soutien inconditionnel de Trump, a-t-il gagné la partie ?
Ce serait oublier un peu vite que les autres États arabes ne se sont pas précipités pour suivre l’exemple des Émirats, et que le « deal du siècle » annoncé par Trump le 28 janvier se heurte à de fortes résistances. Au niveau des forces politiques et de l’opinion palestinienne, le rejet est unanime.
La Ligue arabe, qui n’a pas su condamner l’accord signé par les Émirats, avait clairement rejeté le plan Trump. Quant à la première étape de ce plan, l’annexion « formelle » des colonies et de la Vallée du Jourdain, elle a fait long feu après avoir été annoncée comme une composante essentielle de l’accord de gouvernement israélien. Certes, Netanyahou a annoncé qu’il n’y renonçait pas, mais il n’en demeure pas moins qu’il y a eu un coup d’arrêt.
Mais dans le contexte de la crise sanitaire et de l’impunité d’Israël, la situation en Palestine s’est considérablement aggravée. Les Palestiniens vivent l’enfer de l’occupation, de la colonisation, de l’apartheid, des exactions des colons, du blocus, des bombardements et de l’extrême pauvreté qui en résulte…
Sur le terrain, une annexion de fait avance pas à pas, et aucune protection internationale ne vient contrer cette entreprise de dépossession et d’expulsion des Palestiniens, qui n’avait jamais cessé.
Le défi pour les Palestiniens est immense, et c’est d’abord de leur part que la réponse doit venir.
L’accord annoncé le 3 septembre entre les forces politiques palestiniennes soulève à la fois espoir et scepticisme. Cette fois sera-t-elle la bonne ? Les élections annoncées, qui devraient logiquement aboutir à une profonde refondation de l’OLP, auront-elles bien lieu ? Et quelles pressions la communauté internationale sera-t-elle prête à exercer pour qu’Israël ne sabote pas ces avancées si elles se concrétisent ?
Mobilisées pour l’égalité des droits, les organisations palestiniennes de défense des droits de l’Homme ont décidé de passer à l’offensive dans la dénonciation de l’apartheid, et nous les soutenons de toutes nos forces. Et nous apportons aussi notre soutien, à travers le fonds SOS Palestine, à de nombreuses organisations palestiniennes qui agissent au plus près du terrain pour soutenir la population et combattre la pandémie.
Est-il besoin de rappeler, dans ces circonstances, l’importance de notre mobilisation ? Malgré la crise sanitaire, nous avons toujours été présents. Après la campagne de mai-juin contre l’annexion, nous avons réussi, avec plus de 50 actions dans toute la France, une formidable mobilisation contre la présence au Tour de France d’une équipe « Israël » dont les objectifs de propagande étaient étalés sans complexe. Nous devons continuer à nous mobiliser, y compris dans le contexte sanitaire actuel, dans l’espace public chaque fois que ce sera possible, et en n’hésitant pas à recourir aux outils numériques pour nous réunir et pour agir.
L’actualité nous interpelle, et suscite un besoin légitime de débat interne. Après un premier report, notre congrès se tiendra les 15 et 16 novembre.
Restons pleinement mobilisés pour en faire, quelle qu’en sera la forme, un grand moment de démocratie interne de notre organisation.
Bertrand Heilbronn, 4 octobre 2020