C’est ce jour-là qu’un tribunal israélien a choisi pour rendre un jugement qui condamne Marwan Barghouthi , le jeune dirigeant palestinien le plus populaire de sa génération, à 5 fois la prison perpétuelle (il s’agit là de la peine maximale en Israel qui ne connaît pas la peine de mort) et à 40 années de prison…
Un jugement très politique
Le tribunal du district de Tel-Aviv a ainsi mis un terme à près de 2 ans de procédure ponctuée d’un certain nombre d’audiences fortement médiatisées par l’administration israélienne, du moins dans un premier temps. Car le projet a vite tourné court, qui consistait à faire du procès intenté à Marwan Barghouthi, le responsable du Fatah pour la Cisjordanie, celui de l’actuelle Intifada.
En effet, tout en déniant à ce tribunal israélien toute compétence pour juger le député palestinien qu’il est, de surcroît kidnappé à Ramallah le 15 avril 2002 , lors de l’opération Rempart, et transféré illégalement en Israel (l’article 49 de la 4ème convention de Genève interdit cela à la puissance occupante et l’article 146 précise que le fait d’enfreindre une telle interdiction constitue un crime de guerre), Marwan Barghouthi a profité de la présence des média internationaux, aux audiences du procès qu’on lui intentait, pour en faire celui de l’occupation israélienne : il en a trouvé la force, malgré les tortures et la privation de sommeil qui lui ont été infligées dans les 8 semaines qui ont suivi son arrestation, malgré les conditions inadmissibles dans lesquelles il est détenu (c’est-à-dire l’isolement que ne craint pas d’ordonner, de 6 mois en 6 mois, le juge israélien de la détention) . Il a aussi été aidé par son talent d’orateur et sa parfaite connaissance de l’hébreu, appris lors d’un premier séjour dans les géôles israéliennes : jeune militant communiste ayant ensuite adhéré au Fatah, il avait été arrêté à l’âge de 18 ans et libéré seulement 5 ans et demi plus tard.
A noter que les juges de Tel-Aviv qui viennent de le condamner pour une partie des actions imputables aux Brigades Al-Aqsa et pour lesquelles il était poursuivi, ont cru bon de préciser qu’il avait agi « sur les instructions de Yasser Arafat » : selon eux et leur imagination fertile, le chef de l’Autorité Palestinienne « ne donnait jamais d’instructions explicites pour les attentats, mais laissait entendre quand le moment lui paraissait opportun ».
Peut-on imaginer juges plus zèlés envers leur gouvernement et ses objectifs, en tout cas celui qui consiste à priver le peuple palestinien de ses dirigeants modérés ? Ils viennent d’éliminer socialement l’homme de paix et de dialogue qu’est Marwan Barghouthi et les voilà prêts à reprendre du service, cette fois contre le Président palestinien.
Dans tous les pays qui se présentent comme démocratiques, les corps judiciaires nationaux tiennent à afficher un minimum d’indépendance vis à vis de leur exécutif, au nom de la fameuse séparation des pouvoirs. Israel est décidément une « démocratie » bien particulière.