Photo : Attaque de colons dans le village de Jit, en Cisjordanie, le 16 août 2024 © Activestills
Dans plus de 120 États, le Premier ministre Benyamin Netanyahou et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant risquent d’être arrêtés et transférés à la Cour pénale internationale. Au-delà de leur cas personnel, c’est toute la politique criminelle des dirigeants politiques et militaires de Tel-Aviv qui est mise en accusation.
Ce 21 novembre 2024, la CPI a en effet pris une décision historique, qui répond aux exigences des victimes, mais qui met aussi en lumière le rôle que peut et doit jouer le Droit international pour mettre un terme à l’impunité et contribuer à mettre fin à ces crimes comme aux guerres coloniales. Pour les juges, l’offensive israélienne dans la bande de Gaza et en Cisjordanie représente de graves violations du droit international humanitaire et des crimes relevant du statut de la Cour.
Israël n’a pas adhéré au statut de Rome et ne reconnaît donc pas la légitimité de la CPI. Benyamin Netanyahou a dit rejeter « avec dégoût les actions absurdes et les accusations mensongères qui le visent », accusant les juges d’être « animés par une haine antisémite à l’égard d’Israël ». Accusation utilisée ad nauseam contre quiconque critique, dénonce ou condamne sa politique suprémaciste. Le Premier ministre israélien, au mépris de l’Histoire et de la lutte nécessaire contre toute forme d’antisémitisme, est allé jusqu’à évoquer un « nouveau procès Dreyfus ». Parmi les juges qui ont voté unanimement, pourtant, un homme, Theodor Meron, survivant des camps nazis.
Tandis que l’État d’Israël a violé depuis sa création quasiment toutes les résolutions des Nations unies et de son conseil de sécurité, et ce dans une totale impunité, ces mandats d’arrêt émis par la CPI représentent un tournant. Jusqu’alors, tous les accusés poursuivis étaient des responsables africains, puis en 2023 des mandats d’arrêt ont visé des responsables russes, incluant le président Vladimir Poutine, pour les crimes commis en Ukraine. Quelle que soit la légitimité de ces mandats, difficile alors de ne pas considérer un double standard dans les mises en accusation qui n’avaient jamais concerné des dirigeants occidentaux ou leurs alliés. La Cour vient, ce 21 novembre, de démontrer son indépendance : quiconque viole le droit international et commet des crimes de guerre, contre l’Humanité ou de génocide, peut être poursuivi. En dépit des pressions ou menaces qui peuvent s’exercer sur les juges.
Reste à obtenir la mise en œuvre de ces décisions. Les États-Unis s’y refusent. Si Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, demande au contraire que ces mandats d’arrêt soient respectés, la France, elle, s’y refuse également.
Le nouveau rapport publié par Amnesty International en décembre qui, après « des mois d’enquêtes, de collecte de preuves et d’analyses juridiques », démontre que les autorités israéliennes commettent un crime de génocide contre la population palestinienne de Gaza, quelques mois après les plaidoiries des avocats et experts sud-africains, notamment, à la Cour internationale de justice, amènera-t-elle la France et les autres États récalcitrants à respecter leurs obligations issues du droit international ? « Elles [ces autorités] se sont notamment rendues coupables de meurtres, d’atteintes graves à l’intégrité physique ou mentale des personnes, et de soumission délibérée des Palestiniens et Palestiniennes de Gaza à des conditions de vie destinées à entraîner leur destruction physique. Depuis plus d’un an, la population palestinienne de Gaza a été déshumanisée et traitée comme un groupe de sous-humains ne méritant pas le respect de ses droits fondamentaux, ni de sa dignité. », rappelle Amnesty, à l’instar de témoins et responsables de plusieurs agences des Nations unies. Il est temps d’y mettre fin.
Isabelle Avran