Perché au sommet d’une colline en plein désert, à 2 kms de la Ligne Verte (Armistice de 1949) dans le sud de la Palestine occupée et à une vingtaine de kms à l’ouest de la Mer Morte, le lieu dit Isfey Al Fauga abrite une famille de bédouins qui survit grâce à son troupeau de chèvres. Elle vit dans une grotte, avec éclairage électrique, machine à laver, télévision. Une machine permet maintenant « la séparation du beurre et du lait ». Quatre panneaux solaires ainsi qu’une petite éolienne ont été installés il y a 3 ans par une organisation internationale en relation avec des activistes israéliens. La semaine dernière, deux administrateurs civils israéliens accompagnés d’une jeep de la sécurité militaire sont venus notifier à la famille que ces panneaux n’étaient pas autorisés et devaient être détruits. Ils ont alors deux semaines pour remettre l’affaire entre les mains d’un avocat qui doit fournir tous les documents sur les terres concernées ; sinon un ordre de démolition leur sera transmis ; six ou sept jours plus tard, les
bulldozers entreront en action.
Dans ce cas présent, la notification a été remise à un avocat israélien, les frais étant pris en charge par l’organisation qui a installé les panneaux. Ils attendent maintenant la décision de la cour de justice israélienne. Ce hameau a été totalement détruit en 1997 par les bulldozers de l’armée (même la porte de la grotte a été endommagée). L’action en justice toujours menée par l’avocat israélien (4 000€, pour l’ensemble des expulsions de cette zone) leur a permis de revenir sur leur terre pour 10 ans et de reconstruire uniquement des tentes là où il y avait quelques pièces en dur. Depuis 2007, des procédures à répétition sont engagées (un excellent business pour les avocats). Mais ces bédouins n’ont le droit ni de construire des habitations, ni de creuser des puits, ni d’aménager des canaux d’irrigation, ni de rendre carrossables les pistes qui mènent aux villages. Tous les 6 mois, des photos aériennes sont prises par l’armée israélienne qui lui permettent de détecter tout manquement à la règle de l’occupant.
Ces terres désertiques magnifiques sont fréquemment utilisées par les forces armées israéliennes comme terrain de manoeuvre où les soldats « oublient » leur engins de mort. Il y a deux ans, deux neveux de Ratib al-Jbour sont morts en jouant innocemment avec l’un d’eux.
Il y a quatre ans, deux personnes sont mortes par l’explosion d’un de ces objets en voulant nettoyer la zone utilisée par les soldats. Et combien d’autres… Sans parler des animaux… Combien de fois, spécialement la nuit bien sûr, des hélicoptères déposent ici des soldats qui effraient la population par des tirs, des grenades assourdissantes. Un autre fonction des hélicoptères de l’armée consiste à arroser de produits chimiques les cultures des Palestiniens. Parfois ils brûlent , ou écrasent les récoltes avec leur tanks. Des colons participent à ces actions en venant empoisonner puits et terrains. Il y 5 ans, ces produits ont été analysés par un laboratoire de l’université de Bir Zeit qui en a démontré le danger mortel pour les animaux qui les absorbent.
Toutes ces interdictions n’ont qu’un seul but : Empêcher à tout prix les Palestiniens de penser qu’ils peuvent rester sur ces terres et les forcer à quitter cette région. Le mur de l’apartheid n’est pas construit dans cette région. « Standby par manque de moyens financiers », ironisent es Palestiniens. Non, ils pensent plutôt qu’Israël attend les effets de son épuration ethnique pour ériger son mur de la honte au nord en lisière de Yatta, loin de la ligne d’armistice, et annexer purement et simplement toute cette zone.
François-Xavier Gilles
Le 10 octobre 2013
Informations recueillies auprès de Ratib al-Jbour, porte-parole South Hebron Hills Committee et Mohammad Al-Nawajah, Directeur de l’école de Susya.