"Bonjour à tous,
Je commencerais ce message par le plus triste évènement. Jeudi 12 après minuit, les soldats ont frappé à la porte de la maison de Mahmoud, un Palestinien qui suit la formation vidéo au media center et qui est aussi un ami. Il vit à tel Rumeida, dans une zone près des colonies, on avait tous
été manger chez lui quelques jours avant. Mahmoud était avec nous au media center quelques heures avant.
Sa mère allait ouvrir la porte de la maison quand les soldats l’ont ouverte violemment sur elle. Elle a été blessée à la poitrine et à la tête, il n’a pas été possible de demander l’aide d’une ambulance et elle est décédée une heure plus tard de ses blessures. Le corps
a été emmené par les soldats au Croissant Rouge palestinien une heure après son décès.
Le lendemain, j’ai lu les nouvelles sans savoir que c’était sa mère, on ne l’a su que quelques jours après. Les élèves en vidéo du media center font en ce moment un documentaire et Mahmoud veut que la mort de sa mère y figure. A 27 ans il est maintenant responsable de sa famille, et de
ses jeunes frères et sœurs, son père n’étant pas présent. Nous l’avons revu quelques jours plus tard, visiblement amaigri.
Manifestation a Tel Rumeida
Lundi dernier Emad, mon chef, m’a informée qu’une manifestation était organisée par la population locale à Tel Rumeida, contre la route que l’armée prévoit de construire pour relier la colonie de tel Rumeida aux autres colonies de la Vieille Ville. La manifestation étant prévue pour
samedi, jour du Shabat, où les colons sont très présents, Emad leur a suggéré de plutôt organiser ça le dimanche.
A peine revenue au travail hier, la manifestation a bien lieu aujourd’hui et est organisée par le CPT, Christian Peacemakers Team, un groupe de chrétiens, en général américains et qui ont 50/60 ans. Emad me demande d’y
aller pour leur dire ce qui se passe. Je rejoins le CPT dans leur bureau, tout près d’une route bloquée. On part ensuite à l’entrée de Tel Rumeida, où on rencontre l’un des résidents, Asham, chez qui j’avais déjà été. On va
chez lui sans traverser le check point, mais en passant par des jardins privés, qui nous permettent d’entrer dans la zone des colonies sans être vu par les soldats. Là on fait franchement de l’escalade pour arriver jusqu’à sa maison, où les vitres sont brisées, les arbres coupés, des poubelles sont dans son jardin, tout ces destructions faites par les colons qui habitent juste au dessus de sa maison. Dans sa maison on rejoint deux filles d’une autre organisation chrétienne, Eucumenical Accompanier, leur boulot est
d’accompagner les enfants à l’école primaire de filles de Qurtobah. Cette école, dans la zone de Tel Rumeida, est fréquemment attaquée par les colons, elle est aussi sur le tracé de la route que l’armée veut construire.
Elles me montrent des photos et même un film de quelques secondes où l’on voit les colons attaquer les petites filles sous l’œil des soldats, qui je le rappelle, sont censés protéger autant la population palestinienne
qu’israélienne selon le protocole d’Hébron signé en 1997 entre le gouvernement israélien et l’autorité palestinienne.
En venant dans la maison d’Asham elles ont été attaquées par les enfants des colons qui leur ont jeté des pierres et des oeufs et frappées. Elles ont demandé à un soldat de
les accompagner, et avant d’accepter il a dit : "comment ? vous avez peur des enfants qui jettent des pierres ?"
Plus de 40 pacifistes israéliens ont
décidé de venir ce jour en solidarité avec la population palestinienne. Ils ont essayé de venir par Kyriat Arba, une colonie àl’extérieur de la ville, mais ont été stoppés par l’armée. Les autorités israéliennes ont en effet été
mises au courant des évènements. Les colons aussi qui commencent à s’énerver, surtout àl’annonce de l’arrivée de pacifistes israéliens. Ce groupe de pacifistes a ensuite essayé de passer par Halhoul, un village àl’entrée d’Hébron et la seule voie de passage possible pour les Palestiniens, mais Halhoul était complètement bloqué.
On a alors été informés que Al Jazeera avait réussi à entrer dans la zone et se trouvait dans une autre maison, avec
d’autres membres du CPT. On a aussi appris qu’un grand nombre de soldats, et toutes les polices possibles, étaient présents sur la zone, et plus inquiétant, plusieurs groupes de colons très énervés, et aussi armés.
Ensuite on a appris que les soldats étaient entrés dans l’autre maison et ont demandé a tout le monde de partir. Moi et les deux filles de l’autre organisation, on a décidé de partir, on a alors escaladé encore pour arriver le plus près du check point où un grand groupe de colons et
notamment des enfants, attendaient. On a décidé de marcher, mais on devait passer parmi eux, les enfant sont couru vers nous et nous ont frappées et craché dessus sous l’œil des parents armés et des soldats qui nous demandaient de quitter la zone au plus vite. A la sortie, on a rencontre, la
TIPH, Temporary International Présence in Hebron, des observateurs de droits de l’Homme qui ont pris note et vont faire un rapport.
Maison détruite par les colons
Je suis arrivée au travail ce matin et on est tout de suite partis prendre des photos dans une maison attaquée par des colons dans la nuit.
Cette maison a été détruite il y a quelque semaines, le HRC réhabilite la maison, ils construisent un mur extérieur qui jouxte la colonie d’Abraham avenue.
Les colons dans la nuit ont détruit les 3 dernières rangées de pierres construites. La maison a un grillage au dessus pour la protéger des jets de pierres, d’ordures et autres des colons. Les soldats essayent de nous empêcher d’y aller mais nous laissent finalement passer. A la sortie un
soldat est sur le mur, Emad me demande de le prendre en photo mais il disparaît avant que je réussise à prendre la photo.
De retour au bureau, Asham arrive, les activistes israéliens ont finalement réussi àvenir dans la zone et sont restés dans sa maison pendant 3 heures, les soldats ont entouré sa maison mais ne sont pas rentrés àl’intérieur.
Le commandant a demandé à Asham ce que faisaient des Israéliens dans sa maison, àquoi il a répondu qu’ils étaient ses amis, et qu’ils étaient les bienvenus quand ils voulaient. Le commandant a répondu que les colons
devenaient fous, mais il n’y a pas eu d’attaques. 30 pacifistes israéliens ont tout de même été arrêtés.
A bientôt
Delphine