Hebron, avec ses colons - Les rues de la vieille ville désertes, les rideaux des boutiques baissés, certains marqués de l’étoile de David (par les colons) : ce spectacle désolé, je l’avais connu il y a trois ans alors que j’avais pu entrer dans la Vieille Ville sous couvre-feu israélien. J’avais été impressionnée par ce parcours en pleine journée d’une vieille ville arabe sous couvre-feu. Mais cette année, c’est encore beaucoup plus désolant. Pourquoi ? La ville n’est pas sous couvre-feu… et le spectacle est le même. Les destructions, les couvre-feux, les barrages, les fermetures de plusieurs issues de la ville ont fini par paralyser toute activité économique.
Toujours Hébron. L’association d’échanges culturels Hébron-France. Après les visites et les échanges sur les activités de l’association, puis le déjeuner avec des invités, débat avec des étudiants, garçons et filles, qui apprennent le français. Les étudiants et les étudiantes nous racontent dans notre langue ce qu’ils font, leurs projets et surtout leurs conditions de vie avec les barrages… Une jeune fille parle à son tour et ajoute que les difficultés des femmes ne sont pas dues qu’à l’occupation. Il y a aussi « le poids de la tradition » qui est très pesant pour les femmes ; elle parle de la religion. L’assistante sociale qui encadre les étudiants essaie bien d’intervenir pour expliquer que l’islam est une religion de liberté pour les femmes, mais le débat est lancé et une réflexion assez ouverte s’instaure. La grande majorité des présents désapprouvent l’intervention de la jeune fille mais quelques-uns insistent sur l’importance de ne pas éluder cette question. Notre ami Nafez explique comment la situation d’humiliations trop fortes peut engendrer de la violence au sein de la famille. Cette capacité des Palestiniens, au moins dans certains milieux, de réfléchir, de s’exprimer et de discuter librement sur des sujets aussi sensibles, malgré la situation d’extrême difficulté qu’ils vivent, est remarquable.
Autre image frappante : la Palestine est l’endroit du monde où il doit y avoir le plus de maçons. Paradoxe. Destructions et constructions. Les Israéliens détruisent les maisons, détruisent les plantations, détruisent les routes, détruisent les écoles. Ils construisent le Mur, ils construisent les routes de contournement, ils construisent les colonies… Les Palestiniens reconstruisent ce qui est détruit et reconstruisent ce qui est à nouveau détruit. Partout des ruines et partout des maisons neuves ou en construction.
C’est la ruine. C’est la mort. C’est la résistance et c’est la vie.