Monsieur le Président, Monsieur le Premier Ministre
Cette lettre est écrite dans l’un des moments les plus noirs de l’histoire du conflit entre l’Etat d’Israël et le peuple palestinien. Des Palestiniens sont tués tous les jours et l’étendue des destructions des infrastructures palestiniennes est catastrophique. Les Israéliens, quant à eux, vivent dans la peur permanente d’attentats suicides et la violence règle les jours. Des deux côtés on aspire à la paix, cette paix qui n’a pas régné même un an depuis la création de l¹Etat d’Israël en 1948.
Au vu de l’extension de la colonisation israélienne et la résistance obstinée au démantèlement ne serait-ce que de la plus petite colonie dans Gaza, il est de plus en plus clair qu’Israël n’a pas la volonté, ni la résolution politique, pour mettre un terme à l’occupation et permettre la création d’un Etat palestinien souverain, libre et viable. En réalité, non seulement il n’y a pas de réelle volonté de rendre des terres mais encore on assiste à une urbanisation croissante autour de Jérusalem et à l¹extension des colonies.
Nous en appelons donc à une intervention internationale ferme et décisive, qui mette une pression telle sur Israël que l’Etat soit obligé de se plier aux lois internationales, de respecter les droits de l’Homme et les résolutions pertinentes de l’ONU. Cette pression devrait aboutir au démantèlement des colonies israéliennes dans les territoires occupés par Israël pendant la guerre de 1967 et la création d¹un Etat palestinien en ces mêmes lieux.
Nous ne considérons pas cette intervention comme anti-israélienne ni antisémite, au contraire. Cela nous semble le seul moyen de mettre un terme à un siècle d¹un conflit amer et à près de quarante ans d’une occupation brutale qui semble installée pour durer pour autant qu’on puisse le prévoir. La Grande-Bretagne et la France ont été impliquées dans cette partie du monde depuis la fin du XIXème siècle. Depuis 1945 vous avez soutenu des forces de paix et de coopération en Europe et partout dans le monde.
Nous vous demandons d’user de votre influence pour faire de même au Moyen-Orient !
Les racines de ce conflit remontent loin en arrière, au moins jusqu’au 16 mai 1916, quand les Accords Sykes-Picot entre la Grande-Bretagne et la France scellèrent le partage de leur influence respective sur les ruines de l‘empire ottoman. Les blessures et les cicatrices de ce partage sont toujours visibles aujourd’hui, et leurs effets se font sentir dans ce conflit.
Aussi demandons-nous que la France et la Grande-Bretagne prennent une position hardie qui marquera l’histoire, nous écartant ainsi des stratégies de puissance vers une stratégie de réconciliation. Ce positionnement reflèterait votre résolution que le XXIème siècle soit le siècle du droit international et des ses institutions, le siècle de la justice et de la paix.
Shulamit Aloni
Ancienne ministre israélienne de l’Education, et dirigeante du parti israélien Meretz
Dr. Hannan Ashrawi
Secrétaire générale de MIFTAH, Initiative palestinienne pour la promotion d’un dialogue global et de la démocratie, et membre du Conseil législatif palestinien pour le district de Jérusalem.