La loi du talion se porte bien en Terre sainte. Quelques jours à peine après la reconnaissance symbolique de la Palestine comme Etat non membre des Nations unies, le 29 novembre, Benyamin Nétanyahou n’a pas tardé à exercer des représailles. Le premier ministre israélien défend désormais un nouveau projet de construction de colonies dans une zone stratégique des territoires occupés palestiniens. Cette initiative intempestive pourrait rendre encore plus " caduque " la perspective de la création d’un Etat de Palestine aux côtés d’Israël.
En outre, le ministre des finances israélien, Youval Steinitz, a décidé de confisquer le produit des taxes des importations palestiniennes qu’Israël perçoit puis transfère à l’Autorité palestinienne. Alors que celle-ci a cruellement besoin de ces fonds pour payer ses fonctionnaires, le remboursement d’une vieille dette a, soudain, été jugé impératif.
Anticipant une ire internationale qui n’a pas manqué, y compris à Washington, le meilleur allié d’Israël, M. Nétanyahou s’est justifié en invoquant les " intérêts stratégiques " du pays. Comme si ceux-ci ne passaient pas, précisément, par la création d’un Etat palestinien qui permettrait à Israël de bénéficier, enfin, de frontières sûres et reconnues. La guerre d’attrition financière laisse tout aussi songeur : qui ne voit, en effet, que la faillite de l’Autorité palestinienne transférerait la responsabilité de plus de 4 millions de personnes à la puissance occupante, comme le stipulent d’ailleurs les lois de la guerre.
Purement symbolique, la résolution onusienne réaffirmant tout autant le droit à l’autodétermination des Palestiniens que l’" urgente nécessité " de négocier méritait-elle une contre-offensive aussi virulente ?
Le très pragmatique ancien premier ministre israélien Ehoud Olmert en doute. D’un point de vue tactique, le gouvernement israélien aurait gagné à la traiter par l’indifférence. D’un point de vue politique, en revanche, M. Nétanyahou se croit sans doute contraint de donner des gages aux plus intransigeants de ses alliés : à deux mois des législatives du 22 janvier, l’extrême droite israélienne, traditionnellement divisée, est en train de se mettre en ordre de bataille sous le commandement ambitieux de l’un de ses anciens bras droit, Naftali Bennett.
Certes, la fièvre électorale retombera après le scrutin. Certes, les Israéliens sont passés maîtres dans l’annonce tactique de projets de colonisation dont la réalisation peut s’adapter aux nécessités. Mais cet épisode souligne une nouvelle fois l’absurdité qui consiste à croire que ces deux camps sont capables de se parler sereinement et de bâtir les compromis nécessaires à la conclusion de la paix. Les Palestiniens ne sont pas en reste, si on en juge au discours prononcé jeudi à l’ONU par leur chef de file, Mahmoud Abbas : son acrimonie inutile augure mal de ce que pourrait être une négociation.
Vingt ans d’échecs, d’Oslo (1993) à Annapolis (2007) en passant par la " feuille de route " (2003), ont montré que la piste des fameuses " négociations directes ", réclamées par M. Nétanyahou, était vaine. La paix doit être forcée, imposée, là-bas. Ou elle ne sera pas.